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EXCLUSIF – Plateformes régionales (suite): les grandes manœuvres ont commencé!

Jean-Marc Pierret
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En août dernier, nous faisions un triste constat : dans une France où en 10 ans, les plateformes ont proliféré jusqu’à compter 80 implantations (régionales et nationales comprises), l’âge d’or semble terminé (voir «Plateformes régionales: l’hécatombe annoncée…»). Vous étiez, à notre grande surprise, plus de 8 900 à lire notre analyse. La question vous intéressait visiblement. Nous avons donc pisté les réponses qui commencent à tomber…
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Ce n’est un secret pour personne : les grands groupements de distribution ont regardé l’émergence des plateformes régionales avec hostilité. Puis leur inévitable prolifération, avec suspicion. Nous le pressentions : ils ne resteraient pas éternellement dépendants d’elles.provisoires associations contre-nature Pourtant, les distributeurs français ont vécu longtemps ces nouveaux relais logistiques comme un mal contre-nature certes, mais nécessaire car imposé par la quadrature du cercle logistique. D’un côté, le marché des pièces, stagnant ou en légère baisse, imposait de privilégier la prudence sur de coûteuses contre-attaques ; de l’autre, il fallait bien trouver un moyen de gérer l’irrépressible croissance du nombre de références à traiter pour subvenir aux besoins d’un parc toujours plus diversifié.Très conscients que l’atonie économique déconseillait des investissements exigés par un stock pièces dont la taille et le coût s’enflamment mécaniquement de 10% par an, les groupements ont donc rongé leur frein. Ils ont longtemps fait contre mauvaise fortune, bon cœur. Mais en apparence seulement. Ils ont certes dû se résoudre à coexister avec les plateformes, mais sans jamais abdiquer définitivement la maîtrise de leurs schémas logistiques au profit d’un intermédiaire de plus : le circuit traditionnel de la pièce est bien trop long pour que l’on en partage durablement les marges qui, elles, ne sont plus extensibles…En outre, l'expansion du nombre de références a un effet mécanique dangereusement pervers pour des groupements attachés à concentrer, pour la valoriser, une offre globale : parallèlement, les plateformes aussi accroissent mécaniquement leurs offres. C'est un peu comme un vaisseau spatial lancé à mach 29 vers une planète qui elle, file à mach 30 : aussi rapide soit la fusée, l'objectif s'éloigne quand même...C’est parti !Mais l’heure de la revanche a sonné. Les contre-stratégies logistiques se dessinent maintenant clairement chez les deux grands acteurs que sont Groupauto (Groupauto+Precisium) et Autodistribution. Et en bonne logique, ils ont décidé de se réapproprier les solutions imposées par le marché. En préalable, rappelons-en les grandes règles, à savoir qu’un distributeur-stockiste a besoin de 2 types basiques d’approvisionnements exigés par les réparateurs du bout de la chaîne :
  1. un réassort dans un délai à J+2 pour les pièces à forte rotation («A» et «B») dont il entretient généralement un stock local. Pas question bien sûr de manquer de références basiques ;
  2. des livraisons dans un délai de H+4 pour les faibles rotations (les «C» et «D») qui ne sont pas vraiment stockées mais que le réparateur-client exige quand même de plus en plus rapidement, surtout quand il en a besoin.
Les deux ténors de la distribution ont donc fini par réussir à décliner leurs stratégies «perso». Bien distinctes mais clairement adaptées, l’une comme l’autre, à ces attentes-métier.Groupauto : des plateformes «maison»Commençons par Groupauto. Depuis ses précédentes acquisitions, il «empile» trois plateformes nationales : Blois (issue du rachat de Partner’s), Sainte-Geneviève-des-Bois (héritée de la récente reprise de Precisium) et bien sûr la plateforme historique du Rheu liée depuis toujours à Groupauto. Convenons-en, cela fait beaucoup de plateformes à vocation nationale. Et Jean-Jacques Laffont n’est guère homme à différer de lucratives rationalisations.Parallèlement, les emplettes continuaient : Groupauto/Alliance a successivement repris CAL à St Ouen (qui déménage à Gennevilliers), APO (Toulouse et Marseille) et bien sûr, TPA et sa performante plateforme Car Distribution (Metz).Pas besoin d’un Bac+12 en logistique pour comprendre la stratégie : le schéma est quasiment complet. Surtout si l’on réalloue les trois plateformes nationales qui n’ont pas besoin d’être aussi nombreuses pour livrer à J+1 (c’est en cours). Restait à redistribuer des responsabilités géographiques à tout ce petit monde plateformisable selon un compas spatio-temporel à H+4, corrigé des variations liées aux potentiels spécifiques à chaque région. Résultat de l’équation simple :
  • Paris/RP Nord : CAL ;
  • Paris/RP Sud : Ste-Geneviève ;
  • Sud (Marseille et Toulouse) : APO ;
  • Grand Ouest : Blois et Le Rheu (+ faibles rotations «C et D» en H+4 ?) ;
  • Grand Est : TPA/Car Distribution.
C’est vrai, il manque le Rhône-Alpes : avis donc aux postulants, si le choix n’est pas déjà fait…Autodistribution : l’école «constructeurs»L'Autodistribution, qui dispose pour sa part de deux plateformes nationales (Logisteo à Moissy-Cramayel-77 et Cora à chaponnay-69), semble en passe d’arriver à la même excellence logistique, mais par des voies différentes. D’abord parce que la taille moyenne de ses grands distributeurs, indépendants ou filiales, est supérieure à celle des adhérents Groupauto. Pas besoin par exemple d’acheter une plateforme à Marseille quand un Farsy sait déjà satisfaire brillamment la demande en références A, B, C et D. Ni d’aller inutilement insulter un Talbot qui sait aussi bien couvrir son flan Ouest.Pour donc répondre aux besoins du marché sans brutaliser cette équipe qui gagne, l’Autodistribution a cherché et trouvé l’option qui ménage l’acquis tout en générant l’excellence logistique recherchée. Là, l’équation gagnante va additionner ces distributeurs capables de stocker et d’investir au site Logisteo de Moissy-Cramayel maintenant arrivé à sa maturité logistique.Comment ça marche ? Grâce aux sas de livraison si répandus dans les réseaux constructeurs (PSA-Vesoul ou Renault-Cergy). Ils permettent des livraisons de nuit sécurisées sans réceptionnaire. Résultat ? Toute commande passée jusqu’à 17h30 part de Logisteo pour être livrée dans la nuit partout en France. La pièce est donc disponible pour les premières tournées du petit matin suivant. Le réseau de distributeurs est en train de s’équiper de ces sas qui savent faire les 3/8 tout seuls.Pour Cora, pas besoin de changer un système qui marche si bien depuis Chaponnay (69) et ses capacités logistiques de 30 000 m2. Tout ce qui est commandé avant 17h30 arrive le lendemain. Les carrossiers ont justement besoin de ces livraisons à J+1 qui sont déjà parfaitement gérées par la performante plateforme intégrée et récemment renforcée par 6 000 nouveaux m2 sur 10 mètres de hauteur !Pour les deux groupements, il restera bien sûr à affiner en fonction des inévitables spécificités locales. Mais ainsi globalement redessinées, leurs logistiques réintègrent les deux vertus recherchées : la capacité de stocker, en famille, les pièces dont les distributeurs ont besoin sans dépendre, autrement que pour des dépannages, des solutions «externes» que sont les plateformes indépendantes.Le pire n’est jamais certain…On revient donc, plus crucialement encore, à nos interrogations d’août dernier : combien des 80 plateformes recensées en France survivront-elles ? Il reste bien sûr les ventes de pièces en ligne : les sites concernés font vivre quelques plateformes. Mais le transfert du «do it» vers les ordinateurs individuels ne peut nourrir tout le monde.Il reste aussi les «petits» groupements qui, eux, auront encore plus besoin de s’atteler à des plateformes régionales sans lesquelles ils ne pourront suivre le rythme logistique ainsi imposé par les leaders du secteur. Agra par exemple qui accroît sa plateforme nationale et capillarise son offre vers ses distributeurs grâce à un accord avec les plateformes régionales Sirius. Doyen qui reste fort, avec sa franchise API, d’une logistique réputée parfaite partant soit de Belgique, soit de Toulouse…Se sachant contournables, les plateformes ont aussi pris le temps de se faire aussi belles et séduisantes que possible pour attirer les appétits salvateurs d’investisseurs et d’acteurs. Apprau, qui peut valoriser son maillage national, ses profondeurs de gamme et la discipline de fournisseurs harmonisés et d'accords centraux. ACR et, notamment, sa spécialisation "réparation rapide". S’Energie, certes orpheline de son géniteur initial Partner’s, mais forte de sa famille de plateformes proposant un maillage national crédible…Il est vrai enfin que de grands agitateurs de marché frappent à la porte en cherchant des opportunités d’implantation, tel le très ambitieux ECP/LKQ dont nous vous révélions les moyens et les appétits dans un récent article (voir «LKQ peut-il révolutionner la distribution européenne ?»).Mais quoi que l’on dise, le gâteau logistique des plateformes se restreint sans cesse. Et à ce rythme, la cerise qui pensait trôner sur la pâtisserie ressemble de plus en plus à son seul noyau. A fortiori maintenant que les groupements se rationalisent et se disciplinent à marche forcée pour se réapproprier leur marché pièces en marginalisant leurs appros externes.Nous y reviendrons, bien sûr...
Plateformes régionales (suite): les grandes manœuvres ont commencé!En août dernier, nous faisions un constat: dans une France où en 10 ans, les plateformes ont proliféré jusqu’à compter 80 implantations (régionales et nationales comprises), l’âge d’or semble terminé (voir «Plateformes régionales: l’hécatombe annoncée…»). Vous étiez, à notre grande surprise, plus de 8900 à lire notre analyse. La question vous intéressait visiblement. Les réponses commencent à tomber…Ce n’est un secret pour personne: les grands groupements de distribution ont toujours regardé l’émergence des plateformes régionales avec hostilité. Puis leur inévitable prolifération, avec suspicion. Nous le pressentions: ils ne resteraient pas éternellement dépendants d’elles.
Jean-Marc Pierret
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