Stéphane Gendron (SKF) : « La digitalisation aide à la transmission de l’information aux garagistes »

Caroline Ridet
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Concentration, décarbonation, transmission des données : Stéphane Gendron, directeur Rechange de l'Ouest chez ZKF, nous donne son analyse sur les grands enjeux du marché européen.

Comment s’est comporté le marché sur 2019 ?

Stéphane Gendron : Le marché est dans la lignée de 2018, avec un recul de 2-3 % du business. La concentration joue son effet sur les stocks. Cette année plus que les précédentes, les concentrateurs ont beaucoup travaillé ce levier en recentrant les stocks dispersés des sociétés acquises. Et c’est normal, car cette rationalisation des stocks est l’un des axes de synergies prioritaires des grands « consolideurs ». Donc tant qu’il y aura de la concentration dans la distribution, il y aura un effet sur les stocks.

À l’Est, toujours du nouveau ?

S. G. : Pour SKF, ce sont surtout les marchés de l’Ouest qui ont été porteurs, notamment au Royaume-Uni où nos clients sont en train de monter en stock. Est-ce l’effet Brexit ? En revanche, dans les pays de l’Est, nous avons senti un ralentissement, notamment sur les grosses locomotives que sont la Pologne et la Russie qui ont subi un essoufflement de leur marché. Les gros acteurs ont eux aussi travaillé leur équilibre financier et donc la mobilisation financière sur les stocks. Il faut noter que même dans les pays les moins concentrés (type Espagne), la démarche s’impose.

SKF dans ce paysage ?

S. G. : En se positionnant comme un fournisseur de solutions globales pour le châssis et les moteurs, SKF est dans une bonne dynamique. Le poids lourd a été très porteur chez nous. D’abord parce que nous avons retravaillé nos gammes. C’est une bonne nouvelle pour SKF, qui est le leader incontesté en roulements PL en première monte. Et si en rechange nous n’avons pas les parts de marché attendues, nous sommes en train de nous mettre sur la bonne tangente en phase avec l’OE.

Voyez-vous se poursuivre la concentration des équipements ?

S. G. : SKF est actuellement en mouvement d’acquisitions de nouveaux savoir-faire (et notamment pour l’activité Industrie) dans l’intelligence artificielle et sur l’axe « Green ». Ce sont des ajouts d’autres métiers qui viennent s’accoler à notre core-business. C’est la tendance : l’ajout de briques de compétences par acquisition de petites entités type start-up pour de l’expertise particulière (IA, informatique, électronique, data management…). Je ne pense pas que dans les cinq ans à venir on verra de gros rapprochements, comme ceux de ces dernières années (ZF/TRW ou Tenneco/Federal-Mogul…).

…. et des groupes de distribution ?

S. G. : Ne peut-on pas ranger le rachat d’Oscaro par PHE dans cette catégorie d’ajout de nouveaux savoir-faire ? Parallèlement, ils ont continué à se renforcer. PHE est allé en Espagne et se renforce en Italie, LKQ et AAG continuent de s’étendre au Royaume-Uni et ce dernier est entré au Benelux. Mais effectivement, on est surtout sur de la consolidation de position. Et c’est logique car après avoir beaucoup acheté, il faut intégrer, digérer… avec l’obligation impérative d’aligner les RP, les hommes… Tout cela demande du temps, des ressources financières et humaines. On voit les synergies se construire. Aujourd’hui, il y a dans ces groupes une coordination Europe pour les achats notamment. On commence à recevoir des appels d’offres pan-européens.

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La décarbonation est en route. Comment s’adaptent les équipementiers à ce changement de périmètre ?

S. G. : En tant qu’équipementier, on fournit de plus en plus de composants pour la voiture électrique et hybride. Notre usine de Saint-Cyr-sur-Loire est à pleine charge. On produit tout un panel de produits dédiés aux modèles électrifiés tels que des roulements spécifiques à haute vitesse, des billes céramiques qui évitent les interférences du champ magnétique… En Chine, SKF cartonne sur tous les roulements dédiés aux véhicules électriques en première monte. Mais les Chinois sont très en avance sur le sujet. En IAM, on va retrouver tout cela… un jour ou l’autre.

On parle à terme de 30 % de perte de business pour la rechange avec la décarbonation. Confirmez-vous ?

S. G. : Qu’est-ce qui va être impacté ? Les fluides, l’environnement moteur… et encore. Il ne faut pas enterrer le thermique. Pour la rechange, les opérations de maintenance – filtre et huile – vont souffrir. Mais le marché du pneumatique ne sera pas impacté, ni celui du freinage. Certaines pièces seront toujours remplacées suite à un accident. Il faut aussi penser que la maintenance sera différente. Peut-être qu’un jour il y aura besoin de faire une recalibration du moteur électrique pour qu’il reste performant, de vérifier l’ampérage du moteur pour qu’il n’y ait pas de surcharge, que la batterie fonctionne bien. De plus le partage automobile va augmenter le kilométrage de la voiture en usage commun. Il y aura donc certainement un changement sur certaines fonctions, mais il y aura toujours de la maintenance… voire préventive.

Comment optimisez-vous votre dispositif – aujourd’hui vital – de transmission de données techniques vers les réparateurs ?

S. G. : E-learning, connectivité directement incluse dans le produit (QR code) pour expliquer comment il doit être monté… La pièce porte aujourd’hui sa propre data (notice de montage et caractéristiques de stockage via le QR code…). La digitalisation aide beaucoup pour développer ces nouveaux outils marketing de transmission de l’information aux garagistes comme aux distributeurs. Avec tous ces dispositifs, effectivement SKF est un peu en avance de phase.

Le combat pour l’accès aux données véhicules est au cœur des enjeux actuels de la rechange indépendante. Votre position sur le sujet ?

S.G. : Nous sommes le plus ouverts possible. Que le conducteur ait accès à sa data semble une évidence. Un jour nos roulements pourront être équipés d’une puce FID pour faire remonter de l’information. Avec les nouvelles technologies, les constructeurs auront peut-être la tentation de refermer le dossier pour préserver leur avantage technologique et le mettre en avant comme un axe différenciant. Mais le débat semble se débloquer, et encore plus depuis que les constructeurs ont la volonté d’intervenir dans la rechange indépendante.

Caroline Ridet

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