La rechange indépendante a pris le virage de la RSE

Caroline Ridet
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ESG illustration

Réglementation active, écosystème mobilisé, produits estampillés : les planètes sont alignées pour faire décoller la concrétisation de ce qui n’était jusque-là qu’une notion abstraite. Mais tout reste encore à faire…A

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« Il y a quatre ans, lorsque nous parlions développement durable… nous étions peu compris. Aujourd’hui, les dirigeants grands groupes de distribution savent devoir s’intéresser à l’ESG (Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance). Et cela partout dans le monde », décrit Antoine Soulier, co-fondateur et directeur général d’Inteliam, qui évalue et accompagne les distributeurs mondiaux dans l’amélioration de leurs performances. Une prise de conscience accélérée par l’entrée en vigueur de la directive européenne CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) qui fixe des normes et obligations en matière de reportings extra-financiers. « Cette réglementation répond à l’objectif de transparence et de responsabilisation, avec l’objectif ultime d’une appropriation de la démarche par les sociétés. » Adoptée par les industriels de l’auto comme les distributeurs, la démarche entraînent dans son sillage l’ensemble de leur écosystème.

Prise de conscience universelle

Né en Europe, ce processus est aussi relayé hors de l’Union européenne. Ainsi, l’Australie va déployer une démarche inspirée de la CSRD.  Cette injonction réglementaire a contribué à accélérer le mouvement, « avec des acteurs européens qui prennent de l’avance, comme nous avons pu le constater auprès des 200 sociétés  des quatre continents auditées par Inteliam. Toutefois, nous ressentons aussi une prise de conscience de la nécessité de se rendre durable dans les autres régions du monde. »

Critères ESG : le détail

Cet outil d’évaluation de l’exercice responsable des entreprises vis-à-vis de l’environnement et de leur écosystème (salariés, partenaires, sous-traitants, clients) s’appuie sur trois piliers :
• Environnemental : gestion des déchets, réduction des émissions et prévention des risques environnementaux.
• Social : prévention des accidents, formation du personnel, respect du droit des employés et de la chaîne de sous-traitance, dialogue social.
• Gouvernance, pour vérifier l’indépendance du conseil d’administration, la structure de gestion et la présence d’un comité de vérification des comptes.

Du constat à l’action

Reste que constater son niveau d’empreinte environnementale (et notamment carbone), c’est bien, mais il faut que ce fastidieux travail de collecte des données pour élaborer son rapport ESG découche sur des actions opérationnelles ! « Cela est d’autant plus fondamental que tous les partenaires finiront par demander de la transparence sur l’empreinte carbone. » Et pour les distributeurs, le premier levier d’amélioration concerne la logistique.
Ainsi Parts Holding Europe, dans le Top 4 des distributeurs européens, s’est engagé dans le développement durable en 2024 avec le recrutement d’un spécialiste du sujet et à la clé l’enclenchement d’un plan de décarbonation des sites logistiques axé sur la sobriété-efficacité énergétique (chauffage, éclairage, isolation et flotte). « En tant qu'entreprise citoyenne, nous mettons des plans concrets et pragmatiques en place. Ils ont l'avantage de coïncider avec les évolutions technologiques et avec l'intérêt économique de l'entreprise et la protection de l’environnement », explique Jeremy de Brabant, directeur général du groupe. Le polonais Inter Cars (dans le Top 3 européen), le scandinave Meko ou même LKQ : « Ces entreprises font d’ailleurs de cet engagement un élément de différenciation », remarque Antoine Soulier.

Initiatives communautaires

Pour aller plus loin, l’ITG Nexus Automotive a mis le développement durable au cœur de sa stratégie, avec notamment le lancement de son “Climate Day“, consistant à mettre en place des chantiers conjoints entre membres et fournisseurs afin de faire émerger des solutions concrètes et des bonnes pratiques durables. Même objectif, mais à une échelle plus large, avec le FAAS (Forum on Automotive Aftermarket Sustainibility), initié en 2023 par le Clepa et la Figiefa, qui réunit déjà 200 membres (équipementiers, constructeurs, ITG, groupes de distribution…). « Et si l’on ajoute la montée en puissance des PIEC, les portefeuilles qui commencent à intégrer des produits et services “verts“, les démarches vertueuses en termes de protection de l’environnement se multiplient. C’est une bonne nouvelle… mais il reste encore beaucoup à faire », constate Antoine Soulier.

Remanufacturing : durable et circulaire

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DEPA atelier

Générant 70 Md$ de ventes dans le monde, le commerce de la pièce reconditionnée devrait atteindre plus de 112 Md$ à l’horizon 2030. Éminemment durable, la pièce “reman“ souffre encore d’une certaine invisibilité dans certaines zones du monde, de freins réglementaires et de la complexité liée à sa chaîne logistique. Il peine donc à entrer dans le commerce international. « La rénovation est dans une logique de circuit court. Nous exportons quelques produits reconditionnés, comme des directions assistées en Pologne. Vitale pour notre industrie, la consigne (retour des vieilles matières) alourdit le process d’export et les tarifs, qui ne sont donc pas toujours suffisamment dépositionnés. Nous constatons aussi un manque de maturité sur le sujet chez les distributeurs en dehors de l’Europe », explique Gaëlle Maillard, présidente du groupe SPMI, fournisseur de produits rénovés. Même constat chez le rénovateur français Depa International, qui a ouvert un bureau en Allemagne et exporte ponctuellement en Italie. « Pour nos clients, l’important est d’avoir un produit de qualité, au bon prix et avec la bonne disponibilité. S’il est circulaire, c’est bien ! », raconte Luc Avisse, le directeur de Depa. Reste que le levier durable de la pièce auto est porté avec volontarisme par les constructeurs, ou encore les équipementiers tels que Valeo et Bosch, historiquement installés sur le secteur. Un effet booster ?

Caroline Ridet
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