Démentis Autodis-Oscaro : laconique Autodis, tonitruant Oscaro

Jean-Marc Pierret
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La rumeur d'une possible négociation de reprise d'Oscaro par Autodis est devenue tellement prégnante que les deux protagonistes ont dû se prononcer officiellement. Le démenti d'Autodis Group est aussi court et subtil que celui de Pierre-Noël luiggi, le patron d'Oscaro, est bruyant et vindicatif. Mais ils convergent en tout cas tous deux vers une conclusion commune : il n'y aurait rien entre Autodis et Oscaro que leurs habituelles et normales relations commerciales...
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Depuis de longs mois et tout particulièrement depuis Equip Auto, les inquiétudes sur la santé financière d'Oscaro vont grandissantes. Elles ont délié beaucoup de langues : celles d'équipementiers victimes d'encours croissants ; celles de fournisseurs de services digitaux ou logistiques agacés par des remises en question de règlements ; et celles de distributeurs malmenés par des délais de paiement extensibles. Les chiffres les plus fous courent sur le montant total des sommes attendues par ces fournisseurs : 20 M€, 40 M€, jusqu'à 80 M€ d'euros...ACR et Doyen, tous deux filiales d'Autodis Group, sont évidemment concernés en tant que fournisseurs majeurs du site de vente en ligne. De rumeurs en rumeurs, une quasi-certitude a fini par émerger dans l'esprit de beaucoup d'observateurs réputés informés : Autodis Group pourrait bien être en train de profiter de la situation difficile du site pour tenter de le reprendre. Diable...
Le bref démenti d'Autodis Group
Interrogé sur le sujet évidemment explosif de ses vues éventuelles sur Oscaro, Autodis Group a fini par ciseler un très court communiqué aussi laconique que précis. Le titre («Autodis Group confirme ses liens commerciaux avec la société Oscaro»), comme la première phrase («Partenaire de confiance de Autodis Group et de ses filiales (...) Doyen Auto et ACR Group, la société Oscaro est l'un des clients historiques de Autodis Group», sont de fait rassurants sur la santé et la pérennité d'Oscaro.La seconde et dernière phrase s'emploie, elle, à tordre le cou à la rumeur : «A ce jour, Oscaro demeure un partenaire commercial de Autodis Group et ce dernier n'envisage pas de modifier la nature des relations qui unissent les deux sociétés». Les déjà convaincus seront donc confortés sur l'invraisemblance du rapprochement. Les sceptiques, eux, souligneront le conservatoire «A ce jour»...Il nous restait donc à joindre l’emblématique président d'Oscaro. Et nous avons trouvé un Pierre-Noël Luigi flamboyant qui réfute tout en bloc.
Le long démenti de Pierre-Noël Luiggi
Après avoir démenti toute négociation avec Autodis Group ou tout soutien intrusif du distributeur, il en vient à l'essentiel : «On a dit Oscaro mourant fin 2014, puis fin 2015 et cette fois encore, fin 2017. Passez donc quand vous voulez dans nos bureaux : vous verrez que c'est la fête et que personne n'est inquiet. Revenez aussi l'année prochaine : nous serons toujours là».Et de répondre à nos questions avec l'assurance qu'on lui connaît. Le recul de son chiffre d'affaires que certaines sources voient régresser des 300 M€ de 2016 à 250 M€ cette année ? Une absurdité démentie par des annonces spectaculaires : «Oscaro est en forte progression, sur tous ses marchés et comme d'habitude profitable. L'entreprise fait 22 millions de croissance cette année et atteint 360 millions de CA sur la seule France», assène-t-il en précisant que ces chiffres s'entendent en outre net, BtoC et retours déduits.Il va même alors orienter la foudre vers son ambitieux concurrent que beaucoup considèrent à l'origine des difficultés présumées de l'entreprise : «Demandez plutôt à Mister-Auto de faire la transparence sur ses difficultés, ses 196 millions d'euros au niveau mondial dont 46 millions seulement en BtoC sur la France». Ultime pied de nez à PSA : «Si j'ai refusé de traiter avec Jean-Baptiste de Chatillon (NdlR: directeur financier du groupe PSA et patron de la stratégie Aftermarket du constructeur), ce n'est pas pour aller me vendre maintenant à Autodis».
La croisade anti-RFA d'Oscaro
Quant aux fameux encours croissants chez les équipementiers et distributeurs,  il s'agirait là encore d'une contre-vérité. Elle serait née de la réaction de Pierre-Noël Luiggi face à un système qu'il dit dénoncer comme injuste depuis toujours et auquel il a décidé de mettre fin : celui des RFA(*)Vous trouvez normal, vous, que je finance la trésorerie de mes fournisseurs et de leurs directeurs financiers en n'étant en partie payé que l'année suivante des ventes que j'ai réalisées l'année précédente ? Pas moi, argumente Pierre-Noël Luiggi. Ces RFA représentent 15 millions d'euros aujourd'hui. J'ai donc décidé que ce système a vécu et que ces 15 millions sont plus légitimes dans ma trésorerie que dans celle de mes fournisseurs».
Oscaro le justicier
Pierre-Noël Luigi est décidément prompt à endosser son costume de Zorro de la pièce auto. Comprendre donc qu'Oscaro reconstitue en fait à la source, au fur et à mesure des ventes réalisées, l’équivalent de la RFA de fin d'année qu'il sait qu'il touchera l'année suivante. Voilà d'où viendraient les rumeurs sur ces encours tant stigmatisés. Elles ne seraient absolument pas liés à une quelconque difficulté à honorer les factures, mais seulement le résultat de l'agacement de fournisseurs confrontés à la volonté d'Oscaro d'obtenir un légitime rééquilibrage de la relation commerciale.Que la démonstration soit sincère ou de circonstance, elle met adroitement tous les frustrés des RFA du côté d'Oscaro. A commencer par les clients principaux des distributeurs que sont les réparateurs, nombreux à être clients directs ou indirects du site de ventes en ligne. Autodis et les autres apprécieront sûrement.Comme d'habitude, nous vous tiendrons au courant.... (*)RFA, ou remise de fin d'année. Il s'agit d'une remise consentie par un fournisseur à un distributeur ou une centrale d’achat en fonction du volume de ventes effectuées durant l’année. Cette remise est appelée remise de fin d’année car elle ne peut se calculer qu’après la période retenue pour son calcul qui est en général l’année civile. La remise de fin d’année se traduit par un à valoir sur les prochaines commandes ou par un reversement au client acheteur de la part de l’industriel ou fournisseur.
Jean-Marc Pierret
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