LKQ met en route son grand chantier d’unification européenne

Jean-Marc Pierret
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1-LKQ-Europe

LKQ est le N°1 européen de la distribution de pièce qui revendique 5,5 milliards d’euros de CA, 1 100 points de vente, 700 000 clients pros et 27 000 salariés répartis sur notre vieux Continent. Mais le géant a aussi pris conscience qu’il devait structurer et rationaliser sa myriade d’organisations locales et régionales s’il veut rassurer investisseurs et actionnaires. L’opération «1 seul LKQ Europe» est donc déployée officiellement depuis le 10 septembre…

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En l’état, LKQ Europe est un véritable puzzle. Il regroupe la bagatelle de 29 ERP («Enterprise Ressource Planning», ou PGI en Français pour Progiciel de Gestion Intégré), 24 organisations financières, 50 portails clients, 90 MDD, 10 catalogues, 38 systèmes téléphoniques…. Voilà l’état des lieux que LKQ Europe fait de lui-même (voir ci-dessus). Un inventaire à la Prévert de sa coûteuse mosaïque organisationnelle issue de ses multiples conquêtes européennes depuis 2011, lorsqu’il mettait un premier pied sur notre vieux continent en rachetant le britannique ECP.

paneuropéaniser le back-office…

S’il fait cet impressionnant constat, c’est justement pour rassurer ses actionnaires et investisseurs qu’il réunissait le 10 septembre dernier. Car tout cela doit maintenant se normaliser et se simplifier dans un seul et même mouvement baptisé «One LKQ Europe». Et le projet semble bien accueilli. Depuis le 10 septembre, date de la présentation de son plan, l’action LKQ Corporation a d’ailleurs bondi de moins de 27 dollars à presque 32 pour se maintenir depuis au-dessus de 31. Une embellie que l’entreprise n’avait plus vécue depuis presque un an…

Le bon accueil de la Bourse est assez logique. Plus il y a à rationaliser, plus il y a de gains organisationnels à en attendre. voilà d’ailleurs les deux objectifs-clés de l’ambitieux programme : rationaliser le portefeuille de produits (entendez réduire le nombre de fournisseurs, donc mieux acheter en optimisant les 500 000 références cumulées) et déployer une seule et même plateforme ERP qui permette de gouverner l’ensemble au mieux, au meilleur coût et avec la plus efficiente des réactivités.

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…sans perdre l’efficacité des compétences locales

Mais surtout, que personne ne s’en inquiète, précise immédiatement un LKQ qui semble comprendre qu’on pourrait craindre de sa culture américaine qu’il n’ait pas tiré les bonnes conclusions de la multitude de cultures et de profils nationaux en Europe. Le distributeur veut visiblement convaincre qu’il saura ne pas aller trop loin. Seul le back-office est entré en phase de profond remaniement et d’unification pour apporter une harmonie optimale dans les frais de fonctionnement.

Présent dans 21 pays où il s’est ingénié à cibler et acquérir les “champions nationaux”, LKQ Europe promet donc la main sur le cœur que les expériences et compétences régionales de ce vieux Continent si divers resteront incarnées par des managers locaux. L’imagination propre au succès sur chaque marché ou zone ci-contre définies restera partout intacte. Mieux : elle ne pourra qu’être sublimée par l’efficacité des outils et de l’organisation paneuropéenne ainsi restructurés.

Un projet devenu prioritaire

Il y a longtemps que LKQ Corporation travaille à cette “concentration interne”, lui le chantre absolu de la croissance externe.

Nous l’avions évoqué mi-2018 dans un premier article prédisant la nécessaire manœuvre au travers d’une précédente présentation internationale. Une confirmation d’autant plus nécessaire que l’entreprise l’a visiblement compris : si elle veut rassurer au vu de ses faibles performances financières européennes, il faut qu’elle sache montrer qu’elle a décidé de garantir sa profitabilité en n’oubliant pas les défis organisationnels qu’elle se doit de relever pour rendre crédible la navigabilité de son vaisseau européen.

Pour montrer la vertueuse tendance ainsi amorcée, LKQ Corp. communique sur les premiers résultats qu’il attribue à ce constat essentiel et à la mise dans le sens de la piste de ce chantier certainement pharaonique.

Quand l’Ebitda va…

Les anglophones iront dans le détail du graphique ci-dessous, mais l’essentiel est dans l’image : si en un peu plus d’un an, le sacro-saint Ebitda suivi à la loupe par les analystes a subi selon les domaines des orientations positives (rentabilité du distributeur Andrew Page, achats, catalogue…) et négatives (tensions du marché, nombre de jours travaillés, ou le poids de Stahlgruber…), c’est déjà pour un mieux général.

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LKQ-evolution-de-lebitda

Depuis la 1er trimestre 2018, il a progressé de 0,4% au bilan du 2ème trimestre 2019. Dans ce graphique baptisé «impact des initiatives», l’Ebitda est donc passé de 7,3% à 7,7%. Plus loin dans sa présentation, LKQ Corp. pense finir l’année à 5,5 milliards d’euros en Europe et à 7,8% d’Ebitda. Ce dernier s’améliore donc déjà à périmètre constant. LKQ lui prédit même un avenir radieux en 2021 à 9,5%.

Ce n’est certes pas le record du secteur, loin s’en faut. Mais il est vrai qu’étant plutôt du côté des prédateurs que des proies, il n’a pas nécessairement besoin de gonfler sa rentabilité pour se rendre plus séduisant qu’il n’a besoin de l’être…

Un vaste chantier

Le distributeur énumère les chantiers ouverts depuis l’arrivée de Arnd Franz, nouveau patron Europe, dans la structure. «150 jours d’observation» qui constatent :

  • la réussite du premier projet-pilote “Big Data” pour optimiser l’activité et sa rentabilité ;
  • la création d’une équipe internationale chargé de mettre en place un ERP unifié ;
  • l’harmonisation des données du catalogue ;
  • et plus des solutions digitales vers les clients en cours de déploiement.

Ce constat fait, LKQ Corp. considère que le temps est donc venu de la grande intégration. «L’organisation est prête à passer au “One LKQ Europe”», proclame-t-il. Le distributeur promet donc de se positionner ainsi pour :

  • devenir le chef de file en matière de création de valeur pour le marché des pièces de rechange de demain ;
  • tirer parti des achats et des opérations grâce à une exécution cohérente du plan ;
  • saisir les opportunités pour développer des pièces de réparation-collision sur certains marchés-clés.

Sans oublier un siège social européen qui pourrait bien être localisé en Suisse, selon l’un de nos lecteurs, témoin d’une déclaration récente en ce sens de Arnd Franz (voir commentaire ci-dessous).

Reste à savoir combien des 27 000 employés actuels de la nébuleuse LKQ Europe subsisteront une fois qu’elle sera devenue cette galaxie organisée que nous promet le distributeur. Un plan de licenciements au Royaume-Uni avait été dévoilé par nos confrères britanniques en décembre dernier.

De cela, il n’en parle toujours pas explicitement dans sa présentation. Mais les investisseurs savent de toute façon lire d’eux-mêmes entre les lignes…

Jean-Marc Pierret
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