Recours direct : la MAIF définitivement condamnée à La Réunion

Romain Thirion
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Le 13 mai dernier, le Tribunal d’instance de Saint-Denis de La Réunion a mis un point final à l’affaire qui opposait une société de l’île dont le véhicule avait été accidenté à la MAIF, objet d’une procédure de recours direct. Déboutée par une juridiction de proximité, le jugement initial avait été cassé puis renvoyé devant le TI du chef-lieu du département d’outre-mer, qui a donc rendu un verdict favorable -et définitif- au plaignant initial !

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La justice, celle prononcée par des juges professionnels, a enfin été rendue à Saint-Denis de La Réunion, le 13 mai dernier. Celle-ci s’est fait attendre pendant près de trois ans. Le chef d’entreprise qui avait conduit un recours direct envers la MAIF, après qu’un deux-roues assuré par la mutuelle a percuté son véhicule professionnel, a eu le mérite de s’accrocher. Il a finalement été reconnu dans son droit à une indemnisation pleine et entière du préjudice subi.

Cahin-caha, le bon droit l’emporta

Mais quel chemin semé d’embûches pour l’entrepreneur ! Rappelons, en effet, comme nous l’avions déjà fait dans notre article du 10 septembre 2018, que celui-ci avait ouvert une procédure de recours direct à l’encontre de la MAIF. E n première instance, la juridiction de proximité devant laquelle l’affaire avait été jugée (puisque le tribunal de commerce s’était déclaré incompétent), l’avait débouté de toutes ses demandes d’indemnisation et l’avait même condamné au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux dépens de l’instance !

La juridiction de proximité estimait la procédure mal fondée et l’entrepreneur s’était alors décidé à se pourvoir en cassation, interjeter appel n’étant pas permis suite à la sentence d’un tribunal de proximité. Et la Cour de cassation, elle, a fini par casser le jugement initial, jugeant la procédure tout à fait recevable, même incorrectement fondée, puisque c’était au juge de proximité lui-même de requalifier l’action de la victime au lieu de la débouter.

Le recours direct validé par le Tribunal d’instance

La Cour de cassation avait donc renvoyé l’affaire devant le Tribunal d’instance de Saint-Denis de La Réunion, les juridictions de proximité ayant été supprimées entre le jugement de première instance et le verdict de la Cour. Et le TI, conformément aux dispositions de la loi du 5 juillet 1985, « applicable aux victimes d’un accident de la circulation impliquant un ou plusieurs véhicules terrestres à moteur », ainsi qu’à celles de l’article L124-3 du Code des assurances, qui dispose que « le tiers lésé dispose d’un droit d’action directe à l’encontre de l’assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable », a donc reconnu la pleine légitimité de l’action de l’entrepreneur.

En outre, le TI de Saint-Denis s’est logiquement appuyé sur le constat amiable dressé par les deux conducteurs ainsi que sur l’absence d’éléments constitutifs de faute de la part du plaignant, ni dans l’environnement routier du site de l’accident, ni dans les hypothèses de la MAIF, qui n’a produit aucune pièce venant l’étayer, selon le juge du TI, pour reconnaître l’entière responsabilité du sinistre au conducteur du deux-roues assuré par la mutuelle. Ainsi la MAIF, qui sollicitait la reconnaissance de responsabilités partagées dans le sinistre, s’est vue déboutée de ses demandes.

La résistance abusive non retenue par le tribunal

A l’inverse, outre la condamnation de la MAIF aux dépens de l’instance ainsi qu’au règlement d’une somme de 400 euros sur le fondement de l’article 700, le TI de Saint-Denis a accédé à presque toutes les demandes des avocats de l’entrepreneur victime, notamment 1 120 euros au titre du préjudice matériel, 65 euros au titre du préjudice d’immobilisation et 455 euros au titre des frais d’expertise. Presque toutes, oui, car les 1 000 euros réclamés au titre de la résistance abusive n’ont, eux, pas été retenus par le tribunal. Ce dernier a souligné que le créancier, donc la victime, devait « justifier d’un préjudice particulier, distinct du simple retard dans l’obligation de payer ». Ce qui n’était manifestement pas le cas, selon le juge.

Néanmoins, ce jugement vient clôturer une série de rebondissements judiciaires dans une procédure de recours direct qui n’aurait pas dû en connaître autant. Car, comme le reconnaît le cabinet Auto Conseils Ater, qui a effectué l’expertise du véhicule de l’entrepreneur sinistré et qui l’a conseillé dans la constitution d’une procédure de recours direct, sur la dizaine de dossiers semblables traités sur l’île par ses soins, « il apparaît que la moitié a pu être géré à l'amiable et le reste porté au judiciaire ».

Signe que, comme le reconnaît le code qui régit leur profession, les compagnies et mutuelles d’assurance sont désormais bien conscientes que les procédures de recours direct correctement menées à leur encontre sont, d’une part, légitimes et, d’autre part, qu’il est souvent préférable de régler les litiges à l’amiable plutôt que devant la justice. Laquelle donne généralement gagnante la victime lorsque ce type de procédure est diligenté de manière appropriée et sur la base des textes de loi idoines.

Romain Thirion
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