Pierre-Yves Jouan, de fil en aiguille pour un passionné de sellerie

Muriel Blancheton
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Ancien cadre de l’industrie automobile, Pierre-Yves Jouan est « tombé » par hasard dans la sellerie. Aujourd’hui, il est tombé amoureux de cet art qu’il transmet à d’autres. « Je refuse qu’un véhicule moyennement bien réalisé sorte de mon établissement », affirme Pierre-Yves Jouan.

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Ce sellier, formateur au Conservatoire National des Véhicules Anciens (CNVA), préfère reprendre son travail autant de fois que nécessaire pour assurer le meilleur niveau de qualité possible à sa production. Cette rigueur lui permet de progresser encore dans son art. Humble, il affirme qu’il faut de nombreuses années pour devenir un bon sellier… alors que lui s’est lancé dans cette activité depuis quatre ans seulement, à la suite d’une reconversion professionnelle.

Ancien cadre aux fonctions centrales de Peugeot-Citroën, « je voulais me réaliser autrement qu’à travers des process marketing et industriels. J’avais besoin de pratiquer un métier manuel et de satisfaire des clients à partir de mes créations. » Il découvre le monde de la rénovation de véhicules anciens à la suite de l’achat d’un cabriolet 504 en 2008. Après l’avoir restauré lui-même – opérations de carrosserie exceptées – il quitte son entreprise sept ans plus tard. À cinquante ans, il se forme à la sellerie chez les Compagnons du devoir pendant un an et demi, puis auprès d’Alain Maguet au CNVA... Il lance ensuite son entreprise en août 2016, d’abord chez lui, puis dans un atelier à Gambais (78). Aujourd’hui, elle emploie quatre salariés dédiés à la restauration de véhicules anciens. Ainsi qu’à la création pour le nautisme, l’ameublement, le mobilier médical… Les deux tiers de sa clientèle sont des particuliers, notamment les membres de clubs de collectionneurs. Les autres sont des restaurateurs de véhicules anciens sous-traitant la sellerie.

L’artisan refait même désormais des capotes. Cette technique est si délicate que tous les spécialistes ne s’y risquent pas. Les gestes du sellier doivent obéir à des règles très précises, tout en faisant appel à beaucoup d’astuces et d’inventivité pour être efficace et obtenir un beau résultat final. Les connaissances en mécanique auto permettent d’être plus performant pour démonter les éléments et trouver des solutions… 50 à 200 heures de travail pour refaire l’intérieur d’un véhicule. « Nous atteignons des niveaux de finition supérieurs à ceux de l’époque, car les matériaux ont changé », précise-t-il. Cependant, en restauration, la position du sellier n’est pas la plus favorable. Il intervient après le mécanicien et le carrossier… Les propriétaires de véhicule sont alors moins enclins à débourser d’importantes sommes d’argent pour leur bijou roulant. « La profession compte environ 580 artisans en France et seule une dizaine d’entreprises réalisent un CA de plus de 1 M€ », précise Pierre-Yves Jouan.

« La première étape du métier est accessible pour les bons bricoleurs. Ensuite, il faut être bien équipé, avec une machine à triple entraînement. » Il a progressivement atteint l’équilibre économique, en investissant plusieurs dizaines de milliers d’euros dans le matériel et en embauchant quatre salariés. Aujourd’hui, il consacre environ un tiers de son temps à donner des cours d’initiation à la sellerie au CNVA. « Par envie de transmettre, mais aussi pour entretenir mon réseau autour du véhicule ancien », précise-t-il. L’un de ses salariés est d’ailleurs un ancien élève. Toutefois, il tient aussi à travailler lui-même, plusieurs heures par jour, pour conserver sa dextérité et ne pas perdre la main… et par « besoin de revenir à la machine, pour s’adonner à un très beau métier, valorisant, mais méconnu du grand public. »

 

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