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Pièces captives : même libéralisé, le marché profitera encore aux constructeurs

Romain Thirion
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Le Conseil constitutionnel a validé le 13 août dernier l’article de la loi Climat & Résilience ouvrant dès janvier 2023 à la concurrence le marché des pièces de carrosserie. La disposition laisse toutefois aux constructeurs une exclusivité de 10 ans sur leur commerce à compter de l’enregistrement du dessin ou modèle de la pièce, soit largement le temps de tirer les marrons du feu…

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Abattu, le monopole des constructeurs sur la pièce de carrosserie ? Réduit, plutôt ! Car comme le roseau qui plie mais ne rompt pas, l’exclusivité dont disposent ces derniers sur la distribution de pièces visibles – intérieures comme extérieures – va perdurer encore quelque temps. Ils disposent d’abord d’un sursis d’un peu plus d’un an, puisque ce n’est qu’au 1er janvier 2023 que les équipementiers de première monte qui fournissent les constructeurs pourront directement accéder au marché, conformément à la loi Climat & Résilience que vient de valider le Conseil constitutionnel. Celle-ci procède en effet à une modification du droit des dessins et modèles et du droit d’auteur.

Mais selon l’un des principaux observateurs du marché de la carrosserie, qui préfère garder l’anonymat, les équipementiers d’origine pourraient se retenir de se lancer, trop ficelés qu’ils sont par contrat avec leurs clients. D’autant qu’ils devront créer des divisions dédiées à l’après-vente, ce qui prendra du temps. Car en-dehors de Faurecia, avec Faurecia Service qui se consacre pour l’instant à la distribution de solutions de dépollution, les Plastic Omnium et autres Novares en sont dépourvus… Tandis que les constructeurs, eux, disposent de toutes les structures nécessaires pour préserver leur part du gâteau.

Rien donc de très nouveau depuis notre analyse initiale lors du texte de la loi LOM mi 2019 (voir « Pièces captives : loi LOM, ou la libéralisation contrefaite »)...

Vers un marché à deux vitesses ?

Heureusement pour les équipementiers d’origine, leurs concurrents aftermarket ne pourront pas occuper le terrain avant 10 ans sur les pièces dédiées aux véhicules neufs, contre 25 ans jusqu’ici. Parce que c’est le délai de protection que le législateur a laissé aux constructeurs et à leurs partenaires à compter de l’enregistrement du dessin ou modèle de la pièce.

Et comme l’âge moyen du premier sinistre est inférieur à ces 10 ans – 75 % des pièces de carrosserie vendues concernent des véhicules de moins de 10 ans – ils continueront de tirer les marrons du feu… Surtout s’ils continuent d’augmenter leurs tarifs, comme les 11 % de hausse relayés par SRA sur les 3 dernières années l’ont prouvé.

En revanche, ce sont bien les équipementiers qui se consacrent à l’après-vente qui devraient se tailler la part du lion du commerce des pièces dédiées aux véhicules de plus de dix ans. Ce qui leur laisse de jolies opportunités considérant l’âge moyen du parc français. Selon AAA Data, celui-ci était de 10,8 ans en 2020. Un âge qui ne cesse de progresser, en dépit des tentatives multiples de l’État pour rajeunir le parc, à coups de primes à la casse, à la conversion et d’injonctions à remplacer les véhicules âgés par la mise en place de ZFE et autres critères environnementaux.

Le marché de la pièce de carrosserie pourrait donc devenir un business à deux vitesses : l’un, majoritaire, dominé par la pièce d’origine ; et l’autre, minoritaire sans être ridicule, par celle de qualité équivalente.

La Feda attend une harmonisation européenne

L’article de la loi Climat & Résilience, validé par le Conseil constitutionnel, vient également libéraliser le marché du vitrage – qui l’est déjà de facto – ainsi que des optiques de phares et des rétroviseurs, dès janvier 2023 également. Des pièces déjà moins cadenassées que les pièces de robe, mais que la Feda se félicite aussi de voir davantage ouvertes à la concurrence. Après l’échec des amendements des lois LOM et ASAP, retoqués à chaque fois en tant que “cavaliers législatifs”, cette validation par les “Sages” du Palais Royal sonne comme une victoire pour la fédération des distributeurs.

« La Feda se réjouit d’avoir été entendue pour cette avancée historique, qu’elle considère comme un premier pas. Elle appelle désormais de ses vœux une prochaine harmonisation européenne afin d’établir, partout en Europe et dès que possible, une libéralisation totale de l’ensemble du marché des pièces détachées, à l’instar de ce qui existe déjà dans une grande partie des Etats-membres », rappelle son secrétaire général, Mathieu Séguran.

Car la Commission européenne envisage sérieusement de légiférer sur le sujet et d’obliger les États à inscrire dans leurs textes de loi nationaux la fameuse clause de réparation, censée être encore plus libéralisatrice que cet article de la loi Climat.

Romain Thirion
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