Auto Plus : la fin de l’équation « véhicule premium = entretien cher » ?

Romain Thirion
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Dans son numéro 1379 du 6 février dernier, Auto Plus a comparé, pour chaque catégorie de VP, le coût accumulé des révisions dans les réseaux constructeurs pendant huit ans ! Et l’hebdomadaire en tire un étonnant palmarès quasi inversé : aux véhicules les moins chers à l’achat l’entretien le plus coûteux à long terme. Mais la suprématie allemande n’est pas si évidente…
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C’est un communiqué BMW qui nous a interpellés. Celui-ci, intitulé “Enquête Auto Plus : BMW et MINI parmi les autos les moins chères à entretenir”, ne pouvait que retenir notre attention. Le constructeur munichois y vante en effet la présence de trois de ses modèles en tête du palmarès établi, selon les différents segments de véhicules, par Auto Plus. Friand d’enquêtes comparatives, le magazine a rendu, dans son numéro 1379 du 6 février, le bilan du coût cumulé des révisions, sur une période de huit ans (soit 15 000 km/an sauf pour les minicitadines, 10 000 km), effectué dans les réseaux constructeurs.Le but ? Faire réfléchir ses lecteurs automobilistes au très fameux TCO, le “Total cost of ownership” (coût total de possession) au moment d’acheter un véhicule neuf. L’intention est fort louable, car combien de conducteurs ne constatent que trop tard la gourmandise de leur véhicule (ou de son réseau constructeur) en matière d’entretien. Cet entretien, Auto Plus l’a limité au champ de la révision selon les préconisations constructeur –le fameux carnet d’entretien– et a distingué les véhicules réclamant une vidange annuelle ou tous les deux ans, les modèles à distribution à chaîne et ceux à courroie, ainsi que les intervalles de remplacement choisis (5, 6 ou 10 ans). Car le remplacement de la distribution reste une opération coûteuse, surtout dans les ateliers de marque…
La courroie ennemie ?
C’est justement sur ce point précis qu’Auto Plus met en garde ses lecteurs au moment de démêler les idées reçues (nombreuses) soulevées par le thème du dossier. En effet, l’auteur de l’enquête, Pierre Audemar, rappelle que les modèles Audi, Mercedes ou BMW réclament la plupart du temps de l’huile long life et sont souvent équipés d’une chaîne de distribution au lieu d’une courroie, ce qui s’avère évidemment moins coûteux car le remplacement, en cas de distension de la chaîne ou d’un défaut de lubrification, intervient beaucoup plus tard dans la vie du véhicule, voire jamais si l’automobiliste roule peu. Mais si le dossier parle de révision, avec vidange, filtres et vérification de la distribution, il n’inclut pas dans le calcul les pièces de freinage – plaquettes, disques, voire étriers – qui, de l’aveu même de l’hebdomadaire, sont souvent plus onéreuses chez les constructeurs premium.C’est donc sur un périmètre d’entretien relativement réduit qu’Auto Plus a réalisé son enquête. Et forcément, à ce petit jeu, les modèles premium s’en sont sortis avec les honneurs. Notamment BMW qui place, comme annoncé plus haut, trois modèles à la première place des catégories Compactes essence (116i, 1 450 euros sur 8 ans), Diesel (116d, 1 860 euros) et SUV Compacts (X1 sDrive18d, 1 790 euros). Le constructeur munichois place également deux modèles en deuxième position de leur catégorie (216d Active Tourer et X3 xDrive 20d), un en troisième (525d) et un en quatrième (318d).
Citroën (très) bon élève
Sans occuper de première position, Volkswagen, moins premium mais allemand jusqu’à preuve du contraire, réussit à placer sept modèles dans le top 5 de sept catégories. Mercedes et Audi, eux, sont plus en retrait, même si la marque aux Anneaux domine la catégorie des SUV Familiaux avec son Q5 2.0 TDI Clean Diesel 190 (2 832 euros d’entretien sur 8 ans), seul modèle sur les quatre classés à rester sous les 3 000 euros malgré la préconisation de remplacement de la distribution au bout de 5 ans ou 150 000 km. Mais on est moins regardant au coût d’un kit de distribution, même avec pompe à eau, lorsqu’on a les moyens de rouler en Q5…Même si, comme le souligne le dossier, les marques aux véhicules dits «low cost», en particulier Dacia, s’avèrent beaucoup plus onéreux lors d’une révision dans le réseau constructeur que leurs équivalents premium (lorsqu’ils en ont…), les modèles de grande vente ne sont pas forcément largués. Citroën, notamment, place huit véhicules dans le top 5 dans sept catégories ! Un record, même si lesdites catégories sont, pour certaines, celles où les premiums brillent par leur absence. La marque aux Chevrons fait en effet coup double dans le segment des Ludospaces : Nemo 1.3 HDi 75 (1 274 euros sur 8 ans) et Berlingo 1.6 HDi 90 (2 074 euros) s’y placent premier et deuxième ; elle place également Cactus 1.2 PureTech 110 (1 916 euros) en tête des SUV Citadins essence.Citroën se paie même le luxe de dominer les Allemands sur le très bataillé segment des Familiales, avec C5 2.0 HDi 160 (1 952 euros) qui, certes, tire parti de sa naissance avant l’établissement de la norme Euro 6. Clairement, Citroën bénéficie pleinement de son intervalle de 10 ans (ou 175 voire 180 000 km) pour le changement du système de distribution. A l’opposé, Renault truste les bas ou, au mieux, les milieux de classement…
Pas si libéré que ça des idées reçues
Oui, le dossier brise, en partie, l’équation pressentie comme presque naturelle du véhicule haut de gamme = entretien coûteux. Surtout si ledit entretien est fait chez le constructeur. Le dossier rappelle d’ailleurs que les réseaux de marques ont, pour la plupart, revu à la baisse leur nombre de forfaits, les ont mieux packagés et ont fait du prix un véritable argument. Mais en conclusion de son dossier, Auto Plus ne présente que les centres auto comme concurrents de la «révision constructeur». C’est omettre l’effort réalisé en la matière, ces dernières années, par les enseignes de MRA qui, sous l’impulsion des têtes de réseaux et de la campagne des organisations professionnelles −«Libérez-vous des idées reçues»−, affichée aux comptoirs des garages et dans les ateliers, ont pris une place qui croît sur le marché de l’entretien avec garantie préservée.Il est vrai, aussi, que la rechange traditionnelle est beaucoup plus souple dans ses tarifs et ne peut être comparée avec précision aux forfaits des réseaux constructeurs. Mais omettre ce canal (ou au moins les enseignes majeures de MRA) dans un dossier visant à éclaircir la vision qu’a l’automobiliste du coût d’entretien de son véhicule est, sinon mal intentionné, au moins maladroit. Car un magazine grand public comme Auto Plus joue aussi un rôle dans l’éducation de l’automobiliste et, dans ce dossier comme dans les autres, son éducation aurait mérité d’être la plus ouverte possible.
Romain Thirion
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