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EXCLUSIF – L’ANEA accuse le CNPA de vouloir «se débarrasser des experts» !

Romain Thirion
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Outrée par la dernière action du CNPA sur le front de la loi “Macron”, en particulier des trois amendements supportés par le CNPA devant les parlementaires des deux Chambres, l'ANEA vient de solliciter un rendez-vous avec Francis Bartholomé, président national de l’organisation professionnelle. Car elle ne tolère pas ce qu’elle voit comme une volonté manifeste de disqualifier l’expert des relations réparateur-assuré.
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Une info venue de nos lecteurs-correspondants!L’accusation paraît énorme… mais c’est bien en ces termes que l’Alliance nationale des experts en automobile (ANEA) s’est adressée à ses adhérents, dans sa lettre datée du 8 juin, pour s’insurger de la teneur des amendements récemment suggérés par le CNPA aux parlementaires. Il y a deux semaines, nous vous relayions le détail de cette action. Et nous supposions alors que les premiers à brandir la hache de guerre seraient les assureurs… Que nous trompions-nous puisque ce sont… les experts, en tout cas leur principale fédération professionnelle, qui a crié au loup. A leur seule initiative ? Espérons-le…En effet, dans la lettre que nous reproduisons ci-dessus, et que vous pouvez télécharger, l’ANEA accuse tout bonnement le CNPA de vouloir «se débarrasser des experts» ! Petit rappel des faits, par l'ANEA elle-même : «voilà maintenant que le CNPA, en se drapant du libre choix du réparateur, s’en prend à l’expertise automobile ; et cherche à convaincre des parlementaires à l’occasion de la discussion de la loi Macron, en faisant des propositions visant à se débarrasser des experts dans les ateliers. Une offensive relayée ces derniers jours par voie de presse et directement auprès de ses adhérents carrossiers, via la newsletter de la branche.»
Une double-lame qui rase l’ANEA…
Décidément, l'ANEA ne digère pas les deux premiers amendements soutenus par le CNPA. Le premier, qui proposait que l’article L. 211-5-1 du Code des Assurances soit complété de l’alinéa suivant : «La prise en charge des frais de réparation par l’assurance ne peut donner lieu à aucun surcoût pour le sinistré, quel que soit le réparateur choisi». Et le second, soutenu par le CNPA dans l’hypothèse où le premier ne serait pas adopté, censé compléter l’article L. 326-6 du Code de la route en les termes qui suivent…«Lors d’un sinistre sur un véhicule, le recours à un expert automobile est du seul recours du propriétaire du véhicule sinistré. Aucun mandat ne peut être confié à un tiers, personne morale ou physique. Le propriétaire  choisit  librement son expert, parmi la liste nationale des experts automobile, publiée par le ministère des Transports. En  cas  de  désaccord  portant  sur  les  conclusions  techniques ou sur le coût des réparations, entre l’expert et le réparateur, choisi librement par l’automobiliste ayant subi un dommage sur son véhicule en vertu de l’article L. 211-5-1, le réparateur a la faculté de mandater.»
Différentes causes, mêmes effets ?
Pour l’ANEA, l’effet de ces deux amendements, présentés par le CNPA comme la solution de repli l’un de l’autre, serait rigoureusement le même : «exclure l’expertise». Et celle-ci d’expliquer comment elle en vient à cette conclusion. «Premier amendement suggéré : si la loi oblige l’assureur à  prendre en charge les surcoûts, c’est-à-dire les différences entre l’évaluation des dommages et la facture du réparateur lorsque les deux professionnels sont en désaccord, l’expertise perdrait de facto son utilité. Le CNPA ne fait ici aucune différence entre les surcoûts motivés techniquement ou économiquement.»Avec ce seul argument, l'ANEA confirme au moins une chose : qu’elle voit le métier d’expert comme un garant du… non-dépassement des “justes prix” ! Mais quels “justes prix”, au juste, ceux prônés par les donneurs d’ordres ? Ou ceux évalués à coups d’outils de chiffrage proposés par ces mêmes donneurs d’ordres ? Et si le surcoût «motivé techniquement» était purement et simplement de l’ordre de la sécurité routière, de laquelle les experts sont censés être les garants ? Faudrait-il en épargner l’assureur et le faire peser sur l’assuré ou sur le professionnel ?Il est étrange de voir l'ANEA se lever brusquement dès que le “rôle économique” de l’expert et le sacro-saint lien qui lient une majorité d’experts aux assureurs, sont menacés par de simples propositions d’amendement quand aucune action de la part de l’Alliance n’a été relevée pour soutenir ce qui apparaissait comme des amendements libérateurs pour la profession, dont nous avions évoqué la teneur il y a un mois (voir « Loi «Macron» : ces amendements oubliés qui pouvaient libérer en partie l’expert… »). Des amendements qui n’ont finalement pas été retenus, faute de soutien. Mais où était donc l’ANEA, alors ?
