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EXCLUSIF- Les drôles de voeux de Generali à « ses » experts…
Publié le 22/01/2013
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Cette pression toujours plus forte sur les experts et les réparateurs va quand même finir par plus ressembler à une gourmande et insatiable recherche de rentabilité qu'à la légitime manifestation d'une saine gestion...
Il est des vœux dont on se passerait volontiers. Ceux qu’Yves Larnaud, le patron de l’indemnisation auto de Generali, a adressé à "ses" experts sont de ceux-là. Au menu 2013 : «pression», «pas de cadeau», «sanctions» et possibles déductions sur honoraires. Épiphénomène local ou symptôme d'une maladie touchant toute une profession ?
Début janvier, la publication sur ce site de la réaction d’un expert (voir "le très intéressant témoignage d'un jeune expert inquiet...") a rencontré un rare succès auprès de nos e-lecteurs : à ce jour, il a depuis concentré… 14 987 clics (au 7 mai 2014) et provoqué quelque 19 commentaires ! Il est vrai qu’en règle générale, ce sont les mécontents qui s’expriment le plus facilement. Reste que ce taux de lecture et ces réactions traduisent, de toute évidence, un réel malaise issu de la pression que les assureurs exercent sur des experts chargés, eux, de la retransmettre aux réparateurs.Parmi cette foultitude de lecteurs, l’un d’entre eux nous a transmis copie de la lettre de bons vœux 2013 que Generali adressait, le 2 janvier dernier, à «messieurs les experts automobiles du groupe». Et ce courrier vaut tous les longs discours du monde sur l'ambiance qui préside à la profession d'expert automobile.Son signataire, c’est Yves Larnaud, le directeur indemnisation de la compagnie. Reconnaissons qu'il rend hommage en préambule au travail des experts «qui est à l’origine [des] bons résultats» de Generali, travail pour lequel «il faut ici vivement [les] féliciter». Quels sont ces excellents résultats ? Les coûts de Generali «ont été maîtrisés et l’évolution de nos chiffres bien inférieure à celle du marché» alors que «le taux de détection de la fraude a lui aussi largement progressé». Il en est de même «pour le taux d’EAD et les délais» pendant que «les VRADE aussi ont cessé d’augmenter».«Pas de cadeaux» pour des prestations «imparfaites»Mais ces civilités faites, la plume troque vite le miel contre l’acide : «En 2013, fidèle à mes habitudes, je ne relâcherai pas ma pression et ne vous ferai aucun cadeau». Diable...Après un tout dernier câlin («Vous avez été bons, vous devez l’être plus encore»), le courrier change définitivement de ton : «Votre prestation est encore imparfaite ! Mes multiples sondages dans les dossiers potentiellement frauduleux […] me permettent de dire que toutes les anomalies ne sont pas systématiquement arrêtées… J’ai par le passé promis des sanctions que je n’ai à ce jour jamais mises à exécution et ce pour aucun d’entre vous… En 2013… c’est terminé».Les experts responsables sur leurs honoraires !Le garrot se serre un peu plus quand Y. Larnaud évoque les dossiers de sinistres pour lesquels une remise de 5,5% doit être appliquée en bas de facture par le réparateur. «Vous êtes les garants de la bonne application des tarifs négociés», martèle-t-il, avant de durcir encore le ton : «Trop de dossiers sont déposés sans tenir compte de l’application de ces règles… Generali trop souvent paye la différence et jusqu’à ce jour rien ne vous a été réclamé».Et là encore, «c’est terminé !», assène-t-il en précisant la sanction pécuniaire envisagée : «En 2013, les sommes indûment versées vous seront réclamées et le cas échéant, déduites du règlement de vos honoraires».Les experts sont-ils encore indépendants ?Nous vous devons cette précaution oratoire : sur le fond, ce courrier n'est pas critiquable. Comme le dit d'ailleurs Yves Larnaud fort justement, «Le groupe Generali doit payer ce qu’il doit et TOUT ce qu’il doit, mais RIEN QUE ce qu’il doit» (en majuscules dans le texte), au nom du principe légitime qu’il «n’est plus question que nos assurés honnêtes payent pour les autres»…Mais s'il n'y a rien à reprocher au fond de la démarche, il y a en revanche beaucoup à regretter sur sa forme. Car on imagine assez facilement l’effet que de telles directives menaçantes peuvent avoir sur le terrain déjà dévasté de la réparation-collision (-10% en 2012 !) pour les réparateurs et les experts qui en vivent. On peut aussi se poser quelques questions légitimes, à commencer par celles-ci :
- dans un climat de disette, des experts devenus collecteurs car sinon responsables sur leurs deniers ne risquent-ils pas d’hypertrophier une pression déjà très forte sur les réparateurs ?
- Si les assureurs peuvent ainsi se permettre de tancer leurs experts, cela ne signifie-t-il pas que ces derniers sont aussi entrés, après les réparateurs, dans un état de dépendance tel qu’on puisse se permettre sans risque de les "secouer" ainsi jusqu’à la caricature ?
- Et quid de la qualité et de la sincérité de la relation quand on relègue ainsi des experts, indépendants par statut et par nécessité inhérente à la bonne exécution de leur mission, à un état de salariés dépendants d'un management au discours aussi "vertical" que passéiste ?
- Et soyons clair : que reste-t-il dans ce cas à l'expert de ses «obligations d'impartialité et de loyauté», exposées dans le Code de déontologie qui régit son activité et qui proclame qu'il doit «conserver en toutes circonstances son objectivité, même s'il est missionné ou rémunéré par une partie» ? A partir de quand doit-il s'estimer, selon ce même code, «ne plus être en mesure de garantir cette impartialité» et s'imposer alors «le devoir d’en informer les parties et d’interrompre sa mission» ?
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