PSA : les ex-DOPR Peugeot et Citroën n’aiment pas la « tectonique des plaques PR »…

Jean-Marc Pierret
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Résiliés par PSA pour favoriser une révolution logistique des plaques PR qui n’annonce rien de très clair pour la très grande majorité d'entre eux, les ex-DOPR Peugeot et Citroën s'inquiètent pour leurs entreprises sans encore vraiment savoir comment ils seront accompagnés et préservés. Les alternatives sont encore floues et le constat reste inquiétant, surtout chez les plus faibles des “Citroën” : comment survivre et prospérer sans tout ou grande partie de l'activité pièce, son CA et sa rentabilité ?
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C'est une évidence croissante : les concessionnaires Peugeot comme Citroën ne goûtent pas tous la "tectonique des plaques" PR (pièces de rechange) initiée par PSA en février dernier. Car en tant qu'ex-DOPR (Distributeurs officiels de pièces de rechange) tous résiliés dans le cadre de la redistribution logistique voulue par le constructeur, ils savent une chose : les chiffres annoncés par ce dernier ne plaident pas pour le repêchage d'une très grande majorité d'entre eux.D'un côté, 35 à 50 futures plaques de distribution de pièces trimarque Peugeot/Citroën/Eurorepar (et peut-être aussi équipementières) décidées par le constructeur selon un schéma logistique qui veut couvrir n'importe quel point de livraison en 2 heures maxi. De l'autre, l'essentiel des 500 DOPR des deux réseaux qui se constatent en ballotage très défavorable : peu ou prou, 90% d'entre eux vont perdre la carte pièces, son chiffre d'affaires et sa rentabilité.Pour l'heure, les choses ne sont certes pas (encore) aussi claires. Dans les mouvantes et tendues discussions entre le constructeur et ses réseaux, il y aurait quatre destins possibles sur la table encore mal dressée des négociations. Renoncer purement et simplement à l'activité pièces, donc, en vertu de compensations qui restent à définir. Mais d'autres possibilités intermédiaires sont évoquées : garder l'activité avec ou sans facturation partielle, mais avec une  rétribution à la performance par exemple. Ou bien sûr, faire partie des fameux 35 à 50 happy few qui s’évaderont par le haut.
Les plateformes PSA aux ténors des réseaux ?
La très grande majorité des ex-DOPR en attente d'un destin ne se fait donc guère d'illusion. Ils sont souvent convaincus que les dés ont roulé et que le schéma est déjà défini pour l'essentiel : les jeux seraient faits et les cartes se distribueraient déjà entre ténors des deux enseignes, pour la plupart groupes monomarque ou multimarque. Ces derniers seraient de facto du bon côté de cette stratégie “macro” si chère à PSA, ne serait-ce que parce qu'ils ont déjà les surfaces requises ou qu'ils ont les moyens de les faire sortir de terre. Une stratégie macro qui est un peu aux pièces du constructeur ce que la réforme de la carte hospitalière est à la santé publique : PSA veut rassembler les compétences dans des centres PR d'excellence, quitte à géographiquement s'éloigner un peu des clients PR mais dans l'espoir de mieux les servir.Il est vrai que dans ce contexte de crise et donc d'opportunités, certains barons des réseaux se sont effectivement déjà mis en mouvement. Parfois même si vite que PSA les regarde faire avec une pointe d'exaspération. Les voilà qui font fleurir des surfaces allant parfois jusqu'à 20 000 m2, dans des zones du coup saturées. La volonté du constructeur de dessiner une harmonieuse répartition géographique des plaques −et d'assurer la rentabilité qui va avec ces territoires théoriques− semble ainsi parfois mise à mal avant même le début des grandes manœuvres, au risque de venir refroidir les bonnes volontés. Peut-être aussi ces grands concessionnaires préparent-ils ainsi des stratégies alternatives, ce qui n'est guère mieux pour le constructeur...
Colère “chevronnée”
Chez les autres ex-DOPR aux tailles plus modestes, qu'ils soient de rang 1 ou de rang 2, la colère monte inexorablement face à cette tectonique des pièces qui a ce point commun avec celle des plaques géologiques : celles qui dominent enterrent inexorablement celles soumises à la subduction. Ils craignent d'avoir déjà dû quitter la table sans savoir encore dans quelle assiette ils seront mangés. Les plus inquiets sont justement ces bons concessionnaires performants, forts d'une activité pièce devenue un pilier central de la performance de leurs affaires. C'est l'équilibre financier, la pérennité de l'entreprise –et le destin de collaborateurs qui n'ont pourtant pas démérité– qui sont en jeu. Et sans visibilité aucune pour l'instant : PSA a bien promis d'accompagner les restructurations jusqu'à fin 2019 ; mais ça, c'est demain matin. Et après ?En outre, face à cette désespérante situation, les deux réseaux ne sont pas structurellement logés à la même enseigne. Le réseau au lion est plus "concentré" que celui de Citroën. Il est en outre celui qui diffuse les gammes VN à grande diffusion. Le réseau aux chevrons apparaît, lui, bien plus fragile car bien plus éclaté capitalistiquement. Et plus généralement, il ne sait pas vraiment quoi attendre de rassurant en tant que réseau destiné à se spécialiser en véhicules de niche. La colère qui monte est donc bien plus “chevronnée” que “féline”. Il y a encore moins d'alternatives économiques chez les petits Citroën que chez les petits Peugeot.Dans ce contexte explosif, il traine, le “dossier Mister-Auto” de la pièce PSA sur internet. Les réseaux RA1 et RA2 des deux marques n'ont pas avancé. En tout cas, pas au rythme initialement annoncé par eux au lendemain de la reculade de PSA qu'ils obtenaient en juin dernier par leur inédite fronde commune (voir «Réparateurs agréés contre Mister-Auto/PSA : sortie de crise et reconstruction»). PSA ne semble pas non plus pressé de rallumer cette mèche.Mais on peut tous les comprendre, constructeur comme DOPR : le chantier de la révolution des plateformes est loin d'être bouclé. Et les grandes victoires s'obtiennent sur un minimum de fronts...
Jean-Marc Pierret
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