MARCHÉ
Sur les dix premiers mois de l’année, les ventes de voitures neuves sur le marché britannique ont affiché une baisse de 7,2 % sur un an, à 2,064 millions d’unités. En octobre, elles ont tourné au ralenti avec des immatriculations en baisse de 2,9 % sur un an, à 153 599 véhicules, après un recul de 20,5 % en septembre, dû aux nouvelles normes antipollution plus strictes en Europe (WLTP). Les experts évoquent un chaos général autour de la fiscalité automobile, les changements réglementaires et la confusion autour du diesel ont pesé sur le marché. Le Royaume-Uni a décidément traversé 2018 comme un tunnel sans fin. Car le sujet principal demeure le Brexit, au cœur de toutes les crispations. Si les acteurs européens sont tous dubitatifs et dans l’expectative du 29 mars 2019, date de sortie du pays de l’UE, les professionnels britanniques ont endossé le rôle de lanceur d’alerte. À commencer par les industriels.
Les constructeurs inquietsLes marques anglaises (Mini, Jaguar/Land Rover, Range Rover, Bentley, Rolls-Royce) rappellent qu’elles appartiennent à des constructeurs allemands et indiens. Nissan, Toyota, Honda, BMW… ont investi dans des sites de production. La quinzaine de constructeurs implantés sur le sol britannique exportent 90 % de leur production en Europe et soulignent l’inévitable perte de compétitivité de leurs usines puisqu’ils importent 56 % des pièces depuis le continent, leur permettant d’optimiser les coûts, les stocks et les délais de production. « Il serait illusoire de vouloir mettre fin à ces échanges en produisant sur place tous les composants : le marché local est trop petit pour justifier de tels investissements. Les constructeurs finiront invariablement par délocaliser en Europe leurs usines », a prévenu Christian Stadler, professeur de stratégie économique, spécialisé dans l’industrie automobile. La sortie de la zone euro, et plus précisément de l’union douanière, imposerait également un droit de douane de 10 % sur chaque voiture assemblée au Royaume-Uni et de 3 % pour une pièce. Autres craintes : la fin de validité du titre d’homologation communautaire pour traverser l’Union européenne malgré l’accord provisoire et des délais trop longs au bureau de douane, ralentissant l’activité.
Pessimisme ambiant…L’industrie pointe les 800 000 emplois menacés dans son secteur, et le marché de la distribution de pièces et de la réparation n’est pas plus optimiste : hausse du coût des pièces de rechange importées (donc taxées), alourdie par les variations monétaires et répercutée sur le client final, des financements – très calibrés sur le marché UK – moins alléchants, des clients rebutés par la flambée des prix jusqu’à la peur des ateliers de voir partir leurs techniciens d’origine étrangère, contraints par de nouvelles lois sur l’immigration. Enfin, des craintes apparaissent sur la disparition possible sur l’île de l’obligation européenne des constructeurs de laisser un libre accès à leurs informations techniques. Et de voir avec elle la disparition du libre choix du réparateur. La profession souligne à son tour les 40 000 professionnels indépendants écartés de leur marché. Un vrai tsunami.Muriel Blancheton