Déconfinement : les assureurs commencent à entendre les carrossiers

Romain Thirion
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Suite aux diverses difficultés remontées par les carrossiers dans le cadre de la reprise d'activité suite au déconfinement, les organisations professionnelles du secteur ont fait pression sur la Fédération française de l'assurance (FFA) pour obtenir certaines garanties de sa part afin que les réparateurs auto puissent redémarrer plus sereinement.
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A mesure que le déconfinement s'est rapproché et que la reprise d'activité censée l'accompagner s'est fait de plus en plus concrète pour les réparateurs automobiles, ceux-ci se sont vite retrouvés à devoir remonter à leurs organisations professionnelles des problématiques concrètes liées aux rayon d'action des assureurs, qui figurent évidemment parmi leurs principaux partenaires au quotidien. Parmi celles-ci, citons pêle-mêle des questions de retards de paiement, d'absence d'experts sur le terrain, rendant plus difficile le bouclage de certains dossiers, ou la prise en compte de la revalorisation des taux horaires consécutive à la nécessité de désinfecter les véhicules, voire la prise en charge d'un forfait sanitaire dédié.

Naturellement, les fédérations représentatives des réparateurs que sont la FNA et le CNPA ont pris la Fédération française de l'assurance (FFA) entre six yeux et en étau pour obtenir le plus de garanties possibles de la part de ses adhérents, compagnies et mutuelles d'assurance, envers les carrossiers chargés de remettre en état les véhicules de leurs assurés. Sans oublier bien sûr la FFC-Réparateurs, qui a notamment remis sur la table la clause volumétrique que les assureurs oublient pesamment depuis 2016 qu'elle est pourtant préconisée...

Après moult échanges, la FFA semble montrer de sérieux signes de compréhension envers les demandes des professionnels de la réparation, à en croire les comptes-rendus faits à leurs adhérents par les organisations professionnelles...

Les frais des véhicules de remplacement probablement pris en charge

«Concernant la création d’un fonds spécifique pour les entreprises non conventionnées, les sociétés d’assurances rappellent leur participation à hauteur de 400 millions d'euros au fonds de solidarité mis en place par les pouvoirs publics pour venir en aide aux professionnels, notamment TPE, PME, artisans et commerçants, auquel nos entreprises font déjà appel », précise de son côté le CNPA. Et, jusqu'au 31 juillet 2020, la FFA aurait obtenu de ses adhérents assureurs qu'ils règlent dans un délai de 15 jours maximum les factures des professionnels.

De la même manière, la FFA aurait apporté des gages quant à la prise en charge les frais liés aux véhicules de remplacement, non restitués du fait de confinement, au-delà des dispositions contractuelles, pour les personnes ayant un besoin de mobilité du fait de leur activité professionnelle essentielle à l’activité de la Nation.

Le CNPA affirme aussi que les assureurs se seraient montré favorables au soutien des réparateurs, selon des modalités propres à chaque assureur, notamment selon les spécificités des conventions d’agrément passées avec leurs prestataires carrossiers.

La FNA réclame l'application des tarifs publics

«Sur ce plan, il faut constater que des sociétés d’assurances ont en effet commencé à communiquer auprès de leurs réseaux respectifs des mesures particulières favorables, se réjouit le CNPA. D'autres sociétés ont également prévu de le faire.» Des conditions d'agréments qui, la plupart du temps, contraignent plus ou moins fortement les tarifs publics des réparateurs. Or, se retranchant derrière des clauses volumétriques qu'ils imposent plus ou moins clairement aux carrossiers, les assureurs ont tout à gagner de la situation héritée du confinement, les volumes de véhicules traités en carrosserie ayant été proches de zéro.

«Aujourd’hui ce volume est non seulement nul depuis le 16 mars, mais en plus aucune assurance ne s’est rapprochée des réparateurs pour compenser ses effets dévastateurs», écrit la FNA dans un courrier à la FFA ce 11 mai. Ainsi, l'organisation professionnelle des artisans de l'auto réclame que, «pour éviter des faillites en cascade, la FNA demande à ce [que les réparateurs] puissent appliquer individuellement leurs propres tarifs publics pour l’ensemble des dossiers en cours depuis le 12 mars et ce jusqu’à la fin de l’année 2020».

Une prise en charge forfaitaire de la décontamination sur les rails

Mais dans le cadre des mesures sanitaires nécessaires au retour des clients et de leur confiance alors que la menace du coronavirus plane toujours, c'est la question de la prise en compte des frais liés à la décontamination des véhicules qui préoccupe les réparateurs. Entre les réparateurs qui réclament que leurs tarifs horaires soient revalorisés pour que soient inclus les coûts de désinfection et ceux qui plaident pour le règlement d'un forfait dédié, la FFA a été amenée à se positionner.

Ainsi le CNPA confirme que les assureurs seraient plus favorables à cette solution. «Du fait du contexte sanitaire, les adhérents de la FFA estiment qu’une décontamination du véhicule sera nécessaire afin de protéger les assurés et les professionnels, explique l'organisation professionnelle. Elle sera à ce titre prise en compte par les assureurs. Les assureurs automobiles ont également indiqué accepter de prendre en charge un “forfait mesures de protection sanitaire Covid19” permettant de couvrir les frais justifiés liés au matériel utilisé et au temps passé.»

On parle ici et là de 30 € pour le véhicule de l'automobiliste et de 45 € quand il s'agit d'un véhicule de prêt.

Les problématiques d'expertise sur la table

Mais la FNA s'est tout de même inquiété, auprès des assureurs, de la question de la place de l'expert dans ces problématiques sanitaires. Aussi, l'organisation professionnelle n'a pas manqué de rappeler à la FFA que, comme la Confédération française des experts en automobile (CFEA) l'a réclamé à ses adhérents, les expertises terrain ont été réduites au maximum durant le confinement. «Pendant la crise sanitaire, nombre de professionnels ont été dans l’incapacité de faire avancer leurs dossiers sinistres même à distance, les experts automobiles ayant cessé leurs contacts avec les réparateurs y compris sur des suivis de véhicules endommagés de soignants, sapeurs pompiers», rappelle la FNA.

Et, rappelant que la CFEA a exigé des réparateurs une désinfection stricte et sans la présence du réparateur, sans quoi les expertises terrain ne reprendraient pas, la FNA affirme regretter cette prise de position, «d'autant plus que la filière aval de l’automobile, qui est restée ouverte pendant le confinement, a adopté un guide de bonnes pratiques validé par le Gouvernement».

Espérant qu’il n’y aura pas de conflits inutiles sur la prise en charge de cette prestation «que les experts demandent de leur propre chef et que [les réparateurs sont] contraints de refacturer», la FNA a rappelé à la FFA que «les chartes de bonnes conduite [signées] avec [les] représentants [des experts] faisaient référence à une note de la FFSA et du GEMA qui avait admis la prise en charge des frais supplémentaires (notamment dans le cadre du suivi VE) lorsqu’ils représentaient "une charge complémentaire" justifiée». La fédération des artisans automobiles souligne qu'il est «constant que cette procédure de désinfection entre dans ce cadre».

Des chartes qui pourraient bien être amenées à être révisées à l'issue de la crise sanitaire actuelle, si de telles clauses ne sont pas suivies d'effets...

Romain Thirion
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