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TMD Friction quitte Nisshinbo pour Aequita
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Petit coup de tonnerre estival dans l'univers du freinage : TMD friction, détenu depuis 2011 par le japonais Nisshinbo Holdings, vient d'être revendu au fonds d'investissement allemand Aequita. Le freineur aux 763 M€ en première monte et en rechange va maintenant se réinventer un destin...
Le communiqué ci-dessus vient tout juste de l'annoncer : après douze ans au sein du groupe japonais Nisshinbo Holdings, TMD Friction vient d’être revendu à Aequita, un fonds d’investissement allemand connu dans l’automobile. C’est notamment lui qui rachetait début 2022 l’activité mondiale d’interfaces électroniques à ZF Friedrichshafen AG (systèmes de changement de vitesse, actionneurs et autres systèmes de commandes dites « haptiques »).
TMD Friction referme ainsi une parenthèse japonaise ouverte il y a douze ans depuis son rachat par le groupe Nisshinbo Holdings en septembre 2011. Après que la crise financière ait failli couler ce leader industriel du freinage englué dans son endettement, il venait de passer deux années au sein d’un autre fonds d’investissement, Pamplona Capital Management, qui l’avait repris en avril 2009, restructuré et ramené à la profitabilité.
Une belle occasion nipponne...
La reprise par Nisshinbo avait évidemment du sens. Le groupe japonais, né du textile en 1907, avait déployé une solide activité freinage de première monte depuis les années 1960. L’apport de TMD lui permettait d’afficher jusqu’à aujourd’hui 30 % de son activité dans ce secteur, derrière l’électronique et les systèmes de communication (46 %) et devant les instruments de précision (10 %).
L’adjonction en 2011 du groupe allemand dessinait donc un solide spécialiste du freinage plus mondial et plus complet que jamais. TMD apportait à la fois ses moyens de production OE et surtout, cette culture et cette présence aftermarket qui sont rarement une option spontanée dans la vision stratégique des entreprises nipponnes...
...mal transformée
Nisshinbo a évidemment permis de consolider le redressement de TMD en investissant dans l'entreprise. Mais une première évidence s'impose toutefois : entre 2010 et 2021, le CA de TMD Friction n’a progressé que de 20 % (de 637 à 763 M€). Une performance toute relative. Pendant ce temps-là, le CA d'un Brembo bondissait de 1,254 Md€ en 2011 à 3,629 Md€ en 2022, soit une progression de... 189 % ! Juste presque dix fois plus que TMD...
Un autre constat pourrait bien expliquer cette faible croissance: si Nisshinbo a racheté l'intégralité de TMD, il n’a jamais entrepris de vraiment “synergiser”, industriellement comme stratégiquement, les deux pans japonais et allemand de son activité freinage. TMD est resté une entité propre, avec les avantages et les inconvénients d'un tel statut. Surtout dans un univers où les marges industrielles et commerciales étant relativement faibles, le volume de production et de vente reste la clé du succès. Pas de “Pricing power” à espérer dans la banalité des produits de freinage...
TMD Friction en "re-devenir"
La stratégie de Nisshinbo ? Aller précisément chercher ce “pricing power” ailleurs. Présent depuis les années 2000 dans l'électronique et les systèmes de communication, il semble bien vouloir se consolider dans ce domaine porteur, lui qui dit sur son site « mettre l'accent sur l'électronique avec l'arrivée de la société de l'information », une réalité tout autant générale qu'automobile.
Dans son communiqué, le groupe japonais précise avoir «désigné les secteurs du sans fil, des communications et de la micro-électronique comme des domaines d'activité clés pour réaliser une société "ultra-smart" et pour améliorer davantage la valeur de l'entreprise grâce à la transformation du portefeuille d'activités». En à peine plus de vingt ans, cette activité pèse d'ailleurs déjà presque 50 % de ses 3,256 Md€ de CA.
Reste donc à savoir ce qu'il adviendra de son activité freinage maintenant allégée des presque 800 M€ de TMD. « La soudaine dégradation du climat mondial force l'industrie automobile à affronter de nouveaux obstacles incluant la réglementation Euro7. Dans ces circonstances, nous sommes arrivés à la conclusion que TMD exige de profondes et soutenues transformations de son activité pour poursuivre sa croissance », explique ainsi Nisshinbo pour justifier la revente de l'équipementier. Mais plus loin dans le même communiqué, le groupe japonais explique vouloir, par cette vente, « renforcer la profitabilité de son business freinage », avec pour objectif de solidifier Nisshinbo Brake « en tant que base de profit du groupe ».
Quoi qu'il en soit, retour donc à la case d'entreprise "en devenir" pour TMD Friction. Aequita n'en étant pas à son premier investissement automobile (IFA, Meteor, Willi Elbe, Tremonia et l'ex-activité de ZF), nul doute que l'investisseur a une vision d'avenir pour l'industriel du freinage. L'équipe d'Aequita a en outre la réputation d'être à la fois humble et performante, elle qui anime un portfolio de 23 entreprises cumulant 1,3 Md€ de CA annuel pour 6000 collaborateurs.
Tout le monde est content
« Cette transaction arrive exactement au bon moment pour TMD. Nous ne pouvions pas avoir de meilleur partenaire qu'AEQUITA, a déclaré David Baines, PDG de TMD Friction, dans un second communiqué. Cela nous offre la meilleure opportunité de gérer notre entreprise de manière indépendante tout en renforçant notre compétitivité, en poursuivant notre propre transformation continue et en élargissant notre position de fournisseur de confiance de solutions de friction de frein à un portefeuille diversifié de principaux équipementiers et fournisseurs de niveau 1, ainsi que la rechange indépendante internationale ».
Il a en outre souligné que L’équipe d’AEQUITA est «bien plus qu’un simple investisseur financier. [Elle] représente le partenaire idéal pour nous aider à bâtir une entreprise beaucoup plus robuste et rentable, ce qui ouvre à son tour de solides perspectives de croissance future».
« Nous pensons que TMD offre un potentiel de croissance important, tant sur le marché des pièces d'origine que sur celui des pièces de rechange indépendantes, a complété Christoph Himmel, associé directeur d'AEQUITA. En collaboration avec l’excellente équipe de direction et les employés de l’entreprise, nous nous efforcerons de concrétiser ce potentiel».
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