Peinture : pourquoi Axalta met un pied dans la distribution

Jérémie Morvan
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Axalta s’est expliqué cette semaine sur le rachat début décembre du distributeur spécialisé dans les produits peinture P.A.D. Craignant une disparition progressive de cette population de professionnels, le chimiste entend par ce biais «pérenniser  la filière peinture». Et il étudiera toutes les opportunités…
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Début décembre, le fabricant de peinture Axalta annonçait le rachat du distributeur Peinture Antico Diffusion (PAD). Un petit séisme dans le microcosme de la distribution des produits peinture tant le secteur était −jusqu’à un passé encore récent− bien assis sur un schéma aussi établi que compartimenté : les fournisseurs fournissaient les produits ; les distributeurs (tous indépendants) distribuaient lesdits produits à leurs clients carrossiers. A charge pour les distributeurs d’accompagner ces derniers dans la transmission du savoir-faire technique nécessaire à l’utilisation optimale des dernières innovations concoctées par le fabricant.Mais ce schéma s’est vu brusquement modifié en raison de deux paramètres : d’abord une problématique de transmission d’entreprise à laquelle est venue s’ajouter une tendance lourde à la concentration dans le secteur de la distribution automobile, tous segments confondus. Lorsque ce n’est pas l’Autodistribution qui annonce l’ouverture de sa première plateforme nationale dédiée aux produits peinture à Brie-Comte-Robert (Seine-et-Marne), c’est Alliance Automotive Group qui, sur la seule année dernière, mettait la main sur les spécialistes B2C, Paban ou encore SODIP. Sans compter les stratégies de plaques de distribution VN dont la surface financière permet de sortir le carnet de chèque afin d’intégrer la fourniture de ses sites de carrosserie aux process très industrialisés…
CAP 20, l’arme pour pérenniser la filière…
C’est donc en observant tout à la fois «la diminution du nombre de distributeurs spécialisés et ce phénomène de concentration, pouvant mener à la perte de spécialisation des distributeurs» rachetés par les groupements de distribution, selon Laurent Oliveras, le directeur général d'Axalta France, que le fabricant de peinture a décidé en septembre dernier de mettre sur pied un plan intitulé CAP20 (NdlR : pour 2020). Objectif : proposer, via une structure dédiée et dirigée par Christophe Boulinguez, des mécanismes financiers à même de répondre aux problématiques de transmission de ces entreprises, que ce soit par le biais de rachat, de prise de participation voire, d’une aide financière au regroupement de plusieurs sites spécialisés. Et se positionner en alternative crédible aux offres émanant d’autres acteurs du marché.Et c’est in fine une réaction vis-à-vis du marché parfaitement logique : parce que le positionnement premium de Cromax, fer de lance du groupe en France, impose plus que jamais de proposer sur le terrain tous les services associés à un produit semi-fini pour son utilisation optimale, et qu’il convient de préserver ce savoir-faire et conserver ce lien avec les utilisateurs finaux de ses produits. Par cette initiative, Axalta entend préserver ses propres intérêts - et ses parts de marché, estimées à 33-34% selon Laurent Oliveras. Une population vitale pour les grands fabricants de peinture, «ne serait-ce qu’au regard des évolutions technologiques enregistrées au niveau de la première monte, les dernières peintures étant toujours plus difficiles à répliquer une fois arrivées dans les ateliers», ajoute Laurent Oliveras.
30 à 50 M€ de CA via une distribution intégrée
En préservant en effet le tissu de distributeurs spécialisés dans les produits peinture, il pérennise une population qui ne représente rien moins que 40% de ses clients. De gros clients, qui pèsent pour 60% des volumes de vente du fabricant en France…Et si jusqu’ici notre analyse du mois de décembre "collait" aux déclarations de Laurent Oliveras en ce mois de janvier, elle se montrait un peu trop prudente quant aux ambitions du fabricant de peinture en matière de distribution intégrée : «Nous ne nous sommes fixés aucun objectif chiffré en matière de rachat, déclare le directeur général d’Axalta France. Mais nous ne nous interdisons rien non plus : nous étudierons chaque opportunité». Laurent Oliveras a toutefois laissé filtré un indice : «que 30 à 50 M€ de CA puissent transiter par notre distribution intégrée».En clair, les emplettes ne vont pas s’arrêter au rachat d’un seul distributeur. Mais «l’intégration de la distribution ne saurait concerner qu’une partie de notre activité, précise le directeur général ; nous continuerons bien évidemment de travailler avec les autres canaux de distribution».
Lancement d’une nouvelle offre
L’autre actualité importante d’Axalta porte sur le lancement d’une 4e marque de peinture, Syrox. Lancée pour l’heure dans le Sud Est de la France, cette nouvelle offre de produit peinture ambitionne de venir compléter les trois marques historiques du groupe (Cromax, Spies Hecker et Standox) par un positionnement tarifaire plus bas.Nécessitant un temps de désolvantation entre les deux passes (donc moins de productivité), elle se destine prioritairement aux carrossiers qui ne sont pas forcément en recherche d’optimisation de leur activité de réparation-collision ; des pros pour qui il s’agit d’un complément d’activité. Misant sur une offre de produits axée sur la durabilité et la garantie du rendu via un spectrophotomètre, Syrox, pour être commercialement plus agressive, s’affranchira des services traditionnellement associés aux autres marques du groupe.
Jérémie Morvan
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