Transformations globales à l'œuvre dans la réparation-collision
Malgré des contraintes économiques et environnementales qui poussent à toujours plus d’économies de produits, le marché de la carrosserie-peinture a de belles années devant lui.
Selon des chiffres avancés par le média spécialisé Coatings World, le marché des produits de peinture automobile devrait atteindre 17,79 milliards de dollars d'ici 2032. L’Amérique du Nord devrait préserver son leadership mondial en raison du taux élevés de détention de véhicules et d'investissements substantiels dans les technologies par les principaux fabricants mondiaux, trois des six leaders globaux étant Américains. Cependant, le secteur de la réparation-collision fait désormais l’objet de convergences notables au niveau mondial. D’abord parce que le parc roulant ne fait que croître partout sur la planète. Et ce n’est pas fini !
Selon les chiffres de l’entreprise d’information économique IHS Markit, cités par le cabinet d’études GiPA durant l’IBIS Global Summit de Rhodes en mai dernier, le nombre de véhicules en circulation ("Vehicles in operation" – VIO) sera passé de 1,36 milliard à 1,64 milliard entre 2019 et 2030. L’essentiel de cette croissance est porté par l’Asie-Pacifique, dont le parc aura augmenté de 3,1 % durant ce laps de temps, devant la zone Moyen Orient & Afrique (MEA) avec une progression d’1,4 %. Près du double de l’Amérique du Nord, du Sud et de l’Europe, toutes trois à +0,8 %. Un parc mondial qui gonfle mais aussi qui vieillit de manière généralisée : même en Chine, où l’âge moyen des véhicules n’était que de 4,2 ans en 2019, il devrait être de 6,8 ans en 2026. Un marché chinois fortement électrifié, compte tenu de l’extrême spécialisation des constructeurs nationaux dans ce type de motorisations.
L’opportune sinistralité des véhicules électrifiés
Qui dit parc plus étoffé dit parc potentiellement plus accidentogène. Et avec l’électrification à l’œuvre sur certains marchés – Extrême-Orient et Europe occidentale en particulier – des opportunités supplémentaires se créent pour les acteurs de la carrosserie. Toujours selon GiPA, qui prend le marché français pour exemple, le taux de rayures/accidents enregistré par les véhicules électriques aux cours de l’année 2023 (18%) est un peu supérieur à la moyenne du parc automobile total. 42% du total de ces sinistres ont été déclarés à leur assureur par les propriétaires des véhicules, soit 6 points de plus que le parc automobile total français. Et les réparations ont eu lieu à plus de 60 % dans les réseaux constructeurs.
Les ateliers de marque, d’ailleurs, voient dans la croissance du parc électrifié une belle opportunité de relancer ou de faire croître leur activité carrosserie. Surtout quand ces VE promettent beaucoup moins de prestations de mécanique. D’où une tendance, au sein de l’OES, à se doter de carrosseries centralisées ou à racheter d’autres ateliers, même si, dans la plupart des cinq grands marchés d’Europe occidentale, les ateliers indépendants sont plus nombreux que les ateliers agréés constructeur.
Concentration toujours à l’œuvre
Un phénomène de concentration qui n’est pas sans rappeler celui à l’œuvre depuis plusieurs années côté distribution. Le renforcement des distributeurs spécialisés dans la peinture par croissance externe est un phénomène majeur qui a conduit, en Amérique du Nord, à la naissance de mastodontes tels que Wesco, National Coatings & Supply (NCS) ou à la consolidation de l’activité peinture de LKQ par le rachat de FinishMaster en 2023. Mais si la distribution de peinture européenne connaît moins ce phénomène, les entreprises de carrosserie, elles, y sont de plus en plus sujettes.
Comme le rappelait le cabinet d’études ICDP lors du Parts Aftermarket Congress de Rome, en novembre dernier, le nombre de carrosseries dans les quatre principaux marchés d’Europe occidentale – Allemagne, France, Royaume-Uni, Italie – a baissé considérablement en quinze ans. Et l’appartenance à des groupes croît. Au Royaume-Uni, Steer Automotive Group compte environ 170 sites, FMG Services Repair, 65, et Gemini, 34. En Italie, CarClinic dépasse les 50 centres. Les carrossiers indépendants, eux, ont tendance à rejoindre des réseaux constitués par des groupements de distribution, des fabricants de peinture ou des apporteurs d’affaires.
Les 5 plus grands réseaux d’Europe occidentale sont désormais Auto Presto & Bene en Italie (3200 sites agréés par Unipol-SAI), Acoat Selected dans plusieurs pays (1350 carrosseries dont 430 en Espagne), les enseignes d’Axalta telles que Repanet ou Five Star (plus de 1200 carrosseries), AD Carrosserie en France (près de 800 ateliers) et Vizion au Royaume-Uni (plus de 750 adhérents). Des chiffres qui s’approchent voire dépassent désormais ceux des grands réseaux nord-américains comme Fix Auto, ProColor Collision, Caliber Collision ou Carstar. Une quasi nécessité pour rester en phase avec les exigences techniques et environnementales croissantes du marché.
Montée en compétences exigée
Car voilà deux éléments-clé du phénomène de convergence sur le marché de la réparation-collision, d’un continent à l’autre. Sur un parc mondial certes vieillissant mais toujours mieux équipé pour la sécurité, compte tenu du nombre d’ADAS plus nombreux, fournir à ses adhérents ou à ses clients une solution matérielle et technique pour la recalibration et la remise en peinture est indispensable. AkzoNobel, Axalta ou BASF Coatings ont tous développé au cours des douze derniers mois des offres de produits et services destinés à réussir les formules appropriées pour ne pas perturber les capteurs et radars cachés derrière les éléments à repeindre.
L’apport des appareils de mélange automatisé (Axalta Irus Mix, PPG MoonWalk, Alfa CR4/6) et des solutions logicielles afférentes y contribue également. La plupart des fabricants premium et leurs challengers ont par ailleurs renforcé leurs process durables, même si tous les marchés n’avancent pas à la même vitesse sur le sujet. GiPA précisait, à titre d’exemple, que 75 % des carrossiers britanniques considèrent comme important d’être labellisés comme ateliers responsables ou dotés d’une politique RSE concrète. Une condition sine qua non pour redevenir une profession attractive auprès des jeunes générations, dont le recrutement est plus que jamais décisif pour palier à la pénurie de main d’œuvre dont souffrent les entreprises de carrosserie partout dans le monde.
Read the English version here: "Collision repair: a market undergoing global transformation"