Image
ZAA
Image
mobile

C. Dupont-Roc (C-Ways) : « La filière doit raisonner en écosystème »

, mis à jour le 17/07/2025 à 10h29
Image
PRZP 19 PP ANALYSE C WAYS

Quels impacts peut-on craindre d’une situation géopolitique mondiale aussi instable sur l’industrie et la distribution de pièce en Europe ? Dans cet environnement économique bruyant, il faut se savoir se concentrer sur les tendances de fond, rappelle le cabinet conseil C-Ways. 

Partager sur

Et la plus importante d’entre-elle est clairement cette fragmentation faisant apparaître trois blocs en repli que sont l’Asie, l’Amérique et l’Europe. Un rehaussement général des barrières commerciales, accéléré par la politique aussi brutale qu’explosive du président américain Donald Trump dans sa course à la réindustrialisation du pays. Ce dernier veut rapatrier de la valeur et freiner le déficit commercial, quoi qu’il en coute aux autres. Mais qui gagne ou perd avec des barrières douanières ? « Personne ! », observe Clément Dupont-Roc. D’après le directeur de la stratégie de C-Ways, en fermant ses importations, chaque pays réaffecte des ressources qu’il n’a plus, et encore moins aux conditions négociées en Asie. « Les Américains vont devoir fabriquer des gros volumes de petites pièces automobiles avec une main d’œuvre nettement plus couteuse. Pire, cette réalité va également prévaloir en Europe où 28 pays, tous déjà en concurrence, vont s’affronter encore plus durement. Personne ne peut rattraper les 30% d’écart de de compétitivité qu’a installé la Chine », indique le directeur. Cette compétition intra-européenne – en incluant la Turquie et le Maroc – va s’exacerber sur les chaînes de production de véhicules électriques puisqu’elles nécessitent largement moins de ressources humaines que les autres. Un bon moyen de diminuer les couts pour les constructeurs car les écarts de compétitivité entre les états membres varient de 5 à 10%. « Seul le modèle d’écosystème imaginé par Toyota lorsqu’il est venu en France en 2000 pour fabriquer la Yaris permettrait de combler ce gap. La sécurisation des fournisseurs donc pas de mise en concurrence, la formation permanente, du Kaizen et des Investissements en continu… Cette piste a démontré sa pertinence compétitive depuis 25 ans, jusqu’à être plus compétitive qu’en Tchéquie ! »

L’arsenal européen existe

Deux ans après sa publication, le rapport Draghi est brandi comme la réponse technique à une situation économique européenne structurellement en perte de vitesse. Le rapport souligne combien il faut identifier les nouveaux business et créer des filières dédiées, comme la fabrication des batteries électriques. Une arme fatale, à défaut d’être consensuelle car le rapport sous-entend une réponse politique et fiscale commune dirigée vers la Chine. Pour l’instant, l’Allemagne freine des deux pieds sur ce terrain car elle est encore bénéficiaire de volumes commerciaux conséquents réalisés avec les Chinois. « Mais pour combien de temps encore ? », ajoute Clément Dupont-Roc. Cette solution technique s’ajoute à la proposition faite par les équipementiers de première monte d’un contenu local européen dans les usines d’Europe. Ces derniers exigent un sourcing à minima de 80% du véhicule sur le territoire, comme un filet de protection pour ces fournisseurs s’estimant au bord du gouffre (lire page 17). Schizophrénique pour leurs donneurs d’ordre dont certains ont fait de la Chine leur principale source d’approvisionnement en matières premières, en R&D, en technologie… du fait de coûts moindres dans ce pays massivement subventionné (à l’image de Renault). Face à une pièce coutant deux fois plus chère chez eux, le jeu est-il plié pour les européens ? « Les constructeurs savent qu’à moyen terme ils vont devoir changer de braquet et se ressourcer en Europe pour sauver l’industrie européenne, eux y compris. Le contenu local est le sens de l’histoire. Une voie qui permettra une meilleure stabilité et le reprise d’investissements en Europe et qui positionnera durablement l’industrie européenne face à la Chine. » 

Muriel, rédactrice en chef Zepros Auto, couvre l’après-vente, VO, équipementiers et suit les révolutions auto : électrification, digitalisation, IA. Elle pilote aussi les événements Zepros.
Partager sur

Inscrivez-vous gratuitement à nos newsletters

S'inscrire