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Un expert condamné en appel pour mésusage de son "rôle économique"

Romain Thirion
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Après une première décision à son encontre, un expert de la région lyonnaise a été condamné en appel, en novembre dernier, à indemniser un carrossier lésé par les arbitrages exercés dans le cadre de son "rôle économique".

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Application unilatérale de remise en pied de facture, non-respect des tarifs et non-règlement de la TVA, refus injustifié de prise en charge de compléments de travaux, refus d’un règlement amiable de la situation… Tels sont les manquements dont un expert de la région lyonnaise, à de multiples reprises, s’était rendu coupable dans son exercice du contradictoire avec un réparateur adhérent Mobilians et pour lesquels il avait été condamné en première instance, le 8 avril 2019. Interjetant appel, l’expert a vu la Cour d’appel de Lyon confirmer la décision des juges du Tribunal de commerce le 17 novembre 2022. 

A l’origine du litige, le carrossier reprochait à l’expert de lui avoir imposé des remises applicables au réseau des réparateurs conventionnés de son secteur géographique, alors que lui-même n’est pas agréé. Une forme d’entente tarifaire instrumentalisée sur le dos des réparateurs "libres", contraire à l’article L. 410-2 alinéa 1 du Code de commerce. En outre, l’expert n’avait pas pris en compte certains tarifs du réparateur, notamment ceux de géométrie. Et refusé de lui régler le prix des pièces et le coût de la main d’œuvre, en dépit de la contestation répétée du carrossier et en contradiction avec l’article 5 de la "Charte de bonnes pratiques experts-réparateurs".

Le principe d’indépendance de l’expert questionné

En ce qui concerne les fameuses remises de pied de facture, l’expert les justifiait dans les cas d’autoréparation par le fait que le réparateur ne peut prétendre être indemnisé pour les réparations faites sur ses propres véhicules et qu’il ne doit pas en tirer profit. Or, dans le jugement initial de 2019, le tribunal de commerce de Lyon relevait qu’il n’existait pas de convention écrite ou au titre de la police d’assurance garage concernant la facturation sans profit de l’autoréparation.

Ces multiples arbitrages au détriment du réparateur ont conduit les juges d’appel à reconnaître une difficulté quant à l’indépendance présupposée de l’expertise, la cour d’appel constatant que l’expert expliquait ses agissements du fait de directives de l’assureur, notamment concernant les remises exigées au réparateur, sans pouvoir toutefois démontrer de demandes de leur part de procéder de la sorte systématiquement. La Cour a ainsi relevé que la position de la société d’expertise « ne peut que poser difficulté puisqu'elle remet en cause le principe d'indépendance de l'expert par rapport à l'assureur ».

Le libre choix rappelé comme droit et non comme instrument

Au bout du compte, les juges ont donc condamné l’expert à payer au carrossier lésé plus de 9 000 € au titre des pertes financières et près de 3 000 € pour le temps perdu à la gestion administrative des dossiers de réparation. Tout en y ajoutant une indemnisation du préjudice commercial, demande que les premiers juges avaient d’abord rejetée. Mais ce n’est pas tout ! Car le carrossier, élu régional au sein de Mobilians, a pu prouver que l’expert avait fait preuve de rétention de nouveaux travaux de réparation sur les véhicules assurés par des compagnies le missionnant.

Ce faisant, la Cour a toutefois rappelé que le principe du libre choix des prestataires dans le cadre du commerce « ne saurait […] garantir de manière certaine [au réparateur] un chiffre d'affaires en provenance des différents assureurs avec lesquels [il] travaillait auparavant ». Ce qui n’a pas empêché les juges de condamner, en sus, l’expert à indemniser la perte de chance du carrossier, statuée à 20% de la somme initialement demandée, originellement de plus de 11 500 €. Par ailleurs, le cabinet d’expertise a été aussi condamné à régler les frais de procédure et à verser au réparateur la somme de 5 000 € pour les frais d’avocat, en plus des montants de la première instance.

Romain Thirion
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