Témoignage – Le triste quotidien « assurantiel » de l’expert…

Jean-Marc Pierret
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Notre récent article sur l'enquête de la revue consumériste Que Choisir, qui souligne le manque d'indépendance des experts,  a provoqué une dizaine de commentaires presque tous convergents, dont celui-ci. Il nous a paru particulièrement pertinent : il raconte par le menu le triste quotidien de la relation assureur/expert et son cortège de pressions. Pertinent... et alarmant.
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 lecteur_gris-2A intervalle régulier (tous les mois/trimestre..), l’expert reçoit un relevé de statistiques épluchant son travail poste par poste : «Vous avez “donné” une heure de peinture de plus en moyenne par dossier», «vous avez un coût moyen de pièces de 10 € plus cher ce mois-ci par rapport au mois dernier ou par rapport à vos confrères de la région», «le pourcentage de dossier VEI est trop bas/trop élevé par rapport à vos confrères», «le prix moyen des véhicules que vous avez passé en épave est trop élevé par rapport à vos confrères», ... « Si la barre ne se redresse pas, nous serons obligés de...»De ?? Eh bien, de baisser vos honoraires sur chaque dossier que vous ferez pour nous, ou bien de diminuer le nombre de dossiers que l’on vous envoie pour les redonner à votre confrère «moins cher»… ou carrément de ne plus travailler avec vous…. Damned ! Cela pousse effectivement à rentrer dans les clous imposés par l’assureur…«Allez les gars, le mois prochain, il faut être moins cher : on ne change plus rien, on répare. On exclue du sinistre le maximum d’éléments pour la moindre rayure antérieure. On tape dans les heures, et on passe tout en opaque, il n’y a plus de peinture nacrée… Et on s’arrange pour minimiser au maximum les valeurs des véhicules, et il faut plus de VEI, surtout qu’“ils” vont sortir des stat's sur les véhicules “réparables”…. Et vous aurez une prime de X € en cas d’objectif atteint !!»Voilà la stratégie actuelle de nombres d’experts… Car soit on répond aux exigences des assureurs, soit ces derniers trouveront quelqu’un d’autre pour le faire, laissant sur le carreau un CA, avec en plus un expert, son auto, son bureau, sa secrétaire.. désœuvrée, charge devenue inutile et à éliminer… Votre choix, monsieur l’expert ?On ne va pas polémiquer sur comment sont fixés les objectifs des assureurs en terme de coût moyen, de nombre d’heures à distribuer,… Plus les années passent, plus diminue le nombre d’heures attribuées à une opération, plus le coût moyen de remise en état veut être baissé, alors même que les véhicules deviennent plus sophistiqués, le nombre de pièces important et la technicité nécessaire au compagnon, élevée…Au fait, on vous a parlé des stat's concernant le nombre de “fraudes” à déceler chaque mois ? Non ? Eh bien il y a un nombre moyen de fraudes à remonter par mois… Si on n’y arrive pas, ce n’est pas parce que les réparateurs de votre secteur savent que ce n’est pas la peine de jouer avec ça quand vous passez ; c’est que vous n’êtes pas assez attentifs. Charge à vous d’en trouver… Certains assurés n’en sont pas encore revenus…..Le petit plus est que, même lorsque on est bien dans les clous, chaque mois voit la demande d’exécution d’un petit plus à effectuer sur chaque dossier. Oh, pas grand chose, juste un code à ajouter, une ligne à marquer, un appel à passer, un message à envoyer… Mais celui-ci, plus celui du mois dernier, et tout ceux d’avant…ça fait du travail en plus, des dossiers qui n’en finissent pas en paperasse,… le tout bien sûr sans augmenter les honoraires, ,sinon on va être plus cher que le voisin !! Ah oui, les honoraires aussi font partie des stat's….Alors oui, tous les ans, l’expert atteste auprès du ministère de tutelle qu’il est indépendant ! Indépendant comment ça ?? Eh bien il est libre d’accepter de se faire virer, perdre son mandant et fermer son cabinet... ou de faire ce qu’on lui demande et jouer le rôle imposé par l’assureur. Et, étrangement, le problème de statistique n’est jamais sur la sécurité routière, sur la qualité des réparations effectuées, ni sur la satisfaction du propriétaire (et encore moins celle du réparateur, faut pas déc...).Il est temps de réagir, il ne faut plus que le mandant soit l’assureur, ou alors il faut que l’assuré soit aussi assisté par un expert indépendant de son choix. Indépendant ? Pas facile à trouver… Essayez de trouver un expert pour une contre-expertise avec un assureur en face….
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Jean-Marc Pierret
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