Réparation du double embrayage : place à la pratique !

Jean-Marc Felten
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Progressivement, le double embrayage fait sa place sur le marché. Malgré ses défauts de jeunesse, Volkswagen, Renault et Ford ont su le promouvoir comme une alternative performante aux transmissions automatiques traditionnelles. La gestion optimisée ne supprime pas l’usure et les disques de friction s’usent comme sur un mécanisme simple. Mais l’opération de remplacement impose de bonnes connaissances… 

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Avec plusieurs millions de véhicules équipés de boîtes à double embrayage sur la route, le marché de la rechange peut être considéré par l’ensemble des réparateurs comme une opportunité de fidélisation du client et de progression en compétences pour l’atelier. Pour l’appréhender au mieux, rien de tel qu’une formation adaptée. Les équipementiers sont parfaitement équipés pour cela. Nous avons suivi celle proposée par Schaeffler, dans son école interne au siège en région parisienne.

Le double embrayage en réparation

Simple dans son principe, le double embrayage présente des singularités qui transforment considérablement le montage entre moteur et boîte de vitesses et, de fait, le démontage et le remplacement. Pour les principales marques, contrairement à un embrayage monodisque, l’ensemble mécanisme et commande est solidaire de la boîte de vitesses et non fixé sur le volant moteur. L’entraînement se fait alors par une double roue dentée (mâle/femelle) avec rattrapage de jeu, placée entre le volant moteur et le mécanisme. Pour un bon fonctionnement des deux embrayages, des réglages et calages sont à effectuer et nécessitent une bonne connaissance.

Rappel sur le fonctionnement

Alors qu’un embrayage traditionnel fonctionne en «débrayage» de l’entraînement des arbres, sur le double embrayage, les mécanismes sont en débrayage permanent et l’actionnement entraîne la connexion des arbres, via un des disques, et donc une des vitesses engagée. Cette disposition permet de présélectionner systématiquement une vitesse (en montant ou en descendant), pendant que le véhicule avance sur un autre rapport engagé. Ce principe impose des contraintes bien supérieures sur les butées et les mécanismes, ainsi qu’un réglage précis du jeu disque - plateau presseur, un réglage permanent de la force du mécanisme (via un réglage de type «SAC»).

Usure et rechange

Quand faut-il remplacer un double embrayage d’une transmission automatisée ? Le diagnostic de l’usure d’un double embrayage n’est pas simple d’abord parce que la gestion est assurée par l’électronique du passage des vitesses. Celle-ci est auto-adaptative comme les boîtes tout automatiques depuis les années 90. Bien sûr, si le patinage lors des passages est exagéré, ne serait-ce que sur les vitesses les plus élevées (4, 5 et plus), il traduit une usure trop importante des disques et le dépassement de l’élasticité des pièces des diaphragmes. Mais la compensation d’usure (SAC) présente sur les mécanismes et l’électro-mécanisation des commandes de débrayage trahissent le «ressenti» normal d’un débrayage humain. Des codes peuvent apparaître dans les mémoires des calculateurs des transmissions automatisées et prévenir d’un dépassement d’usure, avant l’atteinte d’un niveau critique. La maintenance électronique est donc indispensable en préalable à tout examen mécanique.

Quant au remplacement, il ne peut être réalisé qu’après le suivi d’une formation qui enseigne toutes les astuces, méthodes et justification des réglages, rappel des opérations d’anticipation à un éventuel remontage, précautions à respecter sur la manipulation des pièces, l’utilisation des composants des kits de réparation (ceux de l’équipementier, car les constructeurs peuvent ne fournir que les pièces au détail) et l’usage des mallettes d’outils. Il faut préciser que ces outils ne sont pas faits pour obliger le mécanicien à acheter des outils spécifiques, mais pour lui permettre un gain de temps indispensable à la bonne rentabilité de son activité.

Le kit d’outil est indispensable pour parcourir la procédure de réparation. Le kit d’outils est indispensable pour parcourir la procédure de réparation.
Trucs et astuces

Il faut impérativement maîtriser de nombreux points pour intervenir sur ces embrayages. Si le démontage peut s’improviser, la repose correcte et le bon fonctionnement ne peut être obtenu qu’avec les bonnes informations et pour cela, une pratique préalable sur maquette en école.

Le stage prend une journée. Après une présentation théorique nécessaire sur les principes de fonctionnements et les diverses solutions commercialisées, les stagiaires passent à la pratique. Une démonstration est réalisée, y compris le remontage qui inclut des phases de réglages très importantes pour le bon fonctionnement.

Le poste de travail de la formation double embrayage, la maquette d’opérations et le kit de pièces neuves à poser. Le poste de travail de la formation double embrayage, la maquette d’opérations et le kit de pièces neuves à poser.
Des choix très différents

Si tous choisissent le double embrayage à sec (sauf Volkswagen qui a utilisé un montage humide pour sa première génération de DSG 6 vitesses), des différences sur la commande dictent des changements importants sur les réglages ou des détails de montage. Dans le groupe VW (avec le parc roulant le plus important des 5 constructeurs) les butées sont sous contrainte avec une commande hydraulique. Un réglage de l’appui des fourchettes est donc nécessaire. Celui-ci se fait à l’aide de cales positionnées entre la butée et le mécanisme d’embrayage et vérifié à l’aide de masses calibrées fournies dans le kit d’outillage. Chaque butée a son propre réglage, qui est donné par des valeurs indiquées sur l’embrayage neuf. C’est extrêmement précis.

Chez Renault (avec le montage à boîte de vitesses Getrag), la commande est électro-mécanique à l’aide de leviers poussoirs à avance micrométrique. Le système est auto-calibré par auto-apprentissage. Sur le montage Renault, la force d’embrayage est réglée automatiquement à l’aide d’un compensateur d’usure (SAC). Mais celui-ci doit être bridé avant le montage, une opération qui est effectuée par le fabricant pour un embrayage neuf, un verrouillage qui s’effectue sur un mécanisme déjà utilisé à l’aide d’un outil spécifique fourni dans le kit et des agrafes intégrées sur le mécanisme.

Toutes ces opérations spécifiques et beaucoup d’autres sont traitées et pratiquées sous l’œil d’un technicien formateur aguerri lors des stages. On est loin de la théorie d’un cours en salle d’une «formation initiale». Pour réunir les meilleures chances d’avoir des réparateurs compétents pour monter ces pièces détachées, les équipementiers investissent des sommes importantes en structures et techniciens dédiés. Par ailleurs, les réparateurs qui cotisent aux fonds de formation peuvent être dédommagés d’une bonne part du coût pour chaque journée passée hors de l’atelier. Aucune raison dès lors de s’en passer.

Parole d’expert : une école pour monter… en compétences

Schaeffler a créé son propre site de formation dans les locaux mêmes de son siège français, aménagé pour recevoir de petits groupes de stagiaires, jusqu’à 8 pros, qui reçoivent les informations théoriques et surtout pratiques par sessions de 1 à 2 journées.

«Malheureusement, trop peu viennent se former, reconnaît Jean-Charles Petesch, coordinateur services techniques chez Schaeffler France. Il est difficile pour le MRA de quitter l’atelier plus de quelques heures. Pourtant, la formation est indispensable pour assurer un bon montage des pièces. Embrayages, mais aussi roulements de moyeux, kits de réfection de boîtes de vitesses ou réfection des trains arrière de PSA sont exigeants en connaissances et dans l’usage des kits d’outils spécifiques.

Sans cette maîtrise, beaucoup de pièces nous reviennent en garantie et sont souvent refusées pour cette raison. Les conducteurs ont besoin de professionnels experts pour entretenir les voitures d’aujourd’hui. La formation est la seule solution pour fournir un service correct.»

Jean-Marc Felten
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