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Voiture électrique: le rapport qui fait mal!

Jean-Marc Pierret
A en croire un rapport de 92 pages du très sérieux Institut National de l’Environnement Industriel et des Risques (Ineris), des inconnues de taille demeurent en matière de sécurité des batteries au lithium. De quoi inquiéter les consommateurs, mais aussi les pros...
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Certes, à la lecture détaillée du rapport de l’Ineris que nous nous sommes procuré, on constate que le Canard Enchaîné, qui en révélait la teneur le 22 juin dernier, a parfois un peu forcé le trait en privilégiant les extraits anxiogènes. Mais si la forme rédactionnelle se veut un peu «explosive», le fond n’en demeure pas moins objectif car fidèle aux multiples interrogations qui traversent les 92 pages.

Il y a donc de quoi s’inquiéter, par exemple des risques d’inflammation du «lithium métal» liés à des défauts de fabrication. Car à partir de l’ensemble des rapports d’accidents ou d’incidents disponibles, le rapport constate en page 44 «qu’une des causes majeures conduisant à des court-circuits internes était l’introduction accidentelle de particules métalliques au cours des étapes de fabrication. Ce risque de court-circuit interne (NDLR: largement médiatisés en matière de batteries d’ordinateurs portables) peut se révéler à n’importe quel moment du cycle de vie de la batterie, avec des conséquences importantes (surchauffe accidentelle provoquant incendie ou explosion des équipements munis de ces batteries). Il doit donc se maîtriser dès la fabrication, même si les risques potentiellement induits se concrétisent le plus souvent en aval. La mise en place de contrôles qualité extrêmement rigoureux au cours des étapes de fabrication est donc importante ainsi que la fabrication en salles propres».

Assez logiquement,  les experts de l’Inéris précisent en page 36 que «La sécurité des batteries Li-ion est un des points particulièrement importants sur lesquels travaillent les fabricants : ils mettent en place des barrières de sécurité pour réduire et maîtriser les risques. De gros progrès ont été réalisés pour assurer la sécurité des batteries depuis quelques années, y compris dans le choix des matériaux constituant les électrodes ou les électrolytes», rassurent temporairement les experts. Avant la douche froide: «Le choix d’une technologie représente cependant un compromis entre performance, durabilité et sécurité, et une technologie intrinsèquement sûre n’existera cependant pas dans les prochaines années».

Qui veut rejouer «le salaire de la peur?»
Mais ce n’est peut-être pas le versant industriel du rapport qui se révèle le plus inquiétant. Car quand elles vont se généraliser, ces batteries inflammables et explosives vont sortir du très encadré environnement industriel pour être confrontées à bien d’autres contraintes plus aléatoires. Le rapport note que non seulement «le lithium métal a la caractéristique de s’enflammer spontanément au contact de l’air», mais il a en outre le défaut de«réagir violemment au contact de l’eau en provoquant alors le dégagement de gaz inflammables, notamment de l’hydrogène. De plus, le lithium présente des dangers lorsqu’il est exposé à la chaleur ou à des flammes. Il s’enflamme à une température supérieure à 180°C».

Remettons tout cela dans le contexte banal d’un accident routier. Comment les pompiers ou les secours vont-ils procéder? Avant de s’inquiéter de l’état des passagers, il leur faut déjà trouver le bouton de mise hors tension qui n’est pas à un emplacement normalisé. Mais ce n’est pas le pire: Imaginons le cas d’un accident impliquant un ou plusieurs véhicules électriques, pas mal de tôles froissées et quelques dégagements suspects de fumée. Dans un tel contexte hélas potentiellement banal, on peut raisonnablement se demander si les secours s'inquièteront prioritairement du pronostic vital des automobilistes incarcérés...

Le triste exemple du GPL...
Et d’autres questions émergent au travers de ce long rapport. Quid des précautions à prendre en matière de rechange des batteries? Qu’il s’agisse de batteries de rechange et surtout de batteries usagées (donc encore plus suspectes), quelles précautions supplémentaires faut-il donc envisager dans l’atelier, chez le logisticien ou le transporteur, quand il faudra les démonter, les stocker, les transporter comme autant de fioles potentielles de nitroglycérine?

Ce rapport de l’Ineris démontre au moins une chose: il faudra encore lever un certain nombre d’incertitudes. Sinon, les pros comme les consommateurs ne voudront pas rejouer «le salaire de la peur», sans autre prime qu’un risque mal identifié. Sur ce terrain miné, l’Ineris rappelle un fait qui doit faire frissonner les constructeurs automobile qui misent gros sur l’électrique: il a suffit de très peu d’accidents en France pour que se développe le «syndrome anti-GPL». Or, l’Ineris conclut son rapport en listant 12 scénarios à risques, tous qualifiés de «critiques». Il suffirait qu’un seul se réalise pour que les voitures électriques aient brutalement l’air nettement moins... branchées.

Jean-Marc Pierret
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