[Atlas Europe] Sogefi,« Les règles du jeu sont les mêmes, seules les tailles critiques ont changé »

Muriel Blancheton
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Zepros : Quelle est votre analyse sur l’évolution du marché de la pièce ?Françoise Blais : Nous sommes à la croisée des chemins pour l’aftermarket car le marché est en ébullition entre les concentrations d’acteurs, les changements de consommation des clients (passant de l’achat à l’usage), et l’apparition de nouveaux business models. Les Américains – équipementiers et distributeurs - ont fait une percée sur le sol européen puisque leur marché domestique est de plus en plus tendu. Ils consolident leurs positions et trouvent de nouveaux relais de croissance. C’est très intéressant de constater que ces acteurs viennent dans la Vieille Europe pour rebondir tandis que nous-mêmes, Européens, cherchons des leviers ailleurs, en Chine par exemple. Preuve que le Vieux Continent est encore dynamique avec de belles perspectives de croissance.
Quelles sont-elles ?F. B. : La croissance se jouera encore sur les pièces de rechange (2 à 3 %), mais surtout via les nouveaux services forcément liés au digital. En BtoC, je pense à l’information du consommateur, la maintenance prédictive et préventive. En BtoB, nous avons vu l’émergence des plateformes connectées comme sur le pneumatique par exemple. Le digital est un accélérateur de services que nous devons faire valoir auprès des distributeurs. La filtration n’échappera pas, à terme, à la vague de la connectivité avec des pièces « connectées », pour identifier le niveau d’usure des filtres par exemple. Les informations seront renvoyées au cockpit du véhicule, au constructeur ou sur une plateforme, permettant à chacun de proposer de nouveaux services. Nous avons une compréhension des évolutions à venir en aftermarket car nous avons un ancrage OE très fort avec des plateformes de production aussi bien pour des véhicules milieu de gamme grande série que des véhicules premium, donc dotés des dernières technologies.
Quel est votre dispositif OE et IAM ?F. B. : Sogefi a réalisé 1,6 Md€ de CA en 2017, et 1,2 Md€ de ventes sur le premier semestre 2018. Nous avons renforcé nos capacités OE en Inde et en Chine, car ce sont des zones de croissance incontournables. Mais nous avons également investi au Maroc, à Tanger, avec une nouvelle usine pour accompagner les constructeurs, notamment français, dans leur déploiement sur ces territoires. C’est une zone de proximité sur laquelle nous nous positionnons car l’Europe est un levier, même sur des marchés dits matures. Il y a un focus sur l’Est et des prédictions de croissance à 6 %. Pour l’heure, nous adaptons nos productions selon les régions. Nous construisons nos gammes pour répondre aux besoins du parc circulant. Nous les complétons pour satisfaire les différentes typologies du consommateur : qualité, durée de vie… Fram®, Purflux et Tecnocar répondent à des besoins premium, et sur certaines régions Coopers Fiaam est positionné pour d’autres besoins. L’ensemble est soutenu par de la logistique ad hoc. C’est le nerf de la guerre en IAM : une pièce disponible et livrée au bon moment. Nous recevons 90 % de nos commandes de manière informatisée, nous permettant une meilleure gestion des flux et un bon taux de service. Nous avons ouvert cette année un dépôt en Russie, sur la zone de Moscou, pour compléter notre dispositif et couvrir au mieux certaines zones géographiques. Cela nous permet d’avoir une réponse immédiate sur un marché aussi important, de facturer localement. Tous nos produits partent de deux entrepôts principaux en France et en Pologne, avec des relais de proximité depuis l’Espagne, l’Angleterre et à présent la Russie. Nous avons en moyenne un taux de service de 96 %. Nous pouvons servir tous les pays aussi bien en petites quantités très fréquemment ou en plus gros volumes de manière plus ponctuelle. Ce qui fait la différence : nous nous adaptons à chaque typologie de clients, cross docking, flux tendus, etc.
Comment envisagez-vous le BtoB online ?F. B. : C’est une bonne chose car cela signifie que l’aftermarket rejoint la tendance du retail ! Il y a une mixité des canaux digitaux et physiques, de l’OES avec l’IAM… Au-delà du digital, les frontières tombent officiellement alors qu’elles étaient déjà floues depuis une dizaine d’années, avec notamment le dépannage – estimé à 20 % des volumes de flux – entre OES et IAM pour fournir la pièce en proximité. Le digital accélère le floutage des lignes et dynamise le canal de distribution en tirant un fil jusqu’au consommateur final.
Que pensez-vous de l’arrivée de PSA sur le terrain de la pièce ?F. B. : PSA est un partenaire historique de Sogefi en OE. Donc nous sommes en toute logique partenaire de son dispositif en IAM. Nous sommes dans une logique multicanal et multipartenaires, sans zone d’exclusivité. Chaque nouvel entrant est une opportunité supplémentaire pour nous. Renault est également arrivé sur ce terrain, d’une autre manière mais il est tout de même présent. En Angleterre, ce sont des groupements de constructeurs qui proposent des pièces OE à leurs réseaux et une gamme plus large pour les autres. Aux États-Unis, l’IAM représente 70 % du marché. Ils vont logiquement décliner leur savoir-faire historique en Europe. Il y a beaucoup d’initiatives sur le marché. C’est un monde qui bouge.
La concentration vous a-t-elle contraint à réorienter votre stratégie ?F. B. : Cela n’a jamais été une contrainte, c’est une vigilance depuis toujours et pour tous les acteurs. À partir du moment où la politique de l’équipementier s’est sans cesse adaptée à chaque client avec une logique tarifaire équitable, les impacts des mouvements de concentrations sont maîtrisés. Il y a un niveau de professionnalisation supérieur, ce qui est une bonne chose. Les règles du jeu sont les mêmes, seules les tailles critiques ont changé. Le travail de gamme, de logistique, d’innovation, du service commercial, de l’animation, des promotions… sont autant de facteurs clés favorisant votre relation avec le distributeur, quelle que soit sa taille. Nous sommes présents chez la quasi-totalité des majors, nous n’avons pas de craintes particulières. De manière générale, on dit qu’il faut embrasser les changements. Business as usual. Celui qui va gagner, c’est celui qui offrira le meilleur service.Muriel Blancheton
Muriel Blancheton
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