A. Hamilton, LKQ Europe : « Construire la structure d'un véritable leader du marché»

Caroline Ridet
Image
HAMILTON Andy LKQ

Un peu plus d’une décennie après son arrivée en Europe, LKQ pose les bases d’une expansion continue et du développement de nouveaux services et canaux. Objectif : consolider avant de poursuivre son déploiement.

Partager sur
Un an après avoir pris la direction de la structure européenne, quelle est votre feuille de route ?

Andy Hamilton : Nous venons de conclure notre dernier plan triennal. Nous devions redéfinir, optimiser et harmoniser la structure de LKQ Europe, après avoir regroupé plus de 80 acquisitions depuis 2011. La rationalisation autour de cinq grandes régions « Europe » a été essentielle pour cela. Nous avons mis en place des équipes européennes centralisées en charge de dix fonctions support. Cette équipe interagit avec nos cinq régions en établissant un standard cohérent, que nos régions peuvent adapter selon leurs besoins spécifiques. Pour y parvenir, nous transformons et consolidons le back-end de l’entreprise en standardisant les outils (y compris un nouvel ERP), les méthodes de travail, etc. Nos processus et outils standardisés sont opérationnels en Italie et en Suisse, où ils fonctionnent bien. Nous allons maintenant accélérer cette consolidation, car moins de 10 % de nos activités européennes sont alignées. D’ici fin 2025, nous prévoyons que les processus harmonisés seront utilisés par un tiers de nos entreprises, et d’ici 2027, par les trois quarts.

Cette consolidation est-elle réellement nécessaire ?

A. H. : Si nous voulons poursuivre notre expansion géographique et développer de nouveaux services et canaux, nous ne pouvons pas nous contenter de créer de nouvelles entreprises avec leurs propres structures organisationnelles, systèmes, marques et portefeuilles de produits. La consolidation et l’intégration sont essentielles pour poursuivre notre croissance et nous permettent d’offrir un service cohérent.  Pour y parvenir, nous avons lancé cinq grands projets de transformation, tous complémentaires les uns des autres. Et il ne s’agit pas seulement des systèmes, mais aussi des marques, du portefeuille de produits, etc. Au cours des quatre prochaines années, nous parviendrons à un modèle opérationnel cible qui nous aidera à poursuivre notre croissance en Europe. C’était donc absolument essentiel.

Votre maison-mère américaine a annoncé un renforcement de la vigilance sur les acquisitions. Pourquoi avoir cédé vos actifs en Pologne, Bosnie et Slovénie ?

A. H. : Nous sommes présents sur 18 marchés et nous sommes leader en Europe. Mais alors que nous sommes numéro un sur 10 de ces marchés et dans le top 5 sur d'autres, nous sommes en dehors du top 10 dans certains pays, dont la Pologne. Vendre à Meko en Pologne [NDLR : LKQ détient 26 % du capital de la société scandinave] nous a permis de regrouper nos activités [NDLR : chiffre d'affaires consolidé de près de 400 M€] et de gagner une place dans le top 5... et donc d'être plus compétitifs. La même logique s'applique à la Slovénie et à la Bosnie où, compte tenu de la taille relativement petite du marché, il aurait été disproportionné d'investir pour devenir leader du marché. Ces trois cessions sur des marchés où nous n'avions pas la taille nécessaire étaient donc stratégiques.

Votre position vous convient-elle en France ?

A. H. : Nous avons doublé notre portefeuille français au cours des trois dernières années et poursuivons notre développement. Nous avons beaucoup investi en France et nous allons continuer à le faire, car la France est un marché prioritaire pour nous. Mais avant de pouvoir accélérer davantage, nous devons nous concentrer sur la transformation, et notamment sur le déploiement complet de nos processus harmonisés et de notre nouvel ERP.

Quid d’une implantation sur le marché ibérique ?

A.H. : Au Royaume-Uni, les cinq premiers distributeurs représentent plus de la moitié du marché de l’après-vente, tandis que les cinq premiers en Espagne représentent environ 5 % ! Pour prendre pied de manière significative sur un marché aussi fragmenté, il nous faudrait acquérir une organisation déjà intégrée. Nous n’en sommes pas encore là, mais nous continuons à étudier le marché ibérique.

Que se passe-t-il en Belgique ?

