Marché de la pièce ancienne : pourquoi il faut sauver Renovatio...

Nés en 2018, Renovatio et son site e-commerce Bakelit.fr avaient fait un évident constat : l’entretien-réparation des voitures classiques (de 1920 à 1980 pour les «oldtimers», de 1980 à 2000 pour les «youngtimers») ne dispose d’aucun One Stop Shop susceptible d’accompagner la croissance d’un marché à +11% par an et qui atteint déjà 16 milliards d’euros sur les 5 pays européens majeurs, dont 4 milliards pour la seule France.

Sur ce marché atomisé de spécialistes et passionnés qui construisent leurs activités ou entretiennent et réparent leurs véhicules anciens de façon généralement empirique, l’initiative Renovatio est une bénédiction qui ne leur a pas échappé. En 5 ans et malgré la parenthèse Covid, l’entreprise et ses maintenant 10 collaborateurs ont fédéré plus de 8000 clients professionnels et particuliers et identifié plus de 170 fournisseurs et équipementiers spécialisés, en France comme en Europe.

Son outil de conquête ? Des datas et un catalogue inédits dans ce monde aux connaissances disséminées et souvent jalousement gardées. Plus de 4 000 véhicules de plus de 20 ans ont déjà été finement documentés et 2,5 millions de références recensées, pendant que l’identification de sourcings fiables a permis de développer une conciergerie BtoB de recherche en pièces rares qui a séduit plus de 200 utilisateurs. Un catalogue qui permet à bien des distributeurs de pièces de revisiter avec pertinence leurs stocks morts pour identifier et revendre des pépites insoupçonnées.

«Sur les youngtimers, notre catalogue est 30% plus complet et documenté que TecDoc, la référence en recherche de pièces», calcule Benjamin Abitbol, le fondateur de Renovatio Automotive. L’entreprise a aussi référencé des producteurs de pièces 3D et ceux capables de produire les petites séries essentielles à la renaissance de pièces aussi disparues que recherchées...

Si Renovatio Automotive est aujourd’hui en redressement judiciaire, ce n’est donc pas à cause du marché dont l’entreprise a décidé d’accompagner la structuration. Elle a bel et bien rencontré la demande des acteurs puisqu'elle a triplé son chiffre d’affaires en 2022.

Si elle est aujourd’hui en difficulté alors qu’elle a rempli tous les objectifs promis à ses actionnaires lors de la première levée de fonds en juillet 2021, c’est parce ces derniers viennent de renoncer, pour des questions exogènes de changements de stratégie et/ou d’organisation qui leur sont propres, à suivre la seconde levée de fonds qui était jugée nécessaire depuis le printemps dernier et n’a donc pas abouti cet automne. La stratégie d’une startup gagnante étant d’accélérer son développement et sa maturité en consommant un maximum de carburant financier au décollage, il lui manque donc maintenant la seconde tranche de financements qui doit la conduire à l’équilibre en 2025.

Un moment évidemment difficile pour Benjamin Abitbol et son équipe qui ont construit une offre et des solutions attendues et reconnues par les acteurs du marché. Mais une bonne raison aussi pour partir à l’assaut d’investisseurs nouveaux. «Bien entendu, nous continuons à prendre et à livrer au quotidien les commandes de nos clients, rassure Benjamin Abitbol. L’entreprise a de quoi continuer son activité et remplir ses obligations vis-à-vis de l’ensemble de ses partenaires, fournisseurs comme de ses salariés. Nous sommes une marketplace qui par définition ne fait pas de stock ; nos engagements fournisseurs sont donc limités et rigoureusement honorés.»

Avis donc aux investisseurs. ils vont sûrement se souvenir qu’en France en 2022, 98103 modèles d’au moins 30 ans ont été vendus (+3,1 %). Des transactions qui ont même bondi de 22,4% depuis 2020, rappelait une étude de NGC-Data en début d'année. Une dynamique au service d'environ 5 millions de voitures de plus de 20 ans (12% du parc roulant) qui ont toutes besoin de pièces et d’entretien. Et en France seulement, puisque l’Europe des anciennes s'élargit à 13,3 millions de véhicules anciens dont les dynamiques youngtimers consomment 9 milliards d’euros en prestations après-vente et les vénérables oldtimers, 7,4 milliards...

Octobre va donc être consacré «à l’analyse des offres de reprise totale ou partielle, afin de définir les modalités de poursuite de l’activité», explique Benjamin Abitbol. On le croisera dans les traverses d’Equip Auto Lyon avec une passion intacte et pleinement mobilisé pour ce marché que Renovatio et son équipe ont réussi à servir. Et afin, comme le slogan de l’entreprise le proclame, que l’on continue de pouvoir se dire que «rouler en ancienne ne signifie plus rouler à l’ancienne !».