Autodistribution : nouveau patron, nouvelle stratégie

Jean-Marc Pierret
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Olivier Roux

6 mois après son arrivée à la tête de l’Autodistribution, Olivier Roux a présenté les orientations mises en place par le nouvel actionnaire TowerBrook. Au programme : revisite de la logistique, de la relation filiales/indépendants, de l’organisation des métiers VL, PL et carrosserie sur fond de réorganisation des achats.

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Contraste... Olivier Roux, le nouveau patron de l’AD, est un homme posé à l’évidente culture anglo-saxonne. Rien à voir donc avec la flamboyance conquérante de son prédécesseur Alain Redheuil.

Mais aussi forte soit-elle, la différence de ton et de forme chez cet homme encore méconnu du marché français ne doit pas occulter le fond : O. Roux connaît la pièce et la distribution. Il cumule un passé d’équipementier 1ère monte et une expérience réussie à la tête du groupe de distribution italien Rhiag (460 millions d’Euros et une présence consolidée dans plusieurs pays d’Europe).

Droit d’inventaire

S’il n’est pas du sérail franco-français, c’est donc bel et bien en homme du métier qu’Olivier Roux faisait sa première sortie médiatique le 18 novembre dernier. Avec une feuille de route très dense annonçant une régionalisation reconsidérée, un rééquilibrage de la représentativité filiales/distributeurs indépendants, une logistique repensée, une place réétudiée des fournisseurs, une réorganisation de pôles VL, PL et carrosserie et un nouveau statut pour Isotech (MDD).

Les chantiers ouverts par la nouvelle et discrète équipe dirigeante de l’AD sont déjà nombreux. Et en traçant les grandes lignes de sa nouvelle stratégie, Olivier Roux n’hésite d’ailleurs pas à faire valoir son «droit d’inventaire». Une façon d’imposer sa «patte» ? Sûrement. Mais pas seulement. Si pour lui, tout n’était pas bon dans l’Autodistribution façon Investcorp et s’il le dit aussi clairement, C’est bien sûr parce qu’il en est convaincu. Mais l’homme est assez fin pour savoir qu’en même temps, la franchise du discours devant la presse va achever de convaincre l’amont des fournisseurs comme l’aval des distributeurs-adhérents que les temps ont peut-être bien changé. Pas question de perdre de l’énergie là où ce n’est pas utile : on fait donc une bonne fois pour toutes sauter les grands motifs de crispation, au risque de prendre l’interne ou l’externe à contrepied…

Evacuer les tensions

On panse donc les plaies en repensant par exemple tout le schéma logistique. Ainsi passe définitivement à la trappe la stratégie des 9 plateformes régionales imaginée en son temps par Investcorp et qui avait tant défrayé la chronique début 2008: «Il faut optimiser la disponibilité des pièces, c’est évident», explique-t-il ; mais la stratégie initiale de plateformes «doit être totalement redéfinie. Chaque région a ses spécificités, ses exigences qui demandent des réflexions et des stratégies dédiées. S’il est évident que le J+1 à partir de plateformes nationales doit être poursuivi et affiné, le H+4 (deux livraisons par jour) est un sujet plus délicat»….

La logistique sera donc conçue «en complémentarité et non en substitution de l’existant». Difficile sinon «d’expliquer cela à des fournisseurs qui ont déjà un tissu logistique». Et pour faire oublier les mauvais souvenirs de ces derniers, Olivier Roux leur promet qu’ils seront dorénavant associés à la réflexion «même si l’Autodistribution n’avait pas l‘habitude de travailler avec eux sur ce sujet».

En ligne de mire : une approche plus large de la «supply chain» qui doit selon lui intégrer des «paramètres incroyablement complexes» pour arriver à «faire mieux avec moins de stock et atteindre un taux de service tel que l’on puisse dire oui sans souffrir de coûts de dépannage». Un nouveau système d’information viendra soutenir ces objectifs.

Gouvernance rééquilibrée

Même volonté d’apaisement vers les distributeurs indépendants adhérents de la centrale. Ces derniers apprécient déjà que soit définitivement évacuée la potentielle concurrence des plateformes ancienne version. Mais l’essentiel n’est pas là. Eux qui se disaient souvent négligés au profit d’une priorité donnée aux filiales ont reçu un autre message clair : la «gouvernance» de l’AD a été revue. Elle aboutit à un savant rééquilibrage du poids des indépendants dans les diverses commissions qui valident les stratégies.

Un bonheur n’arrivant jamais seul, une meilleure rémunération récompensera leur meilleure adhésion au plan de marche. Et s’ils le souhaitent, ils sont dorénavant actionnaires à environ 5% du capital de l’entreprise. Comme au bon vieux temps. En retour, Olivier Roux attend un travail plus étroit entre les filiales et les distributeurs indépendants, «gage d’une meilleure efficience commerciale».

Fonctions et métiers redéfinies

Cette efficience devrait être soutenue par la poursuite des efforts de professionnalisation des métiers historiques de l’AD que sont le VL et le PL, avec une impulsion renforçant les compétences de leurs enseignes de réparateurs. Quant au troisième métier de la carrosserie, Cora ajoute l’importante activité connexe de la peinture à sa gamme de pièces.

Ainsi redéfinies en pôles distincts, les trois activités sont dorénavant servies par une centrale d’achat renforcée gérant la logistique, les complexes subtilités de la LME et les fournisseurs stratégiques.

7 ans de «réfection»

On l’aura compris : depuis 8 mois, l’AD a commencé sa Nième mue. Mais forte cette fois d’un atout qui lui manquait cruellement depuis de longues années et qu’Olivier Roux sait déterminant : l’annulation de sa dette colossale (plus de 700 millions d’euros) habilement négociée lors de sa reprise par TowerBrook.

Ce n’est pas pour ça qu’il faut s’emballer, tempère Olivier Roux. «L’Autodistribution est une société à potentiel sur un secteur porteur… si vous êtes patient». Le temps des LBO et des investisseurs successifs est donc apparemment révolu : «les actionnaires actuels savent que l'attente d'une plus-value rapide n'est pas compatible et ils l’acceptent», affirme-t-il en prévoyant un plan de 5 à 7 ans. «Il y a plein de marges de progrès, même si, avec un recul de seulement 5,4% de son chiffre d’affaires sur les 9 premiers mois de 2009, l’Autodistribution se porte plutôt bien dans un contexte de recul du marché de l’après-vente».

Et après ? Une revente à un acteur du secteur, une introduction en Bourse ? Pour Olivier Roux, l’heure n’est pas aux conjectures mais à la reconstruction. Tout ce qu’il concède, c’est que c’est effectivement en s’organisant «comme si nous devions revendre ou entrer en Bourse à terme» que l’Autodistribution va évoluer…

Jean-Marc Pierret
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