
Dialogue stratégique à Bruxelles : qui va ployer le genou ?

Encore un exercice d’équilibriste pour la présidente de la Commission européenne ce vendredi 12 septembre. Cette fois, face aux constructeurs et tout en ne fléchissant pas le genou sur les objectifs climatiques fixés, Ursula von der Leyen ouvre un « dialogue stratégique » tournés vers des industriels de l’automobile plaidant tous pour ralentir le calendrier politique autour de la fin du moteur thermique en 2035.
Revoir le plan de route fixé à 2035 pour cesser la production de moteurs thermiques, adoucir la règle sur les émissions de CO2 des hybrides, autoriser le Range Extender après 2035…autant de sujets abordés ce vendredi 12 septembre à Bruxelles. Autour de la table, Ursula von der Leyen, les constructeurs et leurs fédérations ainsi que les équipementiers…Dans ce « dialogue stratégique », déjà expérimenté dans d’autres secteurs, la présidente de la commission européenne, pourrait avancer des pions rassurant l’industrie automobile prête par ailleurs à s’engager pour aider l’UE à atteindre le zéro carbone d’ici 2050. Reste à accepter les modalités et la feuille de route, jugée trop rapide et contraignante dans un contexte de ventes de modèles électriques en berne. Pour rappel, la part de marché des véhicules 100% électriques ne dépasse pas 15 % (9 % pour les utilitaires et 3,5 % en PL).
Alléger la règle pour les hybrides rechargeables ?
Premier pas de la présidente vers les constructeurs, avec un desserrement du mode de calcul des émissions des voitures hybrides rechargeables (9 % des immatriculations en Europe). Un cadeau pour les Allemands Mercedes, BMW et Volkswagen, gros faiseurs en la matière, lit-on dans Les Échos. Les PHEV passaient jusqu’alors entre les gouttes de la réglementation sur leurs émissions de CO2, considérés comme moins polluant (28g/ km) du fait de leur moteur électrique comme énergie principale. Jusqu’à ce que l’étude de l’ONG Transport & Environnement sur 127 000 véhicules en 2023, démontre que les batteries électriques ne sont sollicitées que 26 % du temps avec des émissions réelles de CO2 grimpant à 139g/km. Le moteur thermique prend en effet majoritairement le pas. Normalement, la commission doit inclure les nouveaux PHEV dans la réglementation en 2025, puis les anciens modèles en 2027. A voir si la présidente reviendra sur cette décision.
Une clause avancée
Deuxième pion que pourrait avancer Ursula von der Leyen sur la mise en place de crédits CO 2 supplémentaires pour doper les ventes de citadines électriques, demande poussée par les constructeurs Français. La « clause de revoyure », prévue en 2026 pour débattre sur l’interdiction de la vente de thermiques neuves à l’horizon 2035 pourrait être avancer. Enfin, le Range Extender permettant d’avoir un moteur 100 % électrique complété d’une dynamo thermique pourrait être encore autorisé dans 10 ans…Autant de sujets piquants pour chaque corporation qui va jouer sa partie, sachant qu’il n’est pas question de revenir sur l’interdiction du thermique dans dix ans, mais de permettre de la souplesse dans le calendrier pour soulager les industriels.
Lettre à la présidente...
Ces derniers indiquent dans une lettre adressée fin aout à la présidente de la commission la révision des objectifs CO2 et l’intégration de la neutralité technologique afin d’inclure l’hydrogène et les prolongateurs d’autonomie dans le scope. « Les véhicules électriques seront les moteurs de la transition, mais il faut également laisser une place aux hybrides (rechargeables), aux prolongateurs d'autonomie, aux véhicules à moteur thermique à haute efficacité énergétique (MCI), à l'hydrogène et aux carburants décarbonés ». L’occasion pour les signataires de cette lettre (ACEA et Clepa) anticipant le rendez-vous du 12 septembre de rappeler que dans un contexte mondial et une Europe dépendante de l’Asie pour le sourcing des batteries, que l’UE « réglemente la fourniture de véhicules neufs aux constructeurs, mais ne parvient pas à créer les conditions nécessaires à cette transition. L'Europe est confrontée à une répartition inégale des infrastructures de recharge, à des coûts de fabrication plus élevés, notamment pour l'électricité, et à des droits de douane exorbitants imposés par ses principaux partenaires commerciaux, comme les droits de douane de 15 % sur les exportations de véhicules de l'UE vers les États-Unis. On nous demande de nous transformer les mains liées ».
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