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[Atlas Europe] Clément de Valon, TMD : "Nous déployons Bendix et l’outil GaraShield pour les ateliers"
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Quels palliatifs avez-vous mis en place pour sécuriser vos stocks et les livraisons vers la distribution ?
Clément de Valon : Dès l’approche du premier confinement, nous avons immédiatement réorganisé nos douze usines pour que les collaborateurs puissent travailler en totale protection et qu’aucun site ne ferme. C’est un critère différenciant, je pense, par rapport à d’autres. D’avril à juin, aucune production n’a été stoppée. Les trois mois suivants, les entrepôts étaient « pleins à craquer » afin de livrer toutes les zones du monde à des taux de services entre 85 et 95 %. Ce qui a été salué par nos clients distributeurs d’ailleurs. Mais cela suggère de prendre des décisions très tôt et très vite, notamment celle de doubler sa valeur de stock, en passant de trois à six mois. Notre taille nous donne une liberté opérationnelle que d’autres, beaucoup plus gros, n’ont pas. En mars, la distribution a mis le pied sur le frein afin de ne pas surstocker dans une période où la demande s’est effondrée. Nous estimons ainsi l’activité des ateliers pendant ces trois mois entre 30 et 40 % selon les pays. En sortie de confinement, toutes les vannes se sont rouvertes afin de récupérer le chiffre d’affaires non réalisé pendant trois mois, en ajoutant des phénomènes comme le report du contrôle technique… Une vague montante prévisible, dans le bon sens du terme ! Ce qui l’était moins, c’était la durée du confinement.
Quelles zones ou pays ont récupéré plus vite que d’autres selon vous ?
C. De V. : L’Allemagne, c’est indéniable. Le niveau d’activité, de notre point de vue, est resté le plus élevé d’Europe, en lissant les volumes sur l’année. A contrario, l’Italie, la France et le Royaume-Uni ont connu des dérapages massifs sur la demande. La crise aux Etats-Unis a été la plus difficile à traverser. L’impact du Covid est pire qu’ailleurs. Mais définitivement, 2020 a montré que l’agilité des structures a été déterminante pour résister et servir la distribution le plus correctement possible. Ce qui suppose également de la flexibilité en amont également pour être servi.
Quelle analyse tirez-vous de cette situation inédite et non anticipée ?
C. De V. : Cette crise a révélé la fragilité totale de tous nos modèles économiques en général ! C’est un déclencheur pour repenser nos modèles, nos manières de faire du business, l’utilisation de nos équipes. Mais la résilience de l’IAM a encore – et va encore – jouer ! En avril, les projections montraient une année 2020 à -15 ou - 20 % par rapport à 2019 pour les équipementiers. Finalement, la tendance sera plutôt entre - 8 et - 15 %. Et 2021 devrait être au même niveau qu’en 2019. Théoriquement et en prenant en compte le parc roulant mondial actuel, l’impact sur le long terme ne peut pas être marqué pour l’aftermarket. Ensuite, je pense que certains acteurs ont tiré leur épingle du jeu, notamment les fournisseurs, avec une chaîne décisionnaire ou un circuit de distribution court pour le sourcing, ceux qui ont des stocks européens en « back-up » pour éviter les ruptures en Asie… Ils ont montré leur capacité à rebondir vite au plus fort de la crise, plus vite que d’autres c’est certain.
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Quelles sont les perspectives pour TMD en 2021 ?
C. De V. : Dans un premier temps, nous sécurisons nos fondamentaux pour les clients, c’est crucial ! Ce qui veut dire assurer la distribution pour nos clients et leur proposer de nouveaux produits et gammes Textar, Mintex et Nisshinbo. Nous avons ainsi lancé 500 nouvelles références en pleine année Covid afin d’être totalement à niveau en termes de couverture de parc pour 2021. C’était une priorité. Nous l’avons fait. Ensuite, nous avons deux projets majeurs avec Bendix et GaraShield ! Pour le premier, nous avons obtenu la licence exclusive de la marque pour les dix prochaines années ! Dès avril 2021, nous lançons deux gammes de 1500 références en friction et en disques avec une couverture de parc la plus élevée d’Europe. Nous démarrons avec la France, l’Italie, l’Espagne, le Portugal et le Benelux. Bendix vient se loger dans notre portfolio TMD, sur le segment du Medium Plus, juste entre nos marques historiques Texta (Ultra Premium), et Mintex (milieu de gamme). Bendix by TMD Friction est actuellement présentée à nos clients distributeurs.
