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Revente de l’Autodistribution à Bain: le «non-événement» à 600 millions d’euros !

Jean-Marc Pierret

Commenter sans sortir des clous d'une communication ultra-balisée, tout en rassurant un marché et des collaborateurs toujours inquiets de voir une entreprise changer de mains, surtout pour celles d'un fonds d'investissement : c'est l'exercice imposé que vient de réussir Stéphane Antiglio, le patron de l'Autodistribution. Il a expliqué vendredi à la presse que finalement, le rachat du 1er groupement indépendant de distribution par l'un des fonds américains d'investissement les plus puissants, n'est somme toute qu'un «non-événement»...

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La reprise d'Autodistribution par Bain Capital ? «Un non-événement». Voilà très exactement ce que Stéphane Antiglio, le président d'Autodistribution, est venu principalement dire à la presse vendredi en fin d'après-midi, en ouverture comme en conclusion d'une réunion presse téléphonique calée entre de multiples exercices internes obligés en très peu de temps. Il fallait effectivement faire très vite : «des fuites» sont venu accélérer le calendrier de la revente.

«Un non-événement», donc : pourquoi appuyer ainsi sur cette déconcertante expression, alors qu'il s'agit là ni plus ni moins de la revente du leader de la rechange automobile indépendante en France pour la probable bagatelle de 600 à 650 millions d'euros ? tout simplement parce que, lors d'un changement d'actionnaire aussi important, il est crucial de maintenir et prolonger, avec le moins de turbulences possibles, le projet d'une entreprise et la mobilisation de ses collaborateurs.

Une revente logique...

Alors Stéphane Antiglio va dérouler tous les arguments qui peuvent endiguer les possibles contrecoups. La revente ? Elle ne doit pas surprendre ni inquiéter. Autodistribution, reprise par Towerbrook après les dures années 2008-2009 d'où elle sortait boiteuse et exsangue, est redevenue depuis une entreprise "bankable" sous l’impulsion de l'actionnaire. Il faut donc comprendre que ce dernier, qui n'a jamais eu vocation à rester indéfiniment propriétaire du groupement (voir «Autodistribution serait à vendre : quelle surprise ?»), a fini avec brio son boulot de redressement et de revalorisation. «De très malade à convalescente, puis de convalescente à entreprise en bonne santé, Autodistribution est redevenue regardable et fréquentable grâce à son leadership réaffirmé et ses projets reconnus», souligne-t-il.

Autres preuves qu'égraine Stéphane Antiglio pour convaincre d'une continuité annoncée ?  Tout d'abord, ce n'est pas Towerbrook qui a voulu vendre Autodistribution, précise-t-il en substance. C'est le marché qui a voulu l'acheter : «Il n'y a pas eu de process formel de mise en vente d'Autodistribution» ; plusieurs offres se sont spontanément présentées, confesse-t-il. Lesquelles ? Secret-défense. Mais là encore, Stéphane Antiglio veut bien faire comprendre qu'en situation optimale de choisir le repreneur, Towerbrook a voulu et pu sereinement sélectionner la meilleure option de stabilité et de croissance pérennes. Dans cette optique, qu'on se le dise et s'en convainc : «l'offre de Bain Capital nous a semblé la plus intéressante, motivée et déterminée».

A ceux qui pourraient douter encore que l'arrivée de Bain Capital est un bien pour l'entreprise, Stéphane Antiglio confirme que les éléments-clés de la réussite récente d'autodistribution demeureront en place. «L'état major reste le même, Olivier Roux reste le chairman, je reste le président, le comex (comité exécutif) reste le même et la fameuse “nouvelle gouvernance” est elle aussi maintenue et confirmée. Notre futur nouvel actionnaire l'a parfaitement compris et intégré : cette mixité au sein du groupement (NdlR : décisions discutées et partagées entre les actionnaires et les distributeurs-adhérents) reste un élément-clé de notre stratégie». Reconnaissons-le, l'argument est fort. Surtout quand les fonds d'investissement ont plutôt l'habitude de missionner leurs propres managements −et souvent sans ménagement− dès le lendemain d'une reprise. C'est d'ailleurs probablement ce maintient intégral de l'équipe dirigeante qui a participé à l'adhésion unanime du CE...

