Les ateliers indépendants au cœur du défi de la mobilité
Un parc âgé de 12,3 ans en moyenne, six interventions sur dix réalisées dans les ateliers multimarques et un mil- lion d’emplois dans l’Union européenne: l’écosystème de la rechange indépendante est vital pour assurer la mobilité dans l’UE. Étude éclairante de la Figiefa, avec Roland Berger, pour plaider la cause – et donc la place – de l’IAM dans la galaxie automobile européenne.
En finir avec le “strapontin“ concédé à l’après-vente indépendante dans les instances bruxelloises ! La Figiefa veut faire bouger les lignes et donner à cet écosystème, moteur de la mobilité européenne, la place qu’elle mérite. Et pour plaider sa cause, la voix de la rechange indépendante s’est appuyée sur une vaste enquête réalisée par le cabinet Roland Berger auprès de 380 distributeurs de pièces de rechange et 25 experts du secteur.
Les résultats de l’enquête sont sans appel : sans la rechange indépendante, la mobilité européenne serait en panne! Le parc roulant vieillit inexorablement et atteint 12,3 ans d’âge moyen. L’étude rappelle également que 70 % des véhicules circulant sur les routes européennes dépassent les quatre ans, la barre fatidique pour les réseaux de marque constructeur, et qu’en outre 20 à 30 % des véhicules entretenus dans les ateliers de réparation de carrosserie ont moins de trois ans. «En d’autres termes, c’est principalement l’IAM qui assure l’entretien du parc automobile de près de 280 millions de véhicules dans l’UE (voitures particulières et véhicules utilitaires légers et lourds) », insistent les analystes.
Part grandissante de la rechange indépendante
Ce parc génère entre 650 et 1 850 € d’entretien-réparation par an et par véhicule, soit jusqu’à 15000 € sur la durée de vie du véhicule. La maintenance de ce parc génère annuellement 354 Md€ (118 Md€ de pièces et 236 Md€ de main-d’œuvre). Et sur ce total, les acteurs de la rechange indépendante repré- sentent 62 % du total des dépenses sur le marché après-vente (PR et MO). Un business rendu également possible par la densité du maillage des acteurs de la rechange indépendante, qui rassemble 282 000 distributeurs indépendants de pièces détachées et ateliers multi-marques au sein de l’Union européenne, soit 80 % du total des ateliers de l’UE. Un maillage qui est le résultat d’un mouvement de réduction de 70 000 à 54 000 du nombre de concessionnaires par les constructeurs entre 2010 et 2023. Alors que dans le même temps, l’IAM ouvrait 9000 nouveaux ateliers... Au total ce sont 1,1 million d’emplois qui sont portés par l’IAM, contre 500 000 pour l’OEM. Une première anomalie si l’on considère la place dominante des constructeurs dans la pensée européenne... sauf à oublier que ces derniers sont également l’une des premières forces industrielles européennes !
Supply chain toujours plus performante
Une domination numéraire de la rechange indépendante également portée par l’efficience d’une supply chain qui s’optimise en permanence depuis des décennies. Ainsi, le flux des pièces nécessaires à la maintenance des véhicules sur les routes est devenu particulièrement efficient, avec 44 % des pièces livrées en IAM, 32 % en OES (fournisseurs d’équipements origine), 9 % en OEM, 15 % en marques privées. Et pour assurer la plus courte rétention des véhicules en atelier et assurer la satisfaction client, la chaîne logistique des distributeurs annonce en moyenne sur l’Union européenne 30 % des livraisons assurées cinq fois (et plus) par jour, 23 % trois à quatre fois par jour et 34 % une à deux fois par jour...
Pour atteindre ces niveaux, autant dire que les distributeurs, mais aussi leur groupement, ont lourdement investi dans les stocks et dans les sites logistiques ! Sans oublier les efforts d’investissement réalisés pour maintenir la compétitivité et accompagner les réparateurs : 30 % des distributeurs interrogés ont déclaré investir entre 3et5%de leur CA dans le développement de nouvelles solutions, quand 15 % annoncent des investissements à hauteur de 6 et 10 % notamment dans la digitalisation et la formation des ateliers.
Enfin la Figiefa rappelle que sans l’action des ateliers multi-marques de la rechange indépendante, l’Europe aurait besoin de 110 000 véhicules industriels supplémentaires pour assurer la même logistique et la même mobilité, ce qui entraînerait des dépenses d’investissement supplémentaires de près de 16 Md€.
Sans intervention réglementaire, la distorsion de marché pourrait atteindre un coût annuel de 35 Md€ dans sept pays.
Nécessaire adaptation avec l’arrivée des VE
Des arguments de poids, donc, qui plaident fortement la cause de la rechange indépendante. Mais reste à passer l’écueil des nouvelles technologies, au premier rang desquelles figure l’électrification du parc, qui fait craindre un risque de déclassement des ateliers multimarques.
Un test crucial pour la rechange indépendante, qui doit se mettre en ligne pour être en mesure de traiter ces véhicules électriques (outils d’accès aux informations et aux pièces dédiés, formations...). Mais aussi pour les constructeurs, « qui ont besoin de l’IAM pour garantir une réparabilité efficace à long terme et pour convaincre les conducteurs que les VE ne deviendront pas obsolètes, alerte la Figiefa... À mesure que de nouveaux véhicules arrivent sur le marché et vieillissent, et si aucune action réglementaire ne traite les risques, les opérateurs de l’aftermarket seront de plus en plus exclus du marché des services, en particulier pour les véhicules de moins de six ans. » Le levier des réglementations européennes (libre choix inclus), remises à jour pour intégrer ces nouveaux critères, doit donc être actionné de toute urgence, alarme la Figiefa. C’est ici que l’on reparle du Data Act, améliorant l’accès aux informations véhicules et conducteurs, avec toujours en ligne de mire le libre choix du réparateur.
IAM/OE : une guerre de position inéluctable
«L’IAM mérite d’être considéré comme un élément fondamen- tal de l’industrie automobile par tous les acteurs concernés », milite la Figiefa. Dans cette dynamique, l’association préconise de transformer la dénomination d’IAM en une identification qui « enverrait un signal fort à l’Europe » : « Industrie des solutions pour le cycle de vie des véhicules ». On peut donc s’attendre dans les mois qui viennent à une intensification des batailles de position... D’autant plus que l’OE, fortement à la peine, pourrait avoir la tentation de ramener à elle toutes les attentions (et potentiels soutiens) des membres de l’Union européenne !