Cordon ombilical rompu…
Eh bien l'ANEA, cette fois face aux amendements proposés par le CNPA, s’insurge ! «Deuxième amendement suggéré : l’effet serait encore plus radical puisqu’il s’agit d’interdire à l’assureur de travailler avec un expert pour évaluer un dommage !» s’exclame l'ANEA ! Si la tentation est sûrement grande du côté des réparateurs de voir le mandatement de l’expert uniquement entre les mains du client final, c’est-à-dire l’assuré, propriétaire du véhicule ET des droits à indemnisation en cas de sinistre, force est de constater que nombre d’experts y sont aussi favorables. Il suffit de lire les commentaires de nos articles sur l’expertise pour s’en rendre compte : très souvent, des experts indépendants, libres de tout “agrément” avec les assureurs, y viennent clamer leur désir de voir un “libre choix de l’expert” avec dans les mains du seul assuré le pouvoir de mandater un expert.Ce que l'ANEA craint donc, derrière la “menace” de cet amendement, c’est la rupture du cordon ombilical que représentent aujourd’hui les conventions que passent les assureurs avec bon nombre de ses adhérents et qui font vivre (voire survivre…) bon nombre de cabinets libéraux. Pourtant, le mandatement de l’expert par l’assuré rééquilibrerait sans doute le marché de l’expertise automobile, en répartissant mieux le volume de travail entre les cabinets. Fini les gros cabinets gourmands se repaissant des maigres restes que daignent laisser les donneurs d’ordres aux plus petits !
L'ANEA montre les crocs
Mais ça n’est visiblement pas la vision de l'ANEA, laquelle ne peut pourtant nier qu’un savant ménage a été effectué ces dernières années par plusieurs compagnies d’assurance –et plateformes de gestions de sinistres– dans les rangs de “leurs” experts. Pour l'ANEA, l’action du CNPA est tout bonnement inadmissible et celle-ci accuse tout simplement le CNPA de ne pas être sincère dans ses relations avec elle.«Sur la forme : l'ANEA a jusqu’à présent  toujours été un partenaire loyal du CNPA et l’inverse ne se vérifie pas. Nous avons ainsi découvert  avec étonnement ces initiatives faites à notre insu et même lu dans la presse dans la bouche de son Président, Francis Bartholomé, que le CNPA conteste le rôle économique de l’expert, alors que ce même CNPA, pour être plus précis la branche ''carrosserie'', discute avec l'ANEA des critères de comparaison qui pourraient être mis en place pour que l’expert puisse apprécier objectivement le coût de la main d’œuvre dans les ateliers», affirme ainsi l’Alliance.
Ce si mal intentionné CNPA…
«Sur le fond : le CNPA attaque directement nos cabinets en voulant par ce biais qu’ils perdent subitement leur clientèle sous le prétexte que la profession doit reprendre son autonomie vis-à-vis des assureurs. Cette ingérence dans les affaires de la profession est proprement intolérable. Il n’appartient pas au CNPA de mener des actions au nom des experts en automobile en lieu et place des experts, que celles-ci visent ou non à préserver leur indépendance», ajoute l'ANEA.Face à ces amendements qui concernent trop la profession d’expert pour être soutenus par une organisation qui ne les représente pas, à savoir le CNPA, l’Alliance précise tout de même, comme si ses adhérents –et tous les experts au passage– en doutaient, qu’elle n’a «aucunement donné mandat au CNPA pour agir au nom de notre profession». Et d’ajouter que «cette absence totale de légitimité n’a d’ailleurs pas échappé aux parlementaires approchés puisqu’aucun à ce jour n’a accepté de déposer ces amendements insensés proposés par le CNPA».Pourtant, par bien des aspects, les experts en automobile voient parfois leurs intérêts, ceux de professionnels libéraux garants du respect des conditions de sécurité routière des véhicules, promus par d’autres fédérations que l'ANEA. Quand cette même ANEA ne paraît même pas soutenir les éventuelles avancées que pourrait connaître le métier d’expert, au moins sur le plan de la loi.
Romain Thirion
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