Ne pas jeter Bain avec l'eau trouble de Samsonite

Reste à traiter l'image désagréablement sulfureuse de ce nouvel actionnaire : Bain Capital est aussi l'entreprise que la presse et plusieurs procès désignaient comme le cynique responsable de la fermeture de l'usine Samsonite de Henin-Beaumont en 2007 et du licenciement sec de tous ses employés. Là encore, Autodistribution veut rassurer : «La caractéristique française est de ne voir que les trains qui n'arrivent pas à l'heure, répond S. Antiglio. Mais Bain a accompagné avec un grand succès énormément d'entreprises : plus de 300 dans le monde. Nous avons évidemment évoqué cette affaire Samsonite avec Bain Capital qui nous a expliqué que ces événements sont intervenus après qu'il ait cédé l'entreprise à un repreneur. Ce sont les malversations dudit repreneur qui ont abouti à la faillite de l'entreprise reprise. Chaque fois que la justice a mis Bain en cause, elle l'a lavé de tout soupçon."

Faut-il au moins craindre de voir le très mondial Bain Capital, qui gère quelque 75 milliards de dollars investis partout sur la planète, plus intéressé par l'internationalisation de l'Autodistribution que par sa dimension très majoritairement franco-française ? Là encore, Stéphane Antiglio vient rassurer : «Nous avons encore beaucoup à faire sur le marché français, même si nous n’excluons pas de regarder ce qui se passe à l'international. Clairement, nous serons très attentifs à procéder de façon mesurée et raisonnée dans nos futures acquisitions. Le premier objectif est de poursuivre notre croissance organique en France. Nous allons maintenir notre stratégie de réseau qui est un élément-clé de notre performance et notre développement.»

Et si le nouvel actionnaire voulait quand même faire une dure révolution financière dans sa nouvelle demeure ? Là encore, aucune raison : «L'entreprise est endettée à hauteur de 250 millions d'euros pour un chiffre d'affaires qui sera cette année de l'ordre de 1,2 milliards rassure Stéphane Antiglio qui rappelle qu'une entreprise en ordre de marche n'a de toute façon pas vocation à être totalement désendettée. «Ce sont des chiffres raisonnables par rapport à la taille du groupe et sa profitabilité de 3,8% en 2014. Et nous ferons encore mieux cette année», prédit-il.

D'accord, Towerbrook ne s'oublie pas dans l'opération : l'actionnaire va effectivement changer le plomb en or. Même si le patron ne veut pas préciser le montant de la transaction ni  s'attarder sur le sujet, les 120 millions initialement investis laisseront une belle marge en finalement peu de temps, d'autant qu'à l'occasion d'une récente levée de fond, l'actionnaire s'est déjà remboursé de 40 millions d'euros (voir «Étonnante Autodistribution… de dividendes !»). Mais là n'est pas l'essentiel, est-il venu préciser à la presse. Ce qu'il veut que l'on retienne, c'est que Towerbrook transmet à Bain Capital une belle pépite qu'il faut donc voir comme suffisamment pure et vertueuse pour que le repreneur n'ait rien à y révolutionner. Juste à en prolonger l'actuelle stratégie.

Bref, on l'aura compris : pas d'inquiétude. Rien que du bon à attendre de l'arrivée de Bain aux commandes de l'Autodistribution, aura réussi à expliquer un Stéphane Antiglio qui s'est parfaitement acquitté de son face à la presse. «Nous avons encore de belles pages à écrire dans le livre Autodistribution», conclut-il lyriquement. Et nous, donc, probablement autant d'occasions de les lire...

Jean-Marc Pierret
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