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La connectivité, coffre-fort des ateliers de marques ?

Muriel Blancheton
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Concession tablette client

À horizon 2030, tous les constructeurs ou presque annoncent des gammes électrifiées a minima à 80 % mais toutes connectées à 100 %. Une rupture supplémentaire qui pourrait bien les protéger de toute tentative de réparation extérieure à leurs réseaux. Car pour l'heure, si le Poids lourd avance pas à pas sur le sujet, les réseaux multimarques indépendants sont encore loin derrière...

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La connectivité devient massive chez tous les constructeurs, c’est un fait. Chez Renault par exemple, 80 % de son parc sera suffisamment connecté d’ici sept ans pour permettre aux concessionnaires de faire de la maintenance dite proactive. Le constructeur a déjà calibré son offre sur quatre familles : le pneumatique, la batterie, l’huile et le freinage, via ses applications myRenault ou myDacia. Son dernier modèle sorti, l’Austral, communique en temps réel les données d’accélération, de pression pneumatique, de qualité lubrifiant et de niveau batterie 12V. Ainsi, le réseau sait déjà avant même le client ce qui se passe sur sa voiture. « Tout l’enjeu réside dans notre capacité à traiter la data commercialement parlant. Nos conseillers doivent être capables de diagnostiquer le véhicule à distance et d’anticiper les besoins du client pour lui offrir une expérience après-vente nouvelle plus fluide et inégalée », expliquait déjà pour Zepros François Delion, le directeur après-vente Monde du Groupe Renault, dans notre dernière édition de l'Atlas de la distribution PR. 
Des concessionnaires européens testent déjà pour le constructeur des outils pour réceptionner les véhicules sans voir le client (prise de rendez-vous digitale, jockeyage ou boîte à clés, validation de l’ordre de réparation sur le smartphone, opérations additionnelles, paiement en ligne et restitution). « Nous ambitionnons de rendre 80 % du réseau Renault G4 (France, Espagne, Italie et Allemagne) opérationnel d’ici fin 2023. Dès cette fin d’année, deux millions de véhicules Renault seront déjà communicants. La connectivité n’est plus un rêve. Associée à la digitalisation du parcours client, elle peut constituer une vraie rupture. ».

Un CRM qui dépasse le cadre du prédictif

De son côté, Nissan France a recalibré son CRM pour qu’il devienne encore plus prédictif. Ce dernier est déjà alimenté par l’historique de facturation du réseau. L’outil transfère ensuite les campagnes (SMS, e-mailing) dans le propre outil du concessionnaire pour ses relances. La nouveauté repose sur l’enrichissement de ce CRM par des données réelles grâce à la connectivité croissante et inéluctable des gammes (Navara, Juke, Qashqai…). « Nous récupérons déjà des informations clés comme le kilométrage et la localisation et nous travaillons parallèlement sur une meilleure utilisation en marketing des témoins d’alerte. Cela nous permettra d’inviter le client à se rendre en concession », détaille Olivier Cavarec, le directeur Pièces et Services de Nissan France. Si ce CRM réel va ainsi permettre d’anticiper les besoins du client, cela suppose un parc connecté encore plus large. Surtout, cela suppose que le client connecte son véhicule en amont (lors de la livraison de son VN par exemple ou lors de son passage en atelier). « La connectivité est croissante et nous n’en sommes encore qu’au début de l’exploitation des données générées. Mais nous prenons de la vitesse et de l’expérience sur le sujet. C’est inéluctable sachant que le parc de Nissan sera 100 % connecté en 2030 », estime-t-il. Et là encore, tout l’enjeu de la marque et de son réseau repose sur leur capacité à utiliser au mieux les outils à disposition, comme le CRM, et transformer les données utiles en OR sonnants et trébuchants.

