Equip Auto 2022 : l'édition de la légitimité

Equip Auto vient de s’achever sur une fréquentation de 78 280 professionnels. Un tout petit poil sous l’objectif de 80 000 que s’étaient fixé les organisateurs. Ce chiffre d’à peine 20 % sous celui de 2019, beaucoup d’observateurs le considéraient pourtant comme très ambitieux en l’état. Et encore plus quand les traditionnelles contestations sociales d’automne sont venues vider les stations-service, remplir les manifestations et menacer les transports publics.

Et pourtant, il l’a fait. Son flux de visiteurs quotidien est venu constamment garnir ses deux halls et demi, comblant ses allées et les attentes de la plupart des exposants. Ces derniers saluent unanimement un visitorat qualitatif et surtout équilibré entre grands comptes, distributeurs et ces bons sangs de réparateurs sans qui la fête serait évidemment moins folle.

Et qu’on ne vienne pas dire que le salon automobile voisin a participé à cette attraction : si le grand public a pu se faire abuser par la promesse mondiale d’un salon au final franco-chinois, les pros, eux, savaient parfaitement à quoi s’en tenir depuis de longues semaines. En outre, aucun pont n’avait été jeté entre les billets des deux salons.

Equip Auto peut évidemment remercier les groupements de distribution qui sont massivement venus exposer leurs solutions sur de vastes stands. Ils ont drainé adhérents distributeurs, clients réparateurs et partenaires. Il peut aussi rendre grâce aux équipementiers qui ont définitivement compris que leurs stands doivent être ouverts, accueillants et surtout, mélangés avec ceux de l’outillage, des services et des réseaux. À Equip Auto au moins, la fracture entre France d’en Haut et France d’en Bas a été joliment et définitivement réduite.

Un exemple parmi tant d’autres : les emballantes animations du stand Eurorepar Car Service, preuve courageuse que le puissant et normé Stellantis peut lâcher la bride à son réseau multimarques pour le rendre diablement attractif et populaire…

C’est là le fruit de trois éditions réformistes, décidées par l’organisation après ce démoralisant Equip Auto 2015 si crépusculaire (relire notre article d’alors : «Plaidoyer pour l’Equip Auto d’hier et donc, de demain!»).

La stratégie de relance a été bonne. D’abord, par ce grand choc refondateur : adieu Villepinte-la-maudite (trop de halls s’y étaient vidés), bonjour la royale et pimpante Porte de Versailles dès 2017. C’est là qu’Equip Auto commence à faire table rase du passé en mixant enfin l’ensemble des acteurs de la filière au lieu de les séquestrer dans des halls hyperspécialisés. Et à obtenir des équipementiers qu’ils se déboutonnent enfin ! Quelques-uns montrent la voie. Ils convertissent leurs stands claquemurés et leurs pièces sous vitrines fermées en des espaces ouverts aux démonstrations, manipulations et formations.

Après une édition 2019 qui confirmait l’excellente tendance, restait à ne surtout pas rater celle de 2022 ; à être à la hauteur des retrouvailles après trois ans de disette pandémique, même si Equip Auto on Tour avait su entretenir en 2021 la visibilité régionale de l’événement.

Chapeau bas, donc, à l’équipe si intelligemment féminine d’Equip Auto ! Elle peut se féliciter d’avoir poursuivi le rajeunissement du salon en allant au bout d’une segmentation pertinente et visible d’espaces, d’animations, de villages, de conférences dédiées aux tendances fortes du marché. Rendons quand même sa part de mérite au concomitant Mondial. Si l’approche reste évidemment à transformer, son voisinage a au moins permis de jeter les prémices d’une approche filière, matérialisée par le Paris Automotive Summit co-organisé par la PFA et la Fiev.

Pas question bien sûr de comparer l’affluence d’Equip Auto aux très proches 78 000 visiteurs revendiqués par Automechanika un mois plus tôt. Ce serait oublier que le salon français déployait 1000 exposants et marques quand son concurrent germanique, même privé de son visitorat est-européen concerné ou préoccupé par la guerre, en alignait encore 2804. Mais ce serait aussi se tromper de débat en réduisant un salon à ses seuls exposants, en oubliant que sa légitimité repose d’abord sur son visitorat.

Et puis quoi ? Les deux ont leur raison d’être, puisque très peu de distributeurs et de réparateurs français se rendent à Francfort, comme peu de réparateurs et distributeurs allemands visitaient Paris. À la Porte de Versailles, les visiteurs étaient là et ont trouvé suffisamment leur bonheur pour oublier qu’évidemment, la crise, la guerre et l’abondance des salons internationaux en cette année avaient réduit le nombre d’exposants.