Focus : des révisions bien huilées
Les indépendants ont fourbi leurs armes pour conquérir le marché de la révision des véhicules récents. Aidés par le sésame de la « garantie constructeur préservée », ils se heurtent cependant à la résistance des constructeurs.
« Il faut encore contrecarrer la communication des constructeurs en expliquant aux consommateurs qu’il n’y a pas que les réseaux constructeurs qui peuvent réviser une voiture », décrit Eddy Albert, responsable du réseau mécanique AD Expert. La révision est la première entrée atelier déclarée par nombre de MRA. Chez AD, c’est près de la moitié des volumes d’entrées atelier, suivie par la vente de pneumatiques. Sauf qu’avec l’allongement des intervalles d’entretien passés de 15000 à 30 000 km voire jusqu’à 48 000 km pour les utilitaires, le terrain est très bataillé. Car vingt ans après l’affirmation de la liberté du choix de son réparateur sans risque de perte de sa garantie constructeur (directive européenne n°1400/2002/CE), la partie n’est pas encore gagné. En 2018, ils étaient encore 51 % à ignorer cette liberté (source : TCG Conseil) ! Pourtant, en communiquant sur la révision avec « garantie constructeur préservée », « le réparateur s’engage à respecter scrupuleusement le cahier des charges du constructeur. Cela suffit à rassurer le consommateur sur la qualité de la prestation. Ce type de révision est la clé d’entrée sur le parc plus récent », assure Odette Dantas, directrice adjointe GiPA.
- 26 % des vidanges sont effectuées par les MRA, devancés par les réseaux constructeurs (35 %), mais devant les centres autos et réparateurs rapides (19 %) (source : Motul)
- + 4,3 % Projection à 2025 de la progression du volume des opérations d’entretien et + 0,9 % en valeur sur dix ans. (source : étude 2018 TCG Conseil)
- 20 à 25 % C’est le différentiel de prix moyen d’une révision chez un MRA comparé au réseau constructeur.
Pare-feu des constructeurs
Sauf que les contrats d’entretien, extension de garantie… ont bien joué leur rôle de rempart permettant aux réseaux constructeurs de garder la main sur le parc récent. « Comme agent, le flux pour les révisions s’alimente tout seul avec notre parc roulant », confirme Vincent Gérin, agent Peugeot mais également patron d’un garage Eurorepar Car Service à Damazan (47). Le parc de 0 à 3 ans reste ainsi encore majoritairement captif et les réseaux constructeurs conservent 30 % du marché de la vidange ! « C’est une clientèle de « bagarre ». On récupère aussi des déçus de la prestation ou des tarifs de la marque de leur véhicule », poursuit Vicent Gérin lorsqu’il porte sa casquette ERCS.
Course à la fidélisation
De l’avis de tous, « accrocher » le client sur une révision, c’est le fidéliser et générer quasi naturellement d’autres prestations conseillées lors de cette première rencontre. Si les entretiens périodiques sont aujourd’hui indispensables à leur flux, les ateliers indépendants devront cependant à terme réinventer un produit d’appel quand les modèles électriques occuperont significativement le parc roulant… Et ce n’est pas un hasard si les enseignes tentent de reprendre des parts de marché sur les ventes de pneumatiques qui deviendront alors indétrônable comme première cause d’entrées atelier.
PRÉCONISATIONS CONSTRUCTEUR
- Huiles homologuées incontournables
Pas question de faire l’impasse sur les normes imposées par les constructeurs concernant les huiles à utiliser pour les révisions de véhicules récents. « On retrouve ces huiles dans tout type d'atelier dès qu'il s'agit de révision constructeur », constate Eric Candelier, président & directeur commercial et marketing de Yacco.
« Une huile n’a jamais fait casser un moteur. On pourrait mettre n’importe quelle huile. Mais en cas de soucis sur le véhicule révisé c’est la première chose que regardera le constructeur », reconnait Bastien Deschamps, Top Garage Pontarlier (25). D’où une vigilance accrue des réparateurs. Dans ce contexte, Autodistribution a choisi d’investir dans l’homologation pour ses huiles Isotech. « C’est incontournable pour porter le discours d’une prestation à l’identique des constructeurs. Notre MDD dispose des caractéristiques premium avec un coût moindre », affirme Eddy Albert, responsable réseau mécanique AD Expert. Reste cependant à sélectionner la bonne huile alors que les constructeurs ont multiplié les spécifications pour dépasser la vingtaine de références pour les treize plus grands constructeurs. Si les grandes ventes se font en 5W40 et 5W30, les réparateurs annoncent conserver près d’une quinzaine de références.
Reste à être sûr d’utiliser la bonne référence ! « Être multimarque nous oblige à faire un travail de fond plus important car nous devons connaitre parfaitement le cahier des charges pour chaque véhicule avec des niveaux de prestations différents selon le constructeur dont les normes d’huiles », décrit Christophe Carreno (AD Expert à Mauguio, 34). Pour les y aider, outre les outils fournis par les enseignes, les pétroliers et les IG mettent à disposition les informations relatives aux vidanges.
Les cadenas extension de garantie et contrat d’entretien
À l’horizon 2025, un véhicule sur deux sera vendu avec un contrat d’entretien, contre 35 % en 2016. Cette prospective de TGC Conseil (étude menée en 2018 pour le CNPA), pourrait bien avoir vu juste. LLD, LOA qui montent en puissance chez les particuliers et même sur les occasions. Renault annonce un taux de pénétration de 60% des contrats d’entretien en 2019. L’extension de garantie est un levier actionné par les constructeurs pour gagner en fidélité. Toyota a dernièrement défrayé la chronique avec son offre « Toyota Relax », prenant effet à l'issue de la garantie-constructeur pour couvrir l'entretien et réparation réalisés auprès de son réseau jusqu'aux 10 ans du véhicule (160 000 km). Confirmation du succès de ces offres de Vincent Gérin, agent Peugeot mais aussi à la tête d’un garage Eurorepar Car Service. « Sur les 75 VN que je vends par an, plus de la moitié sont couverts par un contrat d’entretien ou une extension de garantie. » Un potentiel de véhicules récents intouchables par les ateliers indépendants qui vient s’ajouter aux véhicules de société, 1/3 du parc roulant, historiquement cadenassés. Certains réseaux multimarque, dont AD en 2017, ont testé la vente de contrat d’entretien, mais la formule peine à s’imposer.