A. H. : Nous souhaitons – et devons – rationaliser notre logistique, faire de notre centre de distribution central aux Pays-Bas [NDLR : LKQ Fource à Rotterdam] le hub de notre logistique dans les pays du Benelux. Aux Pays-Bas, nous avons désormais transféré toutes nos activités vers notre nouveau hub, qui a la capacité et les moyens de desservir aussi bien la France que la Belgique. Et cela présente de réels avantages pour nos clients en termes de profondeur de gamme et de disponibilité. C'est pourquoi nous travaillons avec les comités d'entreprise et les syndicats en Belgique pour voir comment nous pouvons maintenant optimiser notre logistique dans ce pays.

Vous avez surpris le marché avec le lancement d’Emotive, société autonomisée regroupant vos marques. Comment positionnez-vous cette nouvelle structure vis-à-vis de vos clients historiques et membres LKQ Europe ?

A. H. : Emotive est une entité distincte qui regroupe des marques bien établies que nous avons fusionnées au fil de nos acquisitions, les rendant ainsi plus visibles, accessibles et connectées. Nous souhaitions étendre notre portée sur les marchés européens auprès des distributeurs qui étaient déjà clients de ces marques, sans être ni filiales ni membres de LKQ. Avoir accès à ces marques de rang 2 et 3 est particulièrement stratégique compte tenu du vieillissement continu du parc. Dans ces circonstances, nous pensons qu’Emotive a un grand potentiel de développement. Notre premier objectif est de soutenir les ateliers indépendants, qui génèrent notre activité, en leur offrant des services et des produits de grande qualité et à forte valeur ajoutée, adaptés à leurs différents besoins.

LKQ Europe a également repensé son portefeuille de produits associés et de services à valeur ajoutée. Pouvez-vous nous en dire plus ?

A. H. : Au-delà des concepts d’ateliers qui sont essentiels pour nous, nous aidons les garages à être visibles sur le plan digital. Il est essentiel pour eux d’accroître leur visibilité et leur attractivité auprès des consommateurs. L’autre pilier essentiel est la capacité à intégrer les nouvelles technologies, ce qui implique d’accroître les compétences par la formation et le matériel adéquat. Il faut savoir que les trois quarts des travaux refusés par les garages indépendants le sont par manque d’outillage et de compétences pour effectuer le travail ! Et l’écart se creuse sans cesse. C’est pourquoi nous investissons massivement dans la formation via la LKQ Academy. Nous disposons aujourd’hui de 360 sites (couvrant quatorze langues) et nous nous sommes engagés à former 24 000 techniciens dans toute l’Europe à la réparation de véhicules hybrides et électriques d’ici 2028.

LKQ Europe a lancé un concept dédié aux véhicules électriques, Moobi. Comment vous positionnez-vous sur ce marché naissant ?

A. H. : Nous constatons une lente progression de la pénétration du véhicule électrique, alors que le marché anticipait un déploiement plus rapide en Europe. Cependant, sa pénétration est beaucoup plus rapide sur l’Europe du Nord. Notre partenaire Meko en Norvège [N.D.L.R. : 26 % de taux de pénétration VE) constate que son activité ne subit pas d’impact négatif du fait de cette électrification du parc. Le freinage, la direction, le châssis, la suspension et les pneus sont plus sollicités qu'un véhicule à moteur à combustion interne normal. Ce qui génère donc du business. La réparation mécanique offre de réelles opportunités et pourrait même être plus élevée, tandis que l'entretien change pour s’articuler autour des diagnostics… Nous devons donc nous adapter pour répondre aux besoins des marchés où les VE seront quasiment absents et les autres plus électrifiés. Ainsi, lors les parcs VE augmenteront partout, nous serons prêts.

Quel atterrissage 2024 ? Et la suite ?

A. H. : Nous sortons d’un environnement très inflationniste, mais de nombreuses entreprises subissent encore une pression sur les coûts. Dans ce contexte compliqué, je me réjouis que LKQ en Europe ait enregistré une croissance positive sur un an au premier semestre [ndlr : +1,5 %, avec un chiffre d’affaires estimé à 3,2 Md$ pour les six premiers mois de 2024] et que nous soyons en bonne voie pour réaliser notre business plan. Pour l’avenir, nous prévoyons de continuer à croître au cours des trois prochaines années… et de surperformer le marché. Nous prévoyons également d’améliorer notre rentabilité de 20 à 40 points de base sur cette période.

Caroline Ridet
Partager sur

Inscrivez-vous gratuitement à nos newsletters

S'inscrire