[Atlas Europe] Les distributeurs accélèrent sur leur stratégie omnicanal

Caroline Ridet
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E-COMMERCE - L’an passé, un acteur du e-commerce s’étonnait du déni vis-à-vis du poids de la vente en ligne manifesté par l’écosystème traditionnel des pièces de rechange. Message reçu ! En 2018, ces derniers ont, semble-t-il, pris la mesure des 10 à 15 % de parts de marché et du caractère incontournable du canal Internet.
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Aura-t-il suffi que le curseur, jusque-là placé ostensiblement sur le consommateur-automobiliste, se déplace sérieusement vers leur clientèle des réparateurs qui représenterait près d’un
e-acheteur sur deux de pièces en ligne ? Ou que de nouveaux arrivants – à l’instar du concept Otop en France lancé par des ex-cadres de Doyen - les obligent à réagir ? « Les plus gros e-players d’Europe ont vite compris que le réparateur achèterait en ligne ses pièces, mais uniquement en premium. Alors tous déploient du service associé », décrit Sylvie Layec (TMD). Exist.ru en Russie, ou encore le Français Mister-Auto, racheté par PSA et aujourd’hui présent dans 19 pays, jouent clairement cette carte. L’Allemand Autodoc (254 M€ en 2017), qui couvre 24 marchés européens, annonce encore un business réalisé à 90 % avec les particuliers, mais son business plan pourrait bien évoluer. Enfin, le cas du Français Oscaro, pionnier européen de la vente de pièces en ligne qui a bousculé sérieusement son marché sans jamais mettre en place un service dédié aux professionnels. Mais quelle sera la stratégie du site qui annonce 320 M€ de CA, après son sauvetage en novembre dernier par PHE (ex-Autodis) ? Le leader du marché français va-t-il conserver la ligne stratégique orientée ventes à particuliers ou bien succomber à la tentation d’aller puiser son redressement chez les professionnels ? Une position qui serait difficile à tenir face à ces partenaires distributeurs. En attendant, le Français va devoir redresser les comptes et faire passer les frontières à ce bel outil digital, à l’instar de Mister-Auto ou d’Autodoc. Ce rachat considéré par certains contre-nature et d’autres comme un « joli coup » va-t-il contraindre les deux autres leaders européens à accélérer leur stratégie digitale ? Du côté d’Alliance Automotive Group, on regarde le sujet avec prudence sous la forme « wait and see », tout en reconnaissant que son actionnaire principal GPC est actuellement en test d’un site de commerce en ligne sur les marchés américains. LKQ Europe ne fait pas non plus mystère d’avoir accéléré sur la question en partant de l’expérience de sa filiale britannique d’Euro Car Parts. Car la question - Internet, y aller ou pas - ne se pose plus !
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L’e-shop incontournableToutes ces initiatives et des parts de marché qui grimpent sur la pièce en ligne ont amené les acteurs à se lancer dans des stratégies omnicanal. À l’est de l’Europe, la commande en ligne est depuis longtemps la norme avec le Russe Exist.ru. Toujours en Russie, Norauto, la chaîne française de centres autos, vient d’ouvrir à Moscou sa boutique de vente en ligne. Ou encore Inter Cars, qui s’appuie sur la commande en ligne pour tous les marchés où le leader polonais dispose d’une logistique et est à la tête du site Motointegrator. À l’Ouest, l’Allemand Kfzteile24 (format phygital avec trois points de vente) et le Britannique ECP (70 % des commandes passent par le site) ont également réussi à installer leur site sur leur territoire, mais sans positions significatives ailleurs. Et au niveau local, de plus en plus de grossistes font de leur outil de commande en ligne un levier de fidélisation pour leurs clients garagistes. Jusqu’à certains équipementiers qui envisagent de créer leur e-shop pour pousser leurs produits sur les marchés où leurs marques ne sont pas présentes. SKF devrait annoncer un projet dans le courant de l’année. C’est donc fait : l’outil est devenu un incontournable dans le business de la pièce de rechange.
Amazon rebat les cartes…Et si quelques sceptiques s’interrogent sur la viabilité du modèle « il faut faire 148 Md€ de business pour 2 % de rentabilité ! », les acteurs de la pièce de rechange semblent décidés à prendre leur destin digital en main. D’autant que plane toujours sur l’Europe la crainte qu’Amazon, qui capitalise 60 % des recherches de pièces aux États-Unis, ne réussissent à imprégner le business de la pièce. Une menace qui semble d’autant plus se rapprocher que son offre calibrée pour les professionnels Amazon Business est en plein déploiement. Alors si chez Amazon, on affirme que les pièces proposées ne sont pas là pour servir les potentiels réparateurs connectés mais l’artisan du bâtiment ou autre souhaitant entretenir lui-même sa flotte, on sent que l’argument pourrait ne pas tenir longtemps. Autre indice : aux États-Unis, il a élargi son offre aux pièces techniques. Et il se dit qu’il serait prêt à en faire de même sur l’Europe en 2020, avec des accords déjà signés pour un catalogue à un million de pièces !
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… Alibaba s'engageAutre géant du Net qui regarde avec intérêt le business auto : le Chinois Alibaba qui a décidé d’accélérer en s’alliant au distributeur Zhejiang Jingu Co, spécialisé dans les pièces GM, Volkswagen et Ford. Ils vont pousser l’entité Carzone, qui a levé 50 M$ cet été, dans lequel Alibaba est l’actionnaire principal. Grâce à cette alliance, le dispositif devrait permettre d’intégrer à la plateforme plus de 80 000 fournisseurs. Bénéficiant de près de 600 entrepôts répartis dans tout le pays, la nouvelle société promet de fournir des pièces de véhicules à quelque 70 000 ateliers de réparation de voitures en 30 minutes dans un rayon de 5 kilomètres. Il y a clairement donc urgence pour nos acteurs européens de muscler leur défense !Caroline Ridet
Caroline Ridet
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