«Back in the Race» : PSA révolutionne son après-vente!

Romain Thirion
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Le plan de reconquête de PSA, amorcé par son P-dg Carlos Tavares, passe évidemment par l’après-vente. Le constructeur a donc réaffirmé ses ambitions : rationaliser la distribution de pièces de rechange, améliorer fortement le taux de service, étendre le réseau Euro Repar Car Service et ne pas négliger le web, même si la stratégie officialisée à l'occasion avec Mister-Auto, reste encore à définir...
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L’urgence de réformer l’après-vente semble (enfin) saisir la plupart des grands constructeurs. Renault avait compris la nécessité, voilà déjà deux ans, de réduire le nombre de ses forfaits entretien et de mieux les packager. Volkswagen Group a décidé de tisser un meilleur maillage de distributeurs de pièces de rechange au sein de son réseau agréé. Et PSA a choisi, lui, de réduire drastiquement son nombre de stockistes (succursales comme indépendants) à 50 !Un choix radical mais qui n’est dicté que par un souci de rentabilité et de taux de service sur un marché où, «dès quatre ans, nos véhicules nous échappent déjà et sont entretenus par d’autres enseignes», selon Patrick Ferreira, directeur pièces et services France de PSA. En effet, 65% des ventes de pièces du réseau sont faites… hors réseau ! «Mais elles le sont avec une forte remise, ce qui n’est donc pas si rémunérateur, reconnaît-il. Nous voulons donc que le concessionnaire retrouve ses marges sur sa dynamique interne.»
50% de références communes aux trois marques de PSA
Il y avait donc urgence d’agir car le chiffre d’affaires après-vente de PSA, entre 2010 et 2014, a baissé de 12,5%. «Nous avions besoin d’une rupture commerciale, affirme Xavier Duchemin, directeur du commerce France de Peugeot. Le business model du concessionnaire sera davantage orienté vers l’après-vente». Naturellement, la pièce de rechange est au cœur du problème et, donc, des solutions.La première desdites solutions est le regroupement de la distribution des pièces Peugeot, Citroën et de la nouvelle marque DS sous le(s) même(s) toit(s). Ceux des distributeurs qui ne seront donc plus monomarque, mais trimarque. Voire même multimarque, puisque «la gamme Eurorepar va être étendue», explique-t-on chez le constructeur. «Souvent, nos DOPR n’avaient le stock que d’une seule marque alors que 70% des pièces sont communes à Peugeot et Citroën et 50% aux trois marques, rappelle Patrick Ferreira, comme pour exorciser cette incohérence historique. Désormais le constructeur n’aura plus deux réseaux à livrer mais un seul.»
Booster le taux de service
«Nous devons retrouver de la compétitivité sur nos pièces de rechange et la convergence du référencement mais aussi des prix entre les différentes marques en fait partie», assure de son côté Philippe Narbeburu, directeur du commerce France de Citroën et DS. Cette distribution rationalisée sera donc l’apanage d’un réseau tout aussi rationalisé (rationné diront les esprits chagrins) de distributeurs puisque les plus de 400 stockistes ne seront plus que 50 plateformes dignes de ce nom (dont certaines doivent encore sortir de terre), réparties dans toute la France, lorsque les renégociations de contrat, qui viennent d’être lancées, arriveront à leur terme.Bien sûr, rien ne se fera du jour au lendemain, puisque les DOPR se voient proposer une résiliation avec préavis de deux ans. Mais PSA attend de cette révolution une augmentation radicale du taux de service, «sur lequel nous sommes bloqués à un médiocre 70% chez nos DOPR», avoue Patrick Ferreira. Loin des taux de la distribution indépendante… «Nous voulons donc gagner 15 points», c'est-à-dire atteindre les 85% de taux de service, soit une augmentation de 21% !Ce qui implique donc de livrer plus rapidement et plus souvent les garages, qu’ils fassent partie du réseau ou non. «Nous voulons élever notre livraison au niveau de la concurrence locale et aller jusqu’à 3 livraisons par jour», confirme Patrick Ferreira. Car c’est bien le service, et non le prix de la pièce, qui est aujourd’hui le nerf de la guerre, selon Xavier Duchemin : «ne pas avoir la pièce sur demande, c’est risquer de perdre le client réparateur qui, lui-même, risque de voir fuir le client final».Diminuer le nombre de distributeurs, augmenter leur stock (20 à 25 000 références) et livrer plus souvent, en fonction des demandes locales, voilà qui devrait améliorer également la rotation des stocks –aujourd’hui bloquée à 60 jours contre 40 en moyenne chez les distributeurs indépendants– dont 10% environ ne tournent absolument pas chez les petits concessionnaires. «Nous visons une réduction des coûts logistiques de 15 à 20%», confirme Patrick Ferreira.
Quid des surfaces libérées ?
