Plateformes : Toujours plus chère disponibilité
Largeur, profondeur de gamme… Les stocks se sont démultipliés pour suppléer aux ruptures de supply chain des équipementiers. Et dans ce sport de haut vol qu’est la recherche de la pièce, les plateformistes s’affirment comme un rouage vital.
Une évidence en 2022, où les ruptures associées à une inflation historique du prix des pièces ont mis à mal les promesses de livraison “just in time” et restent une réalité – bien qu’en phase d’amélioration – sur ce premier semestre 2023. « Aujourd’hui, lorsque les fournisseurs annoncent un taux de service à 80 %, c’est bien. Avant, à moins de 98 % ils se faisaient taper sur les doigts », remarque un brin désabusé Laurent Brutinel, président de l’Agra.
Donc pas de mystère : pour tenir ses promesses au réparateur d’un niveau de service au-dessus des 98 %, la distribution doit continuer à anticiper et donc à stocker lourdement. « Mais ceux qui ont se sont aventurés à surstocker sans limite par peur de manquer ont également pris des risques. Car aujourd’hui, avec une inflation qui se calme, ils se retrouvent avec des pièces payées trop cher. » Certes, mais pas facile de trouver le bon curseur lorsque l’impératif de la disponibilité est au cœur du système. « On ne peut pas faire d’économie sur la disponibilité. Car quand vous livrez en H+2/H+4, vous ne pouvez pas mentir : soit vous avez, soit vous n’avez pas ! », remarque Jean-Christophe Barhelet, directeur général d’Exadis, qui surveille la rotation des stocks comme le lait sur le feu. « Nous avons toujours stocké beaucoup mais de façon raisonnable pour avoir la disponibilité qui est fondamentale », note Frédéric Gaillard, DG des activités de distribution VL Autodistribution. Une position qui peut être tenue car « les trois quarts de nos flux passent par les plateformes, qui continuent de faire efficacement tampon face à d’éventuelles ruptures d’équipementiers qui ont toujours des taux de service sous la barre des 65 % ».
Maillage finalisé
Le combo hub central et entrepôts régionaux des groupements restent plus que jamais gagnant. Autodistribution/PHE dispose du dispositif le plus abouti avec Logisteo en central et les sites ACR en régional. AAG a aussi bien maillé les territoires mais il lui manquait un hub pilote. Ce sera chose faite en 2024 avec sa plateforme First. Les autres groupements ont suivi la même voie de couverture de l’Hexagone. Alternative Autoparts et ses treize plateformes régionales, l’Agra qui a ouvert son huitième entrepôt Drop et LKQ France qui vient d’ouvrir son septième dépôt régional, annoncent tous un maillage bouclé. Les organisations sont en place, « maintenant il faut qu’elles déroulent ». Et sur un modèle différent et ouvert plus largement aux distributeurs depuis deux ans, la plateforme Exadis assure également une couverture nationale efficace.
Les indispensables indépendants
Mais si l’attelage plateforme centrale et relais régionaux remplit son office de capillarité, il ne suffit pas à répondre à l’intégralité des demandes. Pour preuve, le recours généralisé au dépannage auprès de ces plateformes indépendantes que tout le monde vouait à la disparition avec la montée en puissance des logistiques de groupements. Ces acteurs d’un troisième type ne sont effectivement aujourd’hui plus qu’une poignée… Et pourtant, dans nos nombreux échanges avec les distributeurs (pour ce journal mais aussi tout au long de l’année), ils admettent avoir toujours – et plus que jamais ces deux dernières années – recours à ces dépanneurs « de génie » ! « Les plateformes de nos groupements ne suffisent pas à absorber le choc des ruptures. Les indépendantes ont encore de beaux jours devant elle car elles restent d’incontournables dépanneurs pour nous distributeurs », salue un distributeur souvent « sauvé » par ces voisins utiles ! « Ils sont à l’écoute de nos besoins. Dans ces plus petites structures, les équipes, voire le patron, se mettent en quatre pour nous trouver rapidement… le mouton à cinq pattes. » Car ces plateformes indépendantes (Apprau, GPI, Est Entrepot) cultivent leur position de fournisseurs indispensables de « ce que les autres n’ont pas », revendique Jean-Luc Picard, patron d’Est Entrepot. À en croire les progressions de business qu’ils cumulent depuis des années, cette approche du taux de service à tout prix fonctionne à merveille.