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Luc Chatel (PFA) : « Évitons d’ajouter une crise à la crise »

Muriel Blancheton
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Luc Chatel

Pour le président de la Plateforme Automobile, il ne faut plus opposer les décisions unilatérales de l’Europe avec les besoins concrets de la filière automobile. Le temps politique et le temps industriel doivent se retrouver sur le chemin de l’électrification. Il est donc urgent de penser collectif, martèle Luc Chatel.

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« La décarbonation n’est pas une option car la bataille du climat doit être gagnée, et c’est bien tout l’enjeu de l’industrie automobile : rendre accessible au plus grand nombre une mobilité décarbonée. Sauf que ce défi gigantesque peut être ravageur pour l’ensemble de la filière », a lancé Luc Chatel à l’ouverture du Paris Automotive Summit ce 15 octobre. 
Dans son viseur, le président de la PFA tire à bout portant les « technocrates de Bruxelles » qui ont imposé le virage électrique – depuis le Diesel Gate en 2015, faut-il le rappeler - sans tenir compte du juge de paix que demeure le consommateur. Un constat qui change la donne et toutes les projections établies. « Quoi de pire qu’une filière ayant investi massivement pour sa transition, des constructeurs ayant renouvelé tous leurs modèles… mais sans clients pour acheter les véhicules ? », demande Luc Chatel, s’appuyant sur des chiffres européens en berne depuis quelques temps, il est vrai, mettant en relief une part de marché à moins de 12 % au global, quand la norme CAFE imposera 25 % en 2025. « En quatre années, la France a perdu une année de ventes VN avec un marché à 23 % inférieur vs 2019. Ce mois de septembre 2024 a été le pire jamais connu depuis 20 ans en termes de vente ! », indique-t-il, observant une production en baisse de 15 % vs 2019 quand la Chine annonce + 10 %. « La France ne devrait pas excéder 1,5 million cette année. Nous sommes une industrie de volume et ce niveau d’activité bas à des conséquences désastreuses pour ses acteurs, constructeurs et fournisseurs. » 

Un malus, une double peine

Pour le président de la Plateforme Automobile, il faut à tout prix éviter d’ajouter « une crise à la crise », pointant du doigt l’amende que risquent les constructeurs en 2025 du fait de leur retard sur les véhicules électriques. « Ubuesque », s’exclame Luc Chatel qui se demande si l’alternative passera par l’achat de quotas carbone aux Chinois, « soit une subvention directe à nos futurs concurrents ». Faudra-t-il importer davantage de véhicules chinois ? Diminuer le marché du thermique pour compenser les ventes perdues sur l’électrique ? « Suicidaire ! » pour le président qui estime cette situation inextricable, « alors qu’il faut stimuler la demande de véhicules électriques et refaire un tour de table dans le cadre de la clause de revoyure. Mais le pire n’est jamais certain avec les technocrates ingénieux. La preuve avec le risque d’être taxés car nous vendons encore des thermiques. Surréaliste, ce projet de malus prévoyant qu’un véhicule thermique sur deux sera malussé dès 2025, et 80 % d’ici trois ans. » Un impôt déguisé selon Luc Chatel et la double peine pour l’industrie automobile. 

Un contrat stratégique européen

Autre sujet, celui de la compétitivité française, loin derrière les États-Unis ou la Chine, car alourdie par le coût de l’énergie notamment mais aussi le coût du travail, avec un différentiel de 40 % entre une usine espagnole et française. « Nous devons pérenniser le CIR (Crédit Impôt Recherche), le Coram (fonds pour la R&D dans l’automobile) pour maintenir les dépenses d’innovations. Nous devons harmoniser les subventions intra-communautaires pour que la France soit aussi attractive que l’Europe Centrale ! », indique le président. 
Dernier dossier en date, la marche supplémentaire à donner au contrat stratégique de filière français en le faisant évoluer au niveau européen. « Depuis 2018, il a permis de multiplier par dix la part de marché du VE sur le territoire, et ce contrat est réengagé depuis le printemps dernier, mais un contrat similaire est essentiel en Europe car il faut contractualiser plutôt que réglementer, innover et accompagner les salariés et les entreprises dans leurs mutations », souligne Luc Chatel, pour qui seul un fonds européen peut soutenir ces causes. 
« La tentation est grande de penser que l’on avance seul. Ce n’est pas ma vision. La filière a besoin de se retrouver et de penser collectif. Dans ce virage technologique, elle a besoin de soutiens et de visions à long terme… sinon elle risque de perdre le combat. »

Muriel Blancheton
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