Christophe Bourroux, RTL : les garagistes déclarés d'utilité publique

Image

Christophe Bourroux, c’est le monsieur Auto de RTL. Présentateur de l‘émission Autoradio depuis 17 ans, il traite tous les sujets de ce monde qui « bouge à une vitesse de dingue ». Parmi ses auditeurs fidèles : les garagistes qui connaissent le marché comme personne et qu’il considère « d’utilité publique ».

Vous avez lancé une série de podcasts à succès cet été baptisée Chassés-Croisés qui sentait bon la nostalgie auto des départs en vacances. Et pour vous, quel est votre souvenir des transhumances estivales ?

Christophe Bourroux : La 404 Peugeot, la voiture de mon père couleur bordeaux. Je nous vois encore ma sœur, le chien… et moi sur les genoux de ma mère à l’avant… À l’époque, la sécurité, c’était pas le sujet principal ! Mon père notait tout sur un carnet. Le plein à tel kilométrage, tous les entretiens… il a presque fait le tour du compteur avec cette voiture. L’auto c’est la madeleine de Proust sur roues. Les couleurs, les odeurs, les villes traversées… les pique-niques, les nationales…

Comment avez vous basculé dans le journalisme automobile ?

C.B. : Le salon de l’auto y est pour beaucoup. Je l’ai couvert pour RTL et j’ai trouvé ça génial. Comme au même moment Jacques Chirac faisait de la sécurité routière sa priorité, j’ai proposé à la rédaction de suivre l’auto de façon très large et très grand public… Des essais de nouveaux modèles, à l’entretien en passant par le futur de l’automobile, les accidents de la route ou le volet économique de l’industrie auto. Et je suis très fier car RTL reste sur ce sujet : on aime ou n’aime pas l’auto, mais ce sujet est toujours passionnel.

Quelles sont vos relations avec les garagistes ?

C.B. : Nous sommes très écoutés dans les ateliers. Ce sont des auditeurs fidèles et je reçois beaucoup de courriers de garagistes. D’ailleurs je m’efforce de toujours leur répondre.

Image

Quel type de courrier ?

C.B. : C’est très intéressant car ils s’appuient toujours sur des expériences vécues qu’ils me proposent de partager à l’antenne. Par exemple, l’un m’écrit : vous avez parlé de l’E85, j’arrête pas d’en installer, venez me voir dans mon atelier. Il faudrait que vous parliez de tel ou tel sujet. Je m’en sers bien sûr, car c’est le retour terrain. Les garagistes sont au contact de la réparation et de la réalité du parc automobile et des desiderata des automobilistes. Par ailleurs, ils adorent partager les restaurations de voitures anciennes.

Comment jugez-vous le monde automobile actuel ?

C.B. : Ce que nous préparent les équipementiers est passionnant. Plein d’innovations vont arriver très vite… Les évolutions dans l’auto se font à une vitesse de dingue !

Passionnant mais inquiétant pour les garagistes ?

C.B. : Non, car je trouve qu’ils s’adaptent bien, même si les investissements sont lourds. Ils doivent jongler entre deux époques de voitures, sans compter ce qui va arriver. Et cette adaptation est une bonne chose car on a besoin des garagistes. Ils sont d’utilité publique. D’ailleurs, on l’a vu pendant le Covid. En province, sans sa voiture, on ne travaille plus. Déjà qu’on a plus de stations-service… Sans garage, ce serait la mort ! Sans compter que plein de gens n’ont pas envie d’aller dans de grandes structures et préfèrent zapper des réparations faute de garages de proximité.

Que pensez-vous de l’image des garagistes ?

C.B. : Elle change … Le consommateur qui n’y connaît rien en mécanique n’osait pas aller voir le garagiste de peur d’une terrible ardoise, alors que souvent ce n’est pas le cas et les prix sont maintenant packagés. La chance des garagistes, finalement, c’est Internet qui permet de comparer ou même d’acheter et de faire monter par son garage. Le consommateur est rassuré et profite de la proximité. Je vois mon père qui, à 93 ans, a trouvé un pare-brise à 80 € dans une casse et se l’a fait remplacer par son garagiste à un horaire décalé qui l’arrangeait.

À titre personnel, quel modèle de voiture vous a marqué ?

C.B. : L’Alpine m’a marqué car elle est à la fois moderne, très agréable à conduire, mais vous conduisez aussi l’histoire de la France. Je ne dis pas ça par flatterie quelconque mais parce que j’ai vraiment craqué pour cette voiture. Et puis la Tesla… Vous savez, mes enfants se fichent totalement des voitures mais pas de la Tesla. Cette marque s’est fait un nom dans le monde en très peu de temps en mettant un grand coup de pied dans la fourmilière. C’est hallucinant !

À vous écouter, on a l’impression de vivre une grande époque de l’automobile

C.B. : Oui, ce sont des moments de rupture mais qui répondent à l’attente des gens. On n’est pas seulement dans le prototype futuriste sans intérêt. Regardez le lancement de l’Ami de Citroën… elle fait hurler certains mais en même temps je trouve normal que les constructeurs s’intéressent au marché de la voiture sans permis. C’est même étonnant qu’ils ne s’y soient pas mis plus tôt !

Quel sont les essais autos qui vous ont le plus impressionné ?

C.B. : Sans hésitation : mon premier essai en voiture autonome. Sur circuit avec Audi en Espagne. C’était complètement dingue. Il y avait un conducteur mais il avait les bras croisés. On avait l’impression qu’un fantôme conduisait et en plus, le temps réalisé était très proche de celui réalisé par un pilote expérimenté. Fallait voir ça ! Dans les courbes serrées… vous aviez l’impression que l’homme invisible pilotait. Je me souviens aussi d’un test avec Valeo sur le périphérique parisien où on lâchait le volant et la voiture circulait toute seule. Ce sont de vraies révolutions ! C’est comme marcher sur la lune ! C’est fou !

Pierre Dieuzede