GPA Groupe : la mission de l’économie circulaire

Baptisée le « Géant de la pièce » à sa création, l’entreprise est devenue GPA en devenant « grande » ! Et c’est peu dire que le groupe n’a plus rien à voir avec la petite entreprise de récupération des déchets d’ateliers créée après-guerre par les grands-parents des dirigeants actuels, Johan Renaud en étant le directeur opérationnel et porte-parole. « Tout a changé, sauf la localisation en plein cœur de la vallée du Rhône et l’esprit avec comme ADN des valeurs humaines fortes initiées par mes grands-parents. »

Le premier axe de modernisation de la petite entreprise de récupération des déchets d’ateliers familiale a été initié par Pierre Renaud. « En 2001, décès de mon grand-père, véritable mémoire vivante de l’entreprise qui avait en tête les stocks, les prix, le nom des clients, mon père a lancé le chantier d’informatisation des stocks avec un logiciel développé en interne. Aujourd’hui encore, l’informatique est intégrée avec un pôle de dix informaticiens maisons », raconte Johan Renaud. 
 

Et en 2016, ce dernier, pilote de la troisième génération, va amener GPA vers une transformation sans précédent : passer d’un modèle artisanal à l’industrialisation. Un pas de géant. « Rationaliser et formaliser me semblaient indispensables pour grandir. Si nous voulions attirer les clients (assureurs), il fallait casser les codes de la "casse auto" !  Nous avons choisi de monter une usine pour changer d’échelle et générer le volume nécessaire au développement de notre entreprise. »

Sauf qu’il a fallu tout inventer. « Nulle part le schéma que j’avais en tête n’existait. Nous devions donc théoriser l’industrialisation d’un métier réputé non-industrialisable. » La famille Renaud est donc allée chercher  hors de nos frontières des sources d'inspiration de bonnes pratiques chez des recycleurs – Europe du Nord, Allemagne, Japon, USA – mais aussi auprès des constructeurs, champions des process industriels. 

« Cela nous a permis de commencer à imaginer notre usine du futur ! Nous avons fait participer nos salariés et mis en place une task force. » En sort un concept osé, « personne ne l’avait fait avant », engageant 25 M€ d’investissement quand GPA n’annonçait que 16 M€ de CA ! Le chantier est lancé en 2018 (conception de l’usine, dessin des flux…). « Tous les collaborateurs de l’entreprise se sont investis dans la transformation. » Un vrai projet d’entreprise mobilisateur. 

En décembre 2019, l’usine « du futur » est inaugurée pour être 100 % opérationnelle dès février… Mais mars, avec le confinement, stoppe tout. « 160 salariés chez eux ! Avec dix jours d’arrêt total puis une reprise mais par intermittence. »

Un pari que certains jugent fou, mais qui est gagné. « Depuis le 31 décembre 2022, GPA est rentable sur le recyclage ! Car jusque-là c’est notre activité de revente de véhicules qui assurait notre profitabilité. Nous avons mis 60 ans pour "craquer" le modèle et devenir rentable sur la pièce de réemploi », s’amuse Johan Renaud. 

Ce modèle industriel 4.0 avec un commerce qui se fait exclusivement en ligne, via le site GPA26 (un tiers des ventes) et le reste sur les marketplaces de l’écosystème (notamment eBay, Aniel Marketplace), a suscité l’intérêt d’organisation d’après-vente auto à la recherche d’une solution d’approvisionnement en PRE (Carflex, Axial, Delco…). Et d’autres accords devraient être signés d’ici la fin de l’année.
 

L’entreprise et son dirigeant sont déjà sur le coup d’après, avec dans le viseur de nouveaux développements. À court terme, le traitement de PL en fin de vie va être intégré à l’activité. Le traitement des organes électroniques est également à l’étude. Tout comme le recycleur qui est actuellement mono-site (même s’il est giga !) s’interroge sur la pertinence de dupliquer des sites ailleurs sur le territoire « car si nous avons bien une activité nationale, nous n’en avons pas encore l’image ». Cela pourra devenir un atout supplémentaire, alors que la filière est confrontée à une réorganisation voulue par les pouvoirs publics qui imposera aux recycleurs d'être adoubés par un constructeur !

Mais pour le patron de GPA, le « gros sujet » technologiques et très impliquant du moment est bel et bien celui des batteries de VE et du démontage et rénovation des modules périphériques. « Aujourd’hui, il est interdit de réutiliser des batteries de VE accidentés. Il est donc important qu’une filière d’extraction des matières "made in France" se consolide », analyse Johan Renaud. Le recycleur GPA se mettra-t-il dans la boucle ?  « Faire que la voiture devienne un jour de la matière pour que les constructeurs puissent reconstruire une nouvelle voiture sachant que la loi va imposer que chaque produit neuf intègre 12 à 24 % de matières recyclées ! C’est un écosystème complet à inventer. Pour que l’économie circulaire soit une bonne idée, il faut démontrer sa rentabilité. Nous devons donc nous concentrer sur la valeur ajoutée pour qu’enfin elle dépasse les seuls idéaux écologistes. »