Muriel Blancheton

Data Act : Un marché à 300 Md€

Voté par le Parlement, le Data Act désigne qui peut avoir accès aux données et à quelles conditions et clarifie déjà un point : le propriétaire des données est celui qui conduit le véhicule car c’est bien lui qui les génère et pas le véhicule seul. L’enjeu est colossal puisque ces données issues des véhicules représentent un beau gâteau de 240 Md€ (maintenance, réparation, services associés) voire 300 Md€ d’ici 2030 avec un parc connecté qui grossit à vue d’œil. L’accès à ces données trouvera peut-être tremplin avec un règlement spécifique réclamé par les acteurs de la mobilité

Lire La filière auto réclame un accès équitable aux données

Réseaux indépendants : Quand le témoin au tableau de bord reste l’arbitre

Dans les réseaux multimarques, la maintenance prédictive reste un vœu pieux. C’est certes le rôle du MRA de se positionner en tant que « médecin de famille » et en conseil pour l’entretien auprès de son client. Et de miser sur le préventif plutôt que de devoir faire du curatif, plus onéreux pour son client. Mais c’est plus facile à dire qu’à faire… 

« Le contexte économique ne pousse pas les automobilistes à anticiper les interventions sur leur véhicule. Au contraire, ils tirent au maximum, en attendant qu’un témoin au tableau de bord les alerte sur une opération d’entretien à réaliser… », considère Jérôme Magloire, concept manager du réseau Bosch Car Service. Même son de cloche chez Autodistribution : « Entre la problématique latente de pouvoir d’achat et des pas d’entretien toujours plus espacés sur les véhicules modernes, le contexte ne plaide pas vraiment en faveur du préventif », estime ainsi Eddy Albert, directeur des réseaux mécaniques VL du groupement de distribution. Reste que des outils pourraient faciliter la tâche du professionnel : « Les outils de marketing prédictif permettent d’exploiter le fichier client afin de rappeler en temps et en heure quelle intervention doit être prochainement effectuée sur le véhicule », souligne le directeur des réseaux mécanique VL Autodistribution.

Le prédictif prend la flotte

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Tableau de bord

L’entretien prédictif pourrait-il donc venir des clients pros, pour qui le véhicule est un instrument de travail ? Là encore, c’est trop tôt. Et pour la même raison : cette typologie de clients est, à l’instar des particuliers, également contrainte financièrement. « Il y a deux profils chez les professionnels. Les premiers sont les véhicules de flottes en location où le loueur pilote seul le poste entretien. L’adhérent n’a donc pas la main pour anticiper sur une intervention particulière. Le second profil est composé des flottes propriétaires avec un gestionnaire qui attend de son prestataire la bonne intervention au bon moment, ni plus ni moins », précise Eddy Albert. Techniquement les solutions existent, à l’image de Webfleet Solutions proposé par le groupe Bridgestone. Encore faut-il que les acteurs multimarques puissent avoir accès à la data du véhicule… 

Jérémie Morvan

Le poids lourd toujours en pointe

Si la technologie des véhicules industriels est plus poussée qu’ailleurs, là encore, on constate les balbutiements des réseaux sur l’entretien prédictif. Certes, les véhicules connectés commercialisés depuis près d’une dizaine d’années débouchent sur un parc circulant non négligeable. Forcément, ce sont les réseaux de marques qui sont en pointe. Chez Iveco par exemple, 75 % des ventes sur les gammes lourdes et 63 % pour les gammes légères (Daily) portent sur des véhicules connectés. En parallèle, depuis trois ans, un camion sur deux vendu dispose d’un contrat de service. Toutefois, « si le véhicule communique avec le chauffeur via une appli sur son téléphone ou vers les gestionnaires de parc (via un portail digital), la transmission de la data n’est pas encore réellement effective jusqu’à l’atelier de la concession ou du point de service agréé », reconnaît Thierry Kilidjean, directeur général Customer Service Iveco France. Mais le constructeur y travaille : « Deux sites pilotes sont actuellement en test pour basculer, grâce à la data, en maintenance pro-active », précise le dirigeant. Un problème survient ? Le chauffeur et le gestionnaire de parc sont immédiatement alertés par le véhicule. Le rendez-vous peut être pris et le camion arrive à l’atelier au jour J après qu’une commande de pièce ait été automatiquement générée suite à la prise de rendez-vous.

Le réparateur mute en conseiller service

Dans le monde du multimarquisme, les initiatives se font plus rares. Mais un concept est actuellement en train d’émerger avec la société ITTM Solutions (pour Intelligent Truck & Trailer Maintenance). Celle-ci s’appuie sur la télématique embarquée et l’intelligence artificielle afin de positionner le réparateur dans un rôle de conseiller de gestion de parc. Avec des économies à la clé : « La maintenance prédictive permet un gain de 42 % dans le traitement d’une panne par rapport à un ensemble non équipé en télématique embarquée », estime en effet Mathieu Lommere, co-fondateur de l’entreprise. À suivre…
Jérémie Morvan

Muriel Blancheton
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