EXCLUSIF – Contrôle technique: l’ère des contrôles de complaisance?

Jérémie Morvan
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Derrière les chiffres a priori encourageants du bilan 2013 du contrôle technique en France pourrait bien se nicher un mal profond pour la profession : des contrôles "de complaisance". Ou quand l’économique ne fait peut-être pas bon ménage avec la (vraie) sécurité ?
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R. Minez, pdt de la brancheContrôle technique de la FNAALa semaine dernière, un article a priori banal concernant le bilan des contrôles techniques effectués en 2013 a généré un commentaire sur notre site qui méritait un approfondissement. Le commentaire en question émanait en effet d'un professionnel pour le moins crédible : Raymond Minez, président national de la branche contrôle technique de la FNAA. Il y expliquait en substance que la baisse du nombre de contre-visites enregistrées en 2013 par rapport à 2012 pourrait être liée à d'autres raisons qu'à l'apparente amélioration de l'état du parc. Pour lui, il ne faut pas exclure que «le nombre croissant d'ouvertures de centres entraîne de ce fait ceux-ci dans de grosses difficultés financières. Cette situation a sans aucun doute un impact indiscutable sur la diminution des contre-visites afin de pouvoir survivre.»Car tous les ans, précise-t-il en substance, 500 nouveaux centres de contrôle techniques apparaissent en France. Mais le parc, lui, n’augmente qu’à la marge : le développement de ces nouvelles entreprises ne peut donc s’opérer qu’au détriment des centres existants. Il faut bien aller prendre des clients auprès des centres déjà installés dans la même zone de chalandise, notamment en cassant les prix (les nouvelles entreprises ne payant pas d’impôt durant les deux premières années). «En face, pour survivre, les centres installés et qui ont embauché plusieurs contrôleurs techniques ces dernières années, ont parfois tendance à se montrer plus ‘conciliants’ lors des visites périodiques...» Ou effectuer un peu rapidement les dits contrôles pour augmenter la productivité des contrôleurs du centre…Davantage contrôler les contrôleurs ?Le mot est lâché : pour faire face à des problèmes de rentabilité, certains centres initieraient donc une dangereuse stratégie de fidélisation à travers des contrôles de ‘complaisance’. Une stratégie qui pourtant ne devrait guère étonner : en effet, comment s’expliquer un recul de 1,35% du nombre de contre-visites pour les VP (19,05% en 2013 alors qu’il était de 20,40% en 2012) et ce, pendant que le nombre total de contrôles périodiques effectués est en hausse de 3,2% ? Comment expliquer également cette baisse de contre-visites tandis que les ventes de VN ne permettent pas de rajeunir significativement l’âge moyen d’un parc roulant qui dépasse les 8 ans ?«Dans la très grande majorité des cas, le client particulier ne comprend pas pourquoi son véhicule est soumis à contre-visite et qu’il s’agit de sa sécurité», déplore Raymond Minez. Le contrôleur doit donc composer avec cela. Et cela va même plus loin : «Il arrive également que des professionnels de l’entretien-réparation qui font passer 30 à 40 véhicules par mois dans un centre, demandent à ce que ces véhicules soient ‘bien traités’ sans quoi, il pourrait bien aller chez le voisin la prochaine fois !» Sans penser à la systématisation "ouverte" de telles pratiques, on peut au moins imaginer que des contrôleurs inquiets ou financièrement à la dérive se montrent tacitement moins scrupuleux sur les contrôles car trop heureux de capter de telles mannes salvatrices...Aussi devient-il de plus en plus urgent pour Raymond Minez de renforcer les contrôles des centres qui s'éloignent de façon suspecte de la moyenne nationale des contre-visites. «La FNAA –à l’instar des autres syndicats comme de certains réseauxn’a de cesse que de mettre ce problème sur la table lors de nos réunions au Ministère des Transports», explique Raymond Minez.Mais pour le moment, l’appel n’a visiblement pas encore été entendu…
Jérémie Morvan
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