[Atlas]Auguste Amieux (PHE) : « Il faudra attend

Romain Thirion
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Question : Avec le recul, comment s’est conclue l’année 2020 sur le marché des pièces de carrosserie en Europe ?

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Auguste Amieux : Certains pays ont connu des confinements plus longs que d’autres, mais la tendance moyenne est au recul d’environ 15 % en Europe de l’Ouest. Les restrictions de circulation ont fait baisser la sinistralité et le kilométrage.

Le bilan 2021 est-il positif ?

A. A. : Oui, mais surtout depuis le mois de juillet. Les hausses de volumes marquées du second semestre laissent penser que le marché aura récupéré les pertes des six premiers mois et sera revenu au niveau de l’année 2019.

Quelle est votre vision du marché en 2022 ?

A. A. : Sauf nouveaux confinements, cette tendance positive devrait se prolonger. Il y aura donc une croissance des volumes et de la valeur du marché, puisque la forte inflation actuellement à l’œuvre devrait se poursuivre.

La pénurie de matières premières et les difficultés logistiques touchent-elles à leur fin ?

A. A. : Les hausses de prix et les tensions sur les approvisionnements devraient se poursuivre. Mais nous n’avons pas connu de rupture. Nous avons privilégié le stock. Certains fournisseurs ont eu du mal compte tenu de la pénurie de composants électroniques, les fabricants d’optiques notamment. Quant aux pièces de qualité équivalente (PQE) venant d’Asie, la logistique a parfois fait défaut. Mais le groupe PHE a su anticiper.

Quelle a été l’augmentation moyenne des tarifs en Europe en 2021 ?

A. A. : Comme chaque année, la hausse des pièces de carrosserie est d’environ 6 %. Certains constructeurs comme Renault ont baissé leurs prix, alors que d’autres ont continué à les augmenter, comme Stellantis et certaines marques allemandes et asiatiques. L’inflation, en revanche, est beaucoup plus importante sur les éléments d’éclairage, car ils ont connu de grosses évolutions technologiques en passant du Xénon aux LED. Les optiques ont pris 46 % de hausse tarifaire en trois ans.

L’inflation ne remet-elle pas en cause les projections de croissance ?

A. A. : En termes de marge, il faut être vigilant car l’inflation est aussi marquée sur les prix d’achat. Et également sur les tarifs des emballages et sur le coût de transport. Il paraît difficile de ne pas répercuter ces augmentations tarifaires sur le client.

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L’inflation est-elle conjoncturelle ou peut-elle devenir structurelle ?

A. A. : Les constructeurs augmentent chaque année le prix de leurs pièces, donc cette inflation-là est structurelle. Le coût de la réparation continuera d’augmenter et de pousser des véhicules accidentés vers le classement « véhicule économiquement irréparable ». L’inflation liée à la rareté de certains composants, en revanche, est conjoncturelle.

L’offre de pièces de qualité équivalente et de pièces adaptables progresse-t-elle en Europe ?

A. A. : Elle s’enrichit à mesure que les prix des pièces d’origine augmentent. La tendance est inverse pour la pièce adaptable, dont le marché a fondu car elle est de moins en moins facile à poser. Mais en ce qui concerne la PQE, l’essentiel des volumes provient d’Asie et notamment de Taïwan, donc sa disponibilité varie en fonction du transport de marchandises. Heureusement, il reste quelques fabricants de PQE en Italie et en Espagne.

Toutes les PQE sont-elles soumises à certification de la part d’organismes reconnus ?

A. A. : Certaines PQE n’en ont pas besoin car elles ne participent pas à la sécurité des véhicules, comme les pare-boue. Mais les capots, pare-chocs, ailes, portes, etc. : oui. Les organismes certificateurs comme Thatcham au Royaume-Uni, Centro Zaragoza en Espagne ou TÜV-SÜD en Allemagne ont des accords de réciprocité entre eux qui leur évitent de certifier deux fois une même pièce. Mais au-delà des certifications, nous avons chez PHE nos propres process de contrôle et nos concurrents en font de même.

Quels sont les prochains pays qui doivent mettre en place une clause de réparation ?

A. A. : Il n’en reste plus beaucoup. Ce sont en général des pays où les constructeurs produisent beaucoup de véhicules, comme la République tchèque, patrie de Skoda, la Roumanie pour Renault et Dacia. Le principal espoir de ces marchés est le vote d’une loi européenne qui imposerait la clause de réparation à tous les états membres de l’Union européenne (UE).

Peut-on espérer voir l’UE adopter une loi en 2022 ou faudra-t-il attendre encore ?

A. A. : 2023 est un horizon vraisemblable. La France prendra la présidence de l’UE au premier semestre 2022 donc il ne se passera probablement rien durant les six prochains mois. Ensuite, la République tchèque lui emboîte le pas puis, au premier semestre 2023, ce sera au tour de la Suède, assez protectionniste aussi avec Volvo. En revanche, avec la présidence espagnole au second semestre 2023, la porte devrait s’ouvrir.

Comment se développe l’offre de pièces d’occasion ?

A. A. : Le marché progresse mais ne dépasse pas 3 à 4 % en moyenne en Europe de l’Ouest. Loin des 20 % des États-Unis où le parc roulant est plus ancien et où les contraintes sont moins fortes.

Des enseignements structurels à tirer de la crise 2020 ?

A. A. : Le groupe PHE a mis l’accent sur les fondamentaux du métier de distributeur : rester ouvert, disposer d’un stock important et diversifier les achats pour ne pas trop dépendre d’un même fournisseur.

Y a-t-il eu davantage de concentrations en 2021 chez les distributeurs de pièces de carrosserie ?

A. A. : La concentration est assez faible entre distributeurs de pièces de carrosserie. Il y a eu quelques opérations de croissance externe, comme nous l’avons fait en Espagne avec l’acquisition d’AD Marina notamment, mais ça n’est pas de la concentration à proprement parler.

La distribution en ligne prend-elle de l’ampleur ou reste-t-elle un phénomène marginal ?

A. A. : Elle progresse plus vite que le marché mais concerne surtout de petites pièces comme les optiques, à part du côté d’Autodoc, qui vend de gros éléments. Le plafond de la distribution en ligne correspond vraisemblablement à 10 % du marché.

Romain Thirion

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