Les futurs ex-DOPR seront sans doute nombreux à regretter leur activité de stockiste mais ils pourraient tout aussi bien conserver un rôle de relais auprès des garages du réseau secondaire voire des garages indépendants. Et continuer de leur distribuer des pièces, en se fournissant dans une plateforme du réseau mais en facturant pour elle au professionnel et en récupérant sur la facture en question une marge certes moins importante, mais non grevée par les lourds frais fixes qu’entraîne le stock. Un peu à l’image de la relation qu’entretiennent les distributeurs-stockistes Autodistribution avec la plateforme du groupe, Cora : elle livre les commandes de pièces de carrosserie, de choc et le vitrage directement au client réparateur qui a passé commande. Mais c'est le distributeur qui facture et prend sa marge. PSA n’en semble pas encore là.Certes, les concessionnaires qui abandonneront la distribution de pièces de rechange seront sûrement heureux de voir débarrasser le plancher cet ennuyeux stock mort mais ils regarderont avec regrets, pour certains, le reste du stock –le gros, le vivant, celui qui tourne encore tant bien que mal– partir. Ledit stock sera donc instantanément remplacé par des mètres carrés… vides. Et même si le stock d’un concessionnaire est traditionnellement plus faible en nombre de références que celui d’un distributeur indépendant, il n’en occupe pas moins une surface importante. Alors qu’en faire ? Les hypothèses ne manquent pas mais aucune ne semble avoir la faveur de PSA pour l’instant.«Agrandir l’aire de livraison ou le showroom de véhicules neufs» est une piste, pour Xavier Duchemin. Bien sûr, la vitrine n’en serait que plus belle mais cela demande de l’investissement pour faire transformer l’arrière-boutique que constitue le stock en surface d’exposition à la vue de tous. Proposer des baies de réception active est une autre piste que le constructeur pourrait aussi explorer. «Nous proposerons également aux futurs ex-DOPR, lors de la renégociation de leur contrat, d’adosser un Euro Repar Car Service à leur concession, à la place de l’ancien stock», suggère aussi Xavier Duchemin. C'est presque hérétique, mais nécessité fait loi. Car voilà l’autre gros morceau de l’offensive après-vente de PSA : l’offre de pièces et la densification du réseau Euro Repar Car Service.
L’offre multimarque repensée
«Aujourd’hui, la gamme de pièces Euro Repar s’élève à 10 000 références et notre objectif est d’être présents sur toutes les silhouettes françaises», précise Patrick Ferreira. Entendre par là les modèles les plus courants du parc roulant. Pour la rendre plus compétitive, le pricing des pièces va être revu et le nombre de références augmenté afin de couvrir le maximum d’applications possible. PSA entend donc travailler sur le sourcing et le prix de revient afin de diminuer les coûts relatifs à cette gamme, qui sera élargie au monde entier. Le constructeur compte jouer sur les volumes pour s’offrir une économie digne de ce nom sans pour autant nuire à la qualité desdites pièces. Et peut-être aussi sur les compétences de Mister-Auto en termes de catalogue.Les pièces Euro Repar, en étant distribuées à l’ensemble du réseau, serviront même aux concessionnaires dans l’optique de reconquérir des parts de marché sur les véhicules d’autres marques ou les Peugeot, Citroën et DS plus anciens. «Nous envisageons même des contrats de maintenance avec pièces Euro Repar pour les VO vendus dans le réseau et qui, jusqu’ici, nous échappent souvent dès l’achat», affirme également Philippe Narbeburu. Concernant l’entretien des véhicules non issus du réseau, Euro Repar Car Service, en tant qu’enseigne, servira également d’aimant pour les véhicules de quatre, cinq, six ans et plus. PSA entend faire croître leur nombre à 1 200. «Nous pouvons même aller jusqu’à 1 400 centres en France», assure Patrick Ferreira.
Un Net encore flou...
Parmi les différents volets de la nouvelle stratégie après-vente de PSA, Internet n’est évidemment pas oublié. Mais si un point d’honneur a été mis sur le renforcement de la prise de rendez-vous en ligne, «générateur de 400 euros de chiffre d’affaires en plus par prestation» selon Xavier Duchemin, et sur le CRM (Consumer relationship management, autrement dit la «gestion de relation client»), le rachat plus que probable de Mister-Auto.com, «dont les modalités doivent encore être confirmées» à en croire Xavier Duchemin, n’a pourtant pas pris place dans l’exposition du plan «Back in the Race» versant aftermarket.Pourtant, celui-ci pourrait largement s’inscrire dedans, même en France. Ne serait-ce que dans une logique web-to-store (d’Internet à l’atelier) ou dans l’optique d’écouler le stock mort des DOPR (et des futures plateformes) à travers une filière maîtrisée et donc rémunératrice au lieu d’être coûteuse comme le sont les pièces immobilisées trop longtemps sur les rayonnages. Au moins l’information est-elle confirmée définitivement et, en attendant d’en savoir plus de la bouche (ou pas) de PSA, ce rapprochement de plus en plus évident donne-t-il lieu à une foule d’hypothèses, que nous explorons d’ores et déjà. Et que nous ne cesserons d’explorer à l’avenir.
Romain Thirion
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