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Ateliers: la reprise se confirme… mais jusqu’à quand?

Jean-Marc Pierret
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Les 7 dernières semaines se sont penchées avec bonheur sur les activités après-vente. La toute dernière livraison de l'Observatoire hebdomadaire AM Today/EBP MéCa a même consacré la 4ème semaine de juin comme la plus porteuse depuis le début de l'année 2020 pour les ateliers des MRA. Retour sur une reprise inespérée... et sur des perspectives encore incertaines.
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Semaine après semaine depuis le déconfinement, l'activité atelier (pièces + main d’œuvre) progresse sans répit dans les ateliers des MRA dont les 14 000 représentants en France pèsent collectivement 32% des 38 millions d'entrées-atelier annuelles VP+VUL.

Après s'être ébroué durant la dernière quinzaine de confinement, le chiffre d'affaires des MRA bondissait ainsi de +37% dès la première semaine de déconfinement par rapport à la précédente. Certes, la semaine suivante enregistrait un peu encourageant -9%. Mais il s'agissait là d'un reflux hebdomadaire en trompe-l’œil lié aux 2 jours neutralisés par le pont de l'Ascension. Ce faux recul sera d'ailleurs immédiatement effacé par le +56% de la semaine suivante.

Les ateliers MRA reprenaient encore leur souffle en quatrième semaine (-12%), mais pour mieux reprendre ensuite leur inéluctable progression : +13%, puis +7% et de nouveau +7% du 22 au 28 juin derniers durant cette 7ème et dernière semaine mesurée par l'Observatoire de sortie de crise AM Today/EBP MéCa au moment où nous rédigeons ces lignes.

Les records se succèdent

Mieux encore : ces 7 semaines post-confinement ont été plus brillantes que les 11 précédant le confinement, période pourtant déjà considérée comme soutenue par moult observateurs. Le point de référence pris par l'Observatoire AM Today -la base 100 de la dernière semaine de préconfinement (du 9 au 15 mars)- était déjà ambitieux. Ce niveau n'avait été dépassé que trois fois en début d'année (voir graphique ci-dessus).

Pourtant, les 5 dernières semaines mesurées par l'Observatoire ont, elles, été constamment supérieures : 118 du 25 au 31 mai, puis 103, 117, 125 et 133 durant les 4 semaines de juin ! La moyenne de ces 7 dernières semaines atteint 108 points quand celle des 11 semaines précédant le confinement se contentait de 90,5 points. Point d'orgue de ce regain récent d'activité : la dernière semaine de juin s'est même offert le luxe de décrocher haut la main le record de la plus forte semaine de l'année 2020...

Les trois bonnes fées de la relance

Ce rush vers les ateliers de réparation, salué avec soulagement par tous les acteurs de l'après-vente, s'explique triplement :

  1. Par la nouvelle échéance du contrôle technique qui, il y a 2 ans, avait provoqué un afflux de contrôles jusqu'au 20 mai 2018, date d'entrée en vigueur d'un durcissement alors largement annoncé et hypertrophié par les médias. En juin 2018, le GiPA constatait d'ailleurs que les entrées-atelier, nourries par l'anticipation inquiète des automobilistes, avaient ainsi exceptionnellement bondi de +6% en mars-avril.
    Et on ne parlait pas d'une vaguelette. Début 2019, l’Utac-OTC qui régit le contrôle technique en France avait quantifié précisément le phénomène. La fréquentation des centres avait ainsi bondi de +25% sur les quatre premiers mois de 2018 pour culminer à +61% en avril ! Le flot s’est ensuite retiré de juin à décembre. Mais comme l'échéance suivante de 2020 est arrivée en plein confinement, cet afflux logique de nouvelles pré-visites, visites et contre-visites biennales a dû être lissé par un étalement de dates limites qui va se prolonger jusqu'à début octobre. Les inévitables entrées-ateliers concomitantes vont donc alimenter les réparateurs pour encore de longs mois...
  2. En ces temps d'incertitudes pandémiques, la voiture particulière incarne la sécurité sanitaire des déplacements quotidiens. Le désamour pour les transports publics ne se dément pas depuis le déconfinement. L'utilisation de la voiture se sanctuarise même, lentement mais sûrement, au rythme des craintes de clusters et de reconfinement.
  3. Et voilà que les vacances “hexagonales” se confirment : franchir nos frontières n'est plus une option pour nombre de Français ; et s'ils voulaient encore sortir de France, voilà que l'Espagne, le Portugal, l'Italie et même la Suisse, destinations limitrophes par excellence, multiplient les clusters et reconfinent localement. La Grande-Bretagne inspire tout autant la suspicion. Quant au voisin allemand et autres pays nordiques, s'ils sont plus sécures sanitairement, ils n'ont guère vocation à incarner des destinations d'été.
Tout le secteur en profite

Contrôle technique, véhicule protecteur et vacances en voiture constituent donc les trois bonnes raisons d'amener sa voiture au réparateur depuis le 11 mai. Elles ont dopé les bientôt 8 semaines qui viennent de séparer le post-confinement du début de la saison estivale. Elles vont probablement continuer à le faire au moins début juillet, août s'annonçant très embouteillé.

Cette boulimie d'entretien-réparation est confirmée par tout le secteur de l'après-vente. Les équipementiers confessent souvent avoir du mal à fournir la demande en pièces de rechange. Les enseignes du retail vivent la même frénésie que les MRA. Certains et certaines avouent même atteindre en juin -voire même depuis fin mai pour quelques happy fews-, le budget initialement prévu en début d'année pour ces deux mois. Quelques uns et quelques unes n'excluent même plus d'avoir effacé les deux mois d'atonie pandémique d'ici la fin de l'année.

Mais si le pire n'est jamais certain, le meilleur n'est pas encore garanti. Les doutes demeurent à partir de début août. Une tête de réseau nous le confiait récemment : «août est traditionnellement un mois incertain ; certaines années, il explose ; d'autres, il s'effondre.» Le contexte inédit post-confinement le rend plus illisible que jamais.

Certes, ce qui est déjà repris n'est plus à reprendre. Mais l'embellie est-elle durable ? La flambée d'activité des 8 dernières semaines ne suffit évidemment pas à compenser les deux mois de confinement. La vraie question, maintenant, c'est la nature de la rentrée de septembre. Déjà, équipementiers et groupements de distribution prédisent des mesures conservatoires d'assez mauvais augure.

Grosses inquiétudes de rentrée

Les équipementiers épousent en cela les craintes des constructeurs, éminemment contagieuses par nature. Pour ce couple marié par la 1ère monte, les inconnues sur les marchés industriellement moteurs demeurent fortes. Le spectre des reconfinements rend tout le monde nerveux et prudent.

En tête de leurs préoccupations, la Chine bien sûr qui peut à elle seule tirer la croissance VN mondiale où la contrarier violemment. Les États-Unis, le Japon ou l'Europe ne sont guère plus rassurants : entre persistance de la 1ère vague, le risque d'une deuxième et le gonflement croissant d'un Tsunami de chômage planétaire, les perspectives de ventes VN demeurent terriblement aléatoires. Les espoirs d'un rattrapage en 2020, au moins partiel, s'éloignent.

Les groupements de distribution de pièces, eux, s'inquiètent avant tout d'une rentrée sociale désordonnées doublée d'une réelle récession. Cette dernière est pour l'instant endiguée par la “fonctionnarisation”, grâce au chômage partiel, de 9 millions d'emplois privés. Mais les nuages s'accumulent. Les actuels reconfinements en hémisphère Sud renforcent les craintes d'une nouvelle vague automnale ou hivernale en Europe et dans tout le nord de la planète où les plans sociaux se multiplient déjà.

Le spectre d'une vraie récession

Qu'importe d'ailleurs que ces licenciements soient opportunistes (le chômage partiel a aussi permis d'évaluer les gains de productivité) ou inévitables selon les secteurs touchés. Les télés et les radios égrainent de grises perspectives jour après jour, par pleines grappes de centaines et de milliers d'emplois menacés ou condamnés. Il n'en faut généralement guère plus pour que les esprits s'assombrissent, les dépenses se gèlent et la consommation se vitrifie.

Les faibles dépenses des ménages, ralenties par le confinement, vont certes pouvoir financer les vacances, symbole d'une liberté de mouvement retrouvée. Mais si la rentrée devait s’avérer déprimante, le reste de ces économies forcées réalisées de mars à mai va rester épargné. Les kilomètres enfin roulés depuis le 11 mai vont recommencer à baisser au fil des plans sociaux ; les transports en commun vont redevenir un risque forcé, économies conservatoires obligent, renvoyant au garage beaucoup de ces voitures redevenues prioritaires depuis quelques mois.

Wait and see

Mais allez, souvenons-nous aussi de l'impact de la crise de 2008-2009. Si les ventes VN se sont effondrées, si la crise financière a mis des millions de personnes au chômage, la rechange et la réparation ont résisté en concédant, aux pires moments, moins de 10% de recul.

Les plus pessimistes nous rappellerons bien sûr qu'il s'agissait alors d'une crise de la demande alors que le confinement conjugue de façon inédite effondrement de l'offre ET de la demande. Que le business ne s'est jamais autant effondré que durant ces deux mois de paralysie générale. Mais ils se souviendront aussi qu'en 2008, les aides d’État n'avait alors massivement soutenu que les institutions financières alors qu'elles se sont bien plus démocratisées cette fois-ci.

Les réponses, craintes ou espérées, sont de toute façon pour septembre ou octobre au plus tard...

Concernant le devenir immédiat de la carrosserie, voir «Les inquiétantes prédictions de Max Alunni»

Jean-Marc Pierret
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