La libéralisation des pièces de carrosserie enfin validée par le Conseil Européen

Romain Thirion
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Tests PQEC Centro Zaragoza

L’organe réunissant les chefs d'État ou de gouvernement des vingt-sept membres de l'Union européenne vient de donner son feu vert final à un ensemble de réformes de la protection des dessins et modèles industriels, facilitant l'accès des consommateurs aux pièces de rechange visibles pour les consommateurs, en particulier les optiques et les éléments de carrosserie.

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Le nouveau paquet législatif, voté par le Parlement Européen en mars dernier et fraîchement validé par le Conseil européen, introduit une clause de réparation harmonisée dans toute l'UE. Pour rappel, la fameuse clause réclamée à cor et à cris depuis des plus de trente ans par l’après-vente indépendante en Europe via la campagne Ecar vise à favoriser la concurrence et à permettre aux citoyens de réparer leurs véhicules à un coût moindre. Car certains pays, comme la France, ne bénéficiaient toujours pas d’un marché libéralisé. L'un des objectifs principaux du paquet adopté ce 10 octobre 2024 est donc de réduire les barrières à l'entrée pour les acteurs du marché des pièces de rechange, tout en protégeant les créateurs des produits originaux.

Via la clause de réparation harmonisée, l'UE permet l’utilisation de pièces alternatives pour la réparation de produits tels que les véhicules. Et notamment les pièces de qualité équivalente certifiée (PQEC), visage policé des naguère sulfureuses pièces adaptables. « Cette réforme garantira que les lois sur la protection intellectuelle ne pourront plus être utilisées à mauvais escient sur le marché secondaire pour imposer des monopoles injustes et injustifiés sur les pièces de rechange de réparation visibles par une extension indue des droits de conception, qui sont légitimes sur les produits primaires, mais conduisent à des monopoles sur le marché secondaire où aucune alternative de conception n'existe pour les pièces de rechange liées à la carrosserie du véhicule », se félicite Sylvia Gotzen, directrice générale de la Figiefa, représentant les distributeurs de pièces et d’équipements et équivalent de la Feda française au niveau européen.

Une protection pour l’IAM

La réforme vise également à créer un cadre juridique plus transparent pour les entreprises qui conçoivent et commercialisent des produits dans l’UE. En harmonisant les règles sur la protection des dessins et modèles, l’Union veut encourager l'innovation tout en protégeant les droits de propriété intellectuelle. Le Conseil espère que cette approche équilibrée stimulera la création de nouveaux produits tout en maintenant une concurrence saine et équitable sur le marché des pièces de rechange. En outre, la réforme clarifie la procédure de dépôt des dessins et modèles au niveau européen, facilitant ainsi l’enregistrement pour les entreprises et réduisant les coûts administratifs.

Comme le précise la Figiefa dans son communiqué suite à la décision du Conseil européen, celle-ci s’accompagne d’une "présomption de finalité de réparation" pour les fabricants ou vendeurs indépendants de pièces de rechange, afin de garantir la sécurité juridique et la prévisibilité commerciale sur les marchés européens de la réparation. Les fabricants ou vendeurs indépendants de pièces détachées seront ainsi dispensés de garantir que leurs produits « sont utilisés dans le seul but d’une réparation », les protégeant ainsi contre tout litige avec les titulaires de droits sur les dessins ou modèles, généralement les constructeurs. Ils restent cependant tenus d’informer les consommateurs sur l'origine commerciale du produit et l'identité du fabricant de façon claire et visible.

Les assureurs se félicitent

Eux aussi partisans de cette clause depuis que l’explosion du prix des pièces neuves leur a fait tourner le dos aux constructeurs sur cet enjeu précis, les assureurs se réjouissent de cette décision. Selon Insurance Europe, leur organe représentatif au niveau continental, cette harmonisation va dans le bon sens. Car l’accès à des pièces de rechange alternatives à un prix compétitif permettra de réduire les coûts des sinistres et, potentiellement, d’influer sur le coût des primes d'assurance. Cela renforce l'idée que le paquet législatif profitera non seulement aux consommateurs, mais aussi aux industries qui soutiennent l'après-vente, tout en garantissant des protections suffisantes pour les propriétaires de droits sur les dessins originaux.

Huit ans de plus pour un marché français libéré

Dans son communiqué du 11 octobre dernier, la Figiefa précise toutefois que certains pays, dont la France, devront encore attendre pour bénéficier d’un marché entièrement libéralisé. Et ce, même si la clause de réparation de l'UE s'appliquera bel et bien à tous les nouveaux produits à partir de 2024.

« En raison de positions divergentes entre les États membres de l'UE, les négociateurs ont dû trouver un compromis sur les délais. Pendant huit ans après l'entrée en vigueur de la directive, la protection des modèles sur les pièces de rechange de réparation visibles sera toujours autorisée dans les États membres qui n'avaient pas encore libéralisé leurs marchés nationaux au moment de l'adoption de la loi, pour les produits existants dont les modèles ont été enregistrés avant la date d’entrée en vigueur de la directive. Cela signifie que certains des produits déjà existants ne bénéficieront pas de la clause de réparation dans certains pays avant 2032. »

Romain Thirion
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