La filière lubrifiants donne naissance à l’éco-organisme Cyclevia

Romain Thirion
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CA de Cyclevia

La Loi Agec ayant rebattu les cartes de la responsabilité élargie du producteur (REP), la filière des huiles et lubrifiants usagés s’est adaptée en créant l’éco-organisme Cyclevia. Une structure qui va favoriser encore davantage la régénération et diminuer la dangerosité des produits.

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Elle était pourtant bien organisée, et depuis longtemps, cette filière recyclage et revalorisation des lubrifiants usagés. Mais comme pour la filière VHU, elle aussi particulièrement encadrée, la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, dite "Agec", est venue mettre son grain de sel. Mais dans le cas précis des acteurs des huiles et du graissage, c’est loin d’être un grain de sable car l’ensemble des adhérents de la Chambre syndicale nationale de l'industrie des lubrifiants (CSNIL), de l’Union française des industries pétrolières (UFIP) et du Centre professionnel des lubrifiants (CPL) se sont mis d’accord pour la création d’un seul et unique éco-organisme : Cyclevia.

Plus de recyclage et de régénération

Une bonne nouvelle que cette unanimité, car même si le décret d’application de la loi Agec permet aux producteurs d’instituer des systèmes individuels à la place d’un éco-organisme, cette solution n’a pas été retenue. « Le système individuel impose de récupérer ses propres huiles, or la nature du produit les rend impossibles à distinguer les unes des autres, d’où un choix clair autour de l’éco-organisme », reconnaît André Zaffiro, directeur général de Cyclevia, détaché de ses fonctions au sein de Total Lubricants. Rassemblant 22 fabricants, importateurs et distributeurs en marque blanche pesant 80 % du marché des lubrifiants français, Cyclevia a été créé en octobre 2021 et sa demande d’agrément a été déposée en décembre dernier.

Accordé le 23 mars dernier, son agrément s’avère rétroactif jusqu’au 1er janvier 2022. « Ce qui signifie que les collecteurs ont assuré une collecte gratuite depuis le 1er janvier et que Cyclevia remboursera ceux qui ont quand même eu à payer depuis cette date », précise André Zaffiro. L’ambition de Cyclevia ? Améliorer encore le niveau de performance de la filière – jusqu’à la régénération d’huiles de groupe III voire plus – tout en réduisant son impact sur l’environnement. Durant trois ou quatre ans, Cyclevia agira d’abord en éco-organisme financier, chargé de prendre en charge les coûts de collecte – 89 € la tonne – et de recyclage des fournisseurs et de superviser ladite collecte jusqu’au dernier litre des huiles et graisses usagées. Puis leur régénération, leur recyclage et leur valorisation.

Structure concurrentielle préservée

« Cette nouvelle organisation ne pèsera pas sur les producteurs, en termes de coûts directs, mais dans un délai de six mois à partir de notre agrément, une éco-modulation en fonction de trois critères sera mise en place : bonus sur l’utilisation des huiles régénérées, malus sur les produits étiquetés comme dangereux au sens de la classification CLP et exemption pour les produits éco-labellisés », explique André Zaffiro.

Au-delà de ces trois à quatre ans, l’éco-organisme devrait devenir semi-opérationnel et viendra compléter le maillage de centres de retraitement, détenus par 51 acteurs au total, tels que Chimirec, Veolia-Sevia, etc. Le tout sans perturber la structure concurrentielle existant sur le marché français. Car les centres de recyclage et de revalorisation continueront de revendre le produit de leur travail, au prix du marché, aux fabricants et ceux-ci resteront libres de revoir leurs tarifs en conséquence. « L’éco-contribution est un élément constitutif du coût de revient du produit : les producteurs sont libres de répercuter ou non son montant auprès de leurs clients », confirme André Zaffiro.

Plusieurs leviers pour une filière plus vertueuse

Les cinq premières années d’agrément de Cyclevia, qui devra renouveler son sésame en 2027, vont être concentrées autour de trois enjeux. D’abord, l’amélioration du taux de collecte des huiles usagées collectables, déjà élevé, en visant particulièrement les huiles claires qui échappent aujourd’hui à la comptabilisation, et la promotion d’une collecte séparée des huiles noires et huiles claires. Ainsi qu’en améliorant la collecte auprès des petits détenteurs qui passerait sous le radar des collecteurs agrées.

Ensuite, l’amélioration de la circularité de la filière en favorisant la régénération pour la production d’huiles de base pouvant être intégrées dans la production de lubrifiants neufs, y compris ceux destinés aux moteurs Euro 5 et 6. C’est dans ce cadre-là que l’éco-contribution sera modulée, en fonction du niveau d’incorporation de matières recyclées.

Enfin, dernier enjeu : l’amélioration des performances environnementales des huiles mises sur le marché et la diminution de leur dangerosité. C’est dans ce cadre-là qu’interviendra le malus sur les produits étiquetés comme dangereux.

Des objectifs chiffrés

450 000 tonnes de lubrifiants mis sur le marché en 2019 : tel est le volume pré-pandémique qui est soumis à la REP en 2022. De 50 % d’huiles usagées collectées en 2023, le taux doit passer à 53 % en 2025 et à 55 % en 2027.

Romain Thirion
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