Ateliers en tenue de combat

Muriel Blancheton
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Chute brutale et sans égal de l’activité après deux mois de confinement sans chiffre d’affaires : les ateliers et la distribution PR ont traversé mars et avril dans le brouillard. Après la fermeture imposée de leurs comptoirs le 16 mars puis l’ouverture partielle autorisée de leurs ateliers, la sanction fut la même pour la grosse PME comme pour la plus petite des TPE. Sans client ni rentrée d’argent, la trésorerie a fondu comme neige au soleil. Pour preuve, cette enquête du CNPA auprès de 5 000 entreprises mi-avril auprès de ses 21 branches métiers, du concessionnaire au réparateur en passant par le recycleur :

  • chute abyssale de 85 % de l’activité en réparation,
  • 45 jours de trésorerie disponible en moyenne et autant de difficultés à s’approvisionner en pièces de rechange.
  • Effet miroir du côté des grossistes, la dégradation fut la même avec 75 % du business perdu d’après un sondage similaire de la Feda sur 200 adhérents et à la même période.

Le service d’astreinte maintenu par bon nombre d’entre eux n’a logiquement pas compensé les pertes au feu. Entrés en gestion de crise, 70% des distributeurs ont subi un report de paiement des factures des garages. À noter cependant que 80 % ont déclaré un bon, voire un excellent état des stocks sur cette période, avec une visibilité sur mai et juin. Autant dire que l’annonce d’Emmanuel Macron sur la sortie – même progressive et sous conditions – le 11 mai est un soulagement pour tout le monde. Sur les 830 réparateurs sondés par Alliance Automotive Group (MRA, carrossiers, fast-fitters et agents), trois sur dix estimaient ne pouvoir aller au-delà de cette période sans mettre en danger leur entreprise. Et à peine un sur cinq déclarait être en mesure de soutenir la crise quelle que soit sa durée. Impossible de tenir plus longtemps, même en déclenchant tous les dispositifs dégainés par l’État.

Une situation hors-normes impose des mesures sans précédent et sur tous les plans. En matière sanitaire, fiscale, sociale et économique, les pros de l’auto planchent sur leurs plans de relance. Objectif : relancer la machine. Cela impose de rassurer les salariés et les clients avec le port de masques et de gants. Cela oblige à faire respecter les gestes barrières, même s’il est plus facile de tenir la distance dans un showroom VN que dans un atelier. Malgré la situation compliquée, les pros interrogés par Zepros sont loin d’être défaitistes car ils se positionnent en mode combat.

Mesures chocs pour faire du cash

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La réouverture des portes des entreprises le 11 mai est actée mais reste sous conditions, à commencer par le retour sécurisé au travail des salariés (lire ci-dessous), afin d’éviter le retour d’une épidémie non maîtrisée. Après la sécurité viendra la relance de la machine, basée obligatoirement sur le retour du client. Car rouvrir un atelier vide serait dramatique et pourrait déboucher sur la fermeture cette fois définitive de l’entreprise qui aurait grillé ses dernières cartouches. Alors comment redonner envie aux consommateurs de consommer ? « La première condition est que l’on puisse faire des offres aux clients. » Pragmatique, Francis Bartholomé, le président du CNPA, brandit ainsi la baisse de la TVA sur certaines opérations SAV comme un levier puissant pour attirer le chaland. Les fédérations – qui ont plutôt joué le collectif dans la période – ont toutes planché sur des pistes d’accompagnement des PME. Des réflexions axées sur des mesures financières coordonnées avec l’État vers l’industrie et les services de l’auto. Objectif : reconstituer des trésoreries vidées en redonnant aux entreprises de l’oxygène. Au cœur des demandes des fédérations :

Exonération de charges sociales et fiscales des entreprises de moins de vingt salariés,

• Annulation de la TASCOM, la TLPE ou de la taxe « parking »,

• TVA : un taux réduit sur la main d’œuvre des prestations de réparation

• Prolongement du dispositif de Fonds de solidarité jusqu’à une reprise normale des activités,

• Plafonnement du taux du crédit sur toute la durée du prêt garanti par l’État,

• Respect des délais de paiement,

• Prise charge par les compagnies d’assurances de la perte d’exploitation.

Un panel de leviers financiers dans lequel la FNA aj oute un accompagnement pour la mutation numérique des patrons d’atelier. Elle demande ainsi le renforcement et la généralisation des mesures comme les chèques numériques, l’octrois de prêts à taux zéro, en lien avec Bpifrance . Une chose est certaine : il y a urgence à légiférer pour sauver la peau des pros ! Si certaines entreprises peuvent faire le dos rond quelques mois, bon nombre n’ont pas les reins financiers suffisamment solides pour tenir encore longtemps. Les rentabilités demeurent faibles dans les ateliers (moins de 3 % du CA), les bilans sont alourdis d’emprunts et il faut avancer les salaires. Si les prêts obtenus – de l’ordre de 25 % du CA – peuvent compenser un temps la perte, plus dure sera la chute pour ceux déjà en difficulté de trésorerie avant le confinement.

Ateliers en chantier

Stockage des EPI (masques, visières, gants), panneaux en plexiglass pour l'accueil, zones de circulation visualisées au sol, paniers de dépose pour les clés ou encore virucide pour nettoyer le véhicule avant et après l'intervention, réorganisation du temps de travail des équipes… C'est le grand chantier dans les ateliers pour ouvrir en toute sécurité ! IRP Auto a d'ailleurs sorti un guide de bonnes pratiques avec toutes les mesures de prévention, plan de continuité et mise à jour du document unique des risques pros. Un protocole sanitaire « coûteux et synonyme de perte de productivité », préviennent les fédérations qui demandent des coûts « plafonnés ». Car ce chantier n'est pas une option : la responsabilité morale et juridique du chef d'entreprise est engagée si un salarié tombe malade. Pour en savoir plus : Vers une responsabilité de moyens pour les patrons

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Lire l'intégralité du dernier Zepros Auto : Tenue de combat

Lire l'intégralité du dernier Zepros Carrosserie : Bienvenue sur une autre planète

Muriel Blancheton
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