Parlez-nous de GaraShield ?
C. De V. : Nous sommes actionnaire et distributeur exclusif pour l’Europe de cet outil développé par la start-up anglaise GaraShield. Il s’agit d’un logiciel intégré à une tablette, permettant au réceptionnaire d’atelier de scanner la plaque d’immatriculation, lister les opérations, prendre des photos et des vidéos de chaque étape de réparation ainsi que les pièces changées, et de transférer le rapport au client final comme gage de preuve et de bonne foi. Tous ces éléments sont stockés dix ans sur le Cloud pour l’historique du véhicule en cas de vente. Ce process fait gagner 12 % de productivité aux ateliers qui ont ainsi une carte supplémentaire pour séduire les grands comptes et leurs flottes, les compagnies d’assurance... Une quarantaine de garages sont déjà équipés en Angleterre, en mode « Pay Per Use ». L’atelier achète la solution 1,50 € et refacture 2 € au client final. C’est une sécurisation du travail des pros – aucune protestation possible – et le client repart, certain du travail accompli. Nous sommes fournisseurs à 99 % en produits de friction, c’est vrai, mais nous devions compléter notre offre avec du service et cet outil digital révolutionnaire nous propulse dans le XXI siècle. Nous avons démarré la présentation de l’outil à la distribution traditionnelle européenne (LKQ, GPC…) ou les ITG (Nexus, Temot, GAUI…) et tous se montrent convaincus de sa pertinence. D’autant que GaraShield s’intègre facilement dans leurs propres systèmes et leurs menus. Je précise qu’il n’y a pas de commandes de pièces dirigées vers nos propres interfaces…
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Quels acteurs nouveaux pourraient émerger sur le terrain de la pièce ?
C. De. V. : Il y a une tendance forte sur les agrégateurs de devis sur lesquels le client fait également sa prise de rendez-vous en ligne. Les plateformes digitales comme Who Can Fix My Car en Angleterre, Caroubi en Allemagne… sont devenues des pivots dans la réparation. Ce ne sont pas que des Trip Advisor pour les ateliers. Ils proposent également des prestations complètes avec prix fixe, les opérations listées… Et ces acteurs deviennent prescripteurs des pièces en aftermarket. Je pense que l’impact sera réel et concret dans les cinq prochaines années sur l’après-vente en Europe.
Selon vous, où se trouvent les gisements de croissance pour la pièce de rechange ?
C. De. V. : On parle beaucoup de l’Asie-Pacifique par exemple et de l’Amérique Latine…Nous préparons TMD dans ce sens. Nous avons eu la plus grosse croissance en Amérique Latine, dont le Brésil. Le Covid a fermé les frontières et a impacté les taux de change, donc nos usines locales ont pu être ultra-compétitives par rapport aux offres habituellement chinoises, avec des produits Made In Brazil ! Toute l’Asie reste un réservoir de croissance massive pour l’ensemble des acteurs de l’aftermarket, c’est évident, avec une compétitivité sans borne et une multitude d’applications à gérer. Notre enjeu, c’est de croître plus vite que le marché. Nous sommes des petits poucets en Asie. D’ailleurs, l’ensemble des acteurs européens en freinage ont une part de marché en Asie inférieure à 10 %, hors lignes de produit spécifiques. La preuve, c’est que le seul salon au monde maintenu en 2020, c’est celui de Shanghai en novembre. Et nous y étions.
Justement, la parade du digital, brandie pour compenser la carence des salons physiques, peut-elle perdurer au-delà ?
C. De. V. : Un salon virtuel ne peut remplacer le relationnel établi lors d’un salon réel. Ils sont légion dans certaines zones, comme en Allemagne où des distributeurs tels que Sthalgrüber ou Wesselmüller ont leurs évènements toutes les semaines et toute l’année. Ce sont des institutions ! En revanche, l’ajout d’un salon digital peut être un bon complément, à condition de créer de l’interactivité avec le réparateur, de proposer des vidéos live, des sessions de formation spécifiques, du « gaming », comme un vrai salon. A voir.
Muriel Blancheton
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