Décret PIEC : le CNPA réclame la suspension de l’arrêté d’application
Il était pourtant fort mal né, le 8 octobre 2018, au bout d’une 14e version qui ne faisait toujours pas l’unanimité auprès des représentants des réparateurs… Il est cependant entré en vigueur le 1er avril dernier, bien que le CNPA ait déposé un référé suspension contre lui auprès du Conseil d’Etat, le 29 mars. “Il”, c’est l’arrêté d’application du décret “PIEC”, lequel fixe les modalités et conditions selon lesquelles les professionnels de la réparation doivent mettre en œuvre l’article L224-67 du Code de la consommation, né de la loi de Transition énergétique.
Depuis le 1er janvier 2017, en effet, «tout professionnel qui commercialise des prestations d’entretien ou de réparation de véhicules automobiles permet aux consommateurs d’opter pour l’utilisation, pour certaines catégories de pièces de rechange, de pièces issues de l’économie circulaire (PIEC) à la place de pièces neuves». Or, l’arrêté d’application devait permettre de définir la façon dont les professionnels devaient informer leurs clients sur les prix et les conditions de ventes desdites PIEC. Mais le texte avait vite rencontré l’hostilité du CNPA, en particulier de sa branche Carrossiers.
Une première procédure contentieuse en décembre
«La 13e version de l’arrêté, en septembre 2018, avait suscité certaines demandes d’ajustements de notre part, expliquait Yves Levaillant, président de la branche en question, il y a six mois dans nos colonnes. Nous insistons notamment sur l’exemption dont doit bénéficier le réparateur lorsqu’il a un doute sur les risques encourus par le véhicule sur le plan de la sécurité routière. Tous les professionnels de la réparation auto n’ont pas l’obligation légale de s’équiper d’un outil informatique de type DMS grâce auquel il peuvent se renseigner sur la disponibilité des pièces de réemploi et s’assurer leur approvisionnement», ajoutait-il.
Las, la version finale n’a pas retenu les arguments de l’organisation professionnelle. Pourtant, comme le rappelle le CNPA dans sa newsletter du 2 avril dernier, «au mois de décembre 2018, le CNPA avait engagé une première procédure contentieuse devant la plus haute juridiction administrative française, en formulant un recours pour excès de pouvoir contre ce même arrêté». En l’occurrence, la fédération professionnelle se plaignait des trop grandes contraintes pesant sur le réparateur suite à la publication de l’arrêté sous cette forme.
Le CNPA déplore des mesures trop contraignantes
«En effet, l’arrêté étend le champ d’application de l’obligation au-delà de ce que prévoit la législation, en visant des prestations qui ne peuvent pas être qualifiées d’entretien ou de réparation, insiste le CNPA dans sa newsletter. Surtout, ses modalités d’application instaurent des mesures très contraignantes pour les professionnels et les consommateurs, et qui ne respectent pas le principe de proportionnalité au but recherché, en particulier pour les petites entreprises artisanales qui ne pourraient pas respecter le contenu du texte et s’exposeraient ainsi à des sanctions financières importantes en cas de contrôle.»
Eh oui, car l’obligation étant inscrite dans la loi et l’arrêté d’application étant bel et bien paru, ce sont à des amendes que s’exposent les réparateurs qui contreviennent à l’article L224-67 du Code de la consommation et à son corollaire.
Adapter les modalités
«Des contacts avec la DGCCRF sont en cours pour adapter les modalités d’application de l’arrêté au mieux avec les contraintes des opérateurs», précise d’ailleurs le CNPA. Face à ce référé suspension, le Conseil d’État devra toutefois rendre un avis dans un délai d’un mois maximum.
Mais que l’arrêté soit suspendu ou maintenu, le CNPA a tenu à rappeler son soutien à la filière de la pièce de réemploi et son attachement au respect de l’obligation, pour les entreprises d’entretien et de réparation auto, «d’apposer sur leurs vitrines visibles depuis l’extérieur ainsi qu’à l’endroit de l’accueil de la clientèle, l’affiche du ministère de l’Environnement de l’Energie et de la Mer qui avait été réalisée en concertation avec les professionnels, et de proposer à leur clientèle des pièces issues de l’économie circulaire (pièces de réemploi ou échange standard), comme ils l’ont